Alexandra, avant d’être docteur en pharmacie, tu es avant tout une mordue de sports, à l’initiative d’Organicoach.
Finalement je crois que j’ai toujours fait du sport ! J’ai un peu tout essayé, de la danse, de la gymnastique, de la natation, du handball, de l’athlétisme. Il fallait que je bouge. J’ai découvert assez tard, vers 18 ans, le triathlon, mais j’ai tout de suite aimé. J’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes. Le multisport est devenu pour moi une façon de vivre et encore plus depuis 1998 l’année où j’ai rencontré mon futur mari, Nicolas Lebrun. Depuis, j’ai élargi la gamme avec du VTT, du ski de fond, du ski alpinisme… En triathlon je crois que j’ai tout essayé, du court au long, de la route au VTT, en passant par la neige.

Comment en es-tu arrivée à Organicoach ?
J’ai suivi des études de docteur en pharmacie, mais j’ai vite compris que je préférais la botanique à la pharmacologie. Après avoir passé ma thèse (« Aromathérapie, phytothérapie et diététique appliquées au triathlon professionnel »), j’avais à disposition deux cobayes de choix : Nicolas Lebrun et René Rovera. J’ai continué à me former et j’ai suivi trois années à l’Ecole Lyonnaise des Plantes Médicinales. Depuis quoique je fasse, sport et naturel sont liés. Avec Nicolas, l’idée de créer Organicoach (contraction d’organique, de Nico et de coach) à la fin de sa carrière est apparue de façon évidente. Depuis un an, j’ai enfin quitté mon travail de pharmacienne d’officine pour me consacrer entièrement à la structure. Et comme pour moi la diététique n’est pas quelque chose d’arrêté et que ces dernières années sont synonymes de pas mal de découvertes, je vais faire en ce début d’année 2017 sur Paris le DU Exercice Entraînement Nutrition et Nutriments.

Dirais-tu que pour le grand public d’un côté, pour le public sportif de l’autre, les femmes font plus attention à leur mécanique corporelle que les hommes ?
En fait je dirais que la tendance évolue. Grand public ou sportifs, les hommes font de plus en plus attention à leur plastique. Et le sportif encore plus. J’ai l’impression que les femmes sportives recherchent à la fois de jolies formes musclées, mais aussi un bien-être dans leur corps. Elles sont en général plus sensibles aux petits maux de tous les jours et aspirent à les régler par un équilibre de vie. Mais attention à ne pas faire de généralités. Dans le sport on rencontre aussi beaucoup de mâles sensibles !

Aujourd’hui, quels sont les grands défauts d’alimentation des sportifs ?
Le sucre ! Mais on ne peut pas les blâmer, les lobbies du sucre, liés au sport, ont bien fait leur travail. Mangez du sucre et bannissez le gras, qu’ils disent ! Actuellement les sportifs ont tellement habitué leur corps à l’utilisation du sucre qu’il ne sait plus consommer autre chose. Or on s’aperçoit que le gras n’est pas le principal facteur à la prise de poids inutile et que c’est un très bon fournisseur d’énergie. Une vague de « bon gras » est en train de revenir.

Le sport suppose de respecter une progressivité entre l’endurance et le travail spécifique. Comment adapter le carburant donc l’alimentation ?
Pour ma part endurance veut dire basse intensité, ce qui veut dire pulsations cardiaques basses, ce qui veut dire capacité à digérer et donc manger du gras. Et au plus on monte en intensité, au plus le corps a besoin d’aliments hautement digestibles pour avancer. Au-dessus d’une certaine fréquence cardiaque comme sur des séances d’intensité importante, de vitesse ou PMA, nous ne sommes pas censés pouvoir maintenir l’effort plus de 1h30 et donc nos réserves corporelles de sucre sont censées être suffisantes. À ce moment-là le sucre n’est pas forcément utile pendant la séance, mais surtout après pour reconstituer les réserves du foie et des muscles. Le plus dur à gérer est « l’entre deux » où il faut alterner et tester. Avec l’expérience, je trouve que le plus important est d’essayer car chacun a son passé alimentaire et donc sa façon de digérer.

Comment éliminer les sucres rapides, accumulés pendant les fêtes ?
Une semaine de fruits et légumes crus et cuits uniquement avec un peu d’huiles végétales, de moutarde, citron et sel pour l’assaisonnement et des tisanes « detox foie » de qualité et rien d’autre ! Les fruits et légumes apportent l’eau nécessaire à un bon nettoyage. Les fruits apportent un minimum de sucre pour maintenir une activité cérébrale, les légumes, si on les choisit bien, contribuent au nettoyage comme l’artichaut ou le radis noir. Enfin un entraînement à basse intensité permet d’éliminer le gras fabriqué et stocké par l’ingestion des nombreux sucres. Une semaine sans protéines, ne provoque à mon avis aucune carence, l’essentiel des minéraux et vitamines provenant des végétaux.

En quoi consiste la méthode que tu préconises ?
Le but est de nettoyer l’organisme pour qu’il soit le plus efficace possible et qu’il utilise les aliments qu’on lui apporte et non qu’il les stocke ou les élimine. Je pars du principe qu’une machine bien huilée, non encrassée fonctionne à 100%. Elle est donc capable de s’adapter à beaucoup de conditions. Le corps humain, s’il est à son maximum, est vraiment une belle machine, tout comme la nature en général d’ailleurs.

On sait que certains types d’aliments sont bons ou non selon les organismes. Quelle méthode faut-il employer pour les déterminer ?
Un organisme est un tout, avec son passé, ses adaptations, son vécu. Alors oui on peut peut-être pousser les choses jusqu’à déterminer des types, mais aucun n’aura exactement la même vie donc rien ne vaut l’expérience.

Les allergies peuvent-elles évoluer dans le temps ?
C’est vrai que les allergies ont fait un bond énorme ces dernières décennies. Or pour la plupart (si ce n’est pas toutes) il s’agit d’une mauvaise digestion due à une flore intestinale complètement détruite. C’est encore ici une histoire d’alimentation. L’intestin « notre 2ème cerveau », lorsqu’il est en bonne santé, est une véritable barrière au milieu extérieur, ne laissant passer que les nutriments essentiels au bon fonctionnement. Or l’alimentation industrielle par l’introduction des pesticides, de conservateurs, de modifications génétiques (le gluten), mais aussi l’idée que certains aliments sont indispensables à une bonne santé (le lait et les laitages), a complètement détruit cette barrière. Comme un filet plein de trous, elle laisse alors passer de « gros morceaux » non reconnus par l’organisme qui engage un mécanisme de destruction, via le système immunitaire. L’allergie est née. Enrayer une allergie est difficile car elle nécessite un long travail de fond, mais ce n’est en général pas irréversible…

Penses-tu que les pros montrent le bon exemple en terme de diététique ?
Je ne connais pas leur cahier des charges de côté alimentaire donc difficile de se prononcer. Mais le cyclisme est réputé pour pousser les organismes au maximum de leurs possibilités. Les équipes ont connaissance de beaucoup de recherches en la matière et testent énormément. C’est le cas par exemple du régime cétonique. Ils utilisent toutes les choses qui les rendent plus forts, que ce soit la diététique, l’homéopathie, l’énergétique ou autre chose.

Le sport c’est aussi la convivialité. Comment combiner cette alimentation éclairée et le partage d’un bon repas ?
Oui le bien-manger est aussi une histoire de plaisir ! Finalement lorsque le corps marche bien, il est aussi capable de supporter les écarts. Et naturellement, en prenant les bonnes habitudes, on se rend compte que l’on va de plus en plus vers des aliments de qualité en diminuant la quantité. En « décrassant », on retrouve les goûts, on est plus sensible. Un bon fromage, un saucisson, un bon pain comme un bon vin, du chocolat, une « vraie » pizza, plats faits de belle manière par des artisans avec des matières premières de qualité, là est la clé.

Quid de la médecine par les plantes ?
La médecine naturelle, qui ne se cantonne pas seulement à l’utilisation des plantes, est pour moi un très bon support à une bonne alimentation et à une pratique intensive sportive. Vivant avec un ancien athlète professionnel, il est parfois difficile de compenser uniquement par l’alimentation. Car les charges, les heures passées à l’entraînement sont telles que l’organisme a besoin d’aide. Donc plantes, huiles essentielles, homéopathie, toutes les méthodes énergétiques utilisées avec soin et précaution sont un excellent support à la pratique du sport. Le très gros avantage c’est qu’elles ne doperont jamais. Elles vont aider l’organisme à être à son maximum et non aller au-delà comme le fait la chimie.

Si tu devais donner trois bonnes résolutions à suivre aux lecteurs de Vélo 101, ça serait…
Diminuer les sucres rapides, également lors des entraînements. Ne pas bouder le bon gras comme les oléagineux type amandes, noisettes, noix, les avocats, toutes les huiles végétales, et un peu de poissons gras. Et accorder une grosse part à l’endurance, aux entraînements longs à basse intensité.

Crois-tu à une prise de conscience collective de la nécessité d’avoir une alimentation saine et équilibrée ?
Les gens se rendent compte actuellement que quelque chose ne va pas et qu’on nous a entraînés vers une alimentation industrielle poussée à son paroxysme. Mais le problème c’est qu’ils se sont habitués à manger de cette façon. Une anecdote. J’ai des amis qui tiennent une brasserie dans le sud. Un jour, un client a fait un scandale parce que leur milk shake était bien moins bon que chez un grand nom de la restauration rapide. Et oui mes amis font leur milk shake avec du vrai lait, de la glace et des fruits frais ! La prise de conscience et le changement d’alimentation nécessitent un travail important que les gens n’ont pas forcément envie de faire. Pour conclure sur une note optimiste, le milieu du sport est quand même beaucoup plus enclin à faire cet effort !