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Michel Crepel


Michel CREPEL
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MES AMIS !

 

 

Je sais, c'est un peu prématuré ... mais pas tant que cela, voyez vous, mes amis ! Ce sera, sans doute, peut être, allez savoir, l'ultime fois que je vous infligerai cette "punition" annuelle ! Je m'apprête, en effet,  à aller tutoyer, du moins effleurer les sensations ressenties par nombre de mes congénères frondeurs et autres empêcheurs de tourner en rond de l'univers du sport, en général et de la "Petite Reine", en particulier, qui, à un moment ou un autre ont été confrontés à pareil fléau (Cancer). Bien sûr, je pourrai, dans un avenir proche, pourquoi pas, à défaut d'y siéger, saluer la tablée rabelaisienne au bout de laquelle trônerait un Antoine Blondin toujours aussi acerbe que volubile en train de remémorer à ses petits camarades de ripailles que sont "Bob" Chapatte, Michel Audiard, "Dédé" Pousse, René Fallet, Louis Nucera, Alphonse Boudard, Georges Briquet, Jean Carmet, Maurice Biraud, "Gabin" et autres Abel Michéa, Pierre Chany, "Big Léon", Jean Paul Brouchon ... , que du beau linge, la voix teintée de nostalgie le "Pacte de Chiavari" édicté par la "Joconde" à l'attention de "Gino le Pieux" et le "Campionissimo" lors de l'étape de Sestrières du Giro 1949. J'aurai également, le loisir, de papoter à la table voisine, en compagnie des "Parigots" Laurent Fignon et Pascal Jules, toujours aussi complices et gouailleurs, occupés à chambrer copieusement le "Pirate" Marco Pantani accompagné pour l'occasion du premier lauréat de l'Angliru, "El Chava" José Maria Jimenez. Ces derniers, à des lieux de se muer en victimes expiatoires, se refaisant, néanmoins, la cerise en se la jouant "petite bracasse" mais gros fou rire communicatif. Au bar, les fenêtres embuées laisseraient peut être apparaître, au gré des perles et autres traces d'humidité, les silhouettes dégingandées de deux "saute ruisseau" rejouant pour le bonheur de l'assemblée au garde à vous, "La Joute Inachevée" que se livrent, depuis qu'ils se sont retrouvés, le "Roi du Vigorelli", le Stéphanois, Roger Rivière et son condisciple mais néanmoins récurrent adversaire, "Maître Jacques", le Normand, Jacques Anquetil. En toile de fond, un arc en ciel fait oeuvre de kaléidoscope géant d'où emergent des bribes de séquences de la carrière des deux "monstres sacrés", Perjuret, méchoui, Puy de Dôme .... 

 

Le Puy de Dôme, nous y voilà ! "Le peloton qui s'élance de Brive, ce 12 juillet 1964, a des allures de randonnée cyclotouriste en villégiature. Les Pyrénées absorbés, les sans grades hument, avec une certaine délectation, les toutes proches vapeurs de toxines des taxis de Paname. La satisfaction, du devoir accompli, empli de joie et de fierté ces "galériens" trop souvent méconnus. Dieu sait, pourtant, s'ils en ont bavé, les bougres. "Esclaves" invétérés de leaders charismatiques mais machiavéliques, ces besogneux ont oeuvré, sans cesse, dans l'ombre de leurs tortionnaires. La caricature est à peine teinté d'exagération, loin s'en faut. Le travail harassant de fourmi zélée qu'ils ont accompli sans rechigner, le sacrifice inhumain consenti, dont ils ont du faire preuve pour ne pas laisser tout choir au détours d'un lacet,  ont permis à leurs "bourreaux" de se hisser au sommet de la hiérarchie des grands de ce Tour. Pour des émoluments finaux frisant, pour beaucoup, l'obole vespérale des "Culs Bénis" indécrottables, ces "miséreux" du macadam  ont frôlé la correctionnelle, en de maintes occasions, sans jamais n'éprouver le moindre remord ni le plus petit soupçon d'amertume envers leurs "tortionnaires". Alors, oui ils s'abandonnent à leur "fôlatrie" Corrézienne et se laissent griser au son improbable de l' accordéon d'un Jean Ségurel, grand "Chambellan" d'un "Bol d'Or des Monédière", qui rugira bientôt à deux pas d'ici. Bien sûr, ils ont conscience de la présence du volcan impitoyable mais ils subodorent, avec malice et détachement, que les "cadors" préfèreront régler leur différent en petit comité. Il est vrai qu'il est imposant ce gigantesque gâteau d'anniversaire, comme le dépeint à merveille Pierre Chany.  Cela étant, il est indéniable que son ascension est une affaire de "Pit Bull", eux, les "caniches" bien nés et dociles, ne possèdent, en aucun cas, la denture assez acérées pour se mêler à cette joute finale. Ils l'aborderont, donc, avec toute l'humilité qui sied à merveille, à leur modeste mais ô combien coriace talent de baroudeurs. 

 

Le soleil est, maintenant, à son zénith en cet après-midi d'été "meurtrier". La "mort" rôde et s'apprête, envoûtante et insidieuse, à frapper, sans scrupule aucun, l’un des deux protagonistes à la victoire finale. La France entière est en haleine. Un mélange de fièvre et de jouissance s'empare des deux communautés ambivalentes. Un homme politique très en vue, de l'agonisante cinquième république, vouait un véritable culte aux appellations "Noblesse" et «Tiers état ». Ce cliché n'a jamais été aussi présent que ce 12 juin 1964. Les sarcastiques et soucieux, néanmoins, suzerains "Anquetilistes" face aux "rustres" et "paysans" Poulidoristes". Le décor est planté, place aux actes.

Le Puy de Dôme se dresse, maintenant, devant les "sautes ruisseau". Majestueux et fier, l’abrupt piton rocheux ne fera aucune concession aux faibles et aux inopportuns, qu'on se le dise. Hilare et jubilatoire, il énumère les carrières qu'il a brisé, les coups de pompe qu'il a asséné et les "sorcières aux dents vertes" qu'il a distribué sans préjugé des conséquences. Il se donnera, s'abandonnera puis enfin "épousera" le plus à même de le dompter.

Déjà le peloton se trouve scindé en deux groupes. Les ténors, soucieux d'en finir au plus tôt, se sont poster aux avants postes afin d'éviter toutes mauvaises et désagréables surprises. Ce groupe d'une trentaine d'unités, tel un serpentin multicolore, flirte avec les premières rampes de l'"Ogre Bougnat". Ce sont les prémices d'un "carnage" annoncée. La foule dense et bruyante s'ouvre, telle des pétales, devant l'avant garde des "fantassins". Les "généraux", bien calfeutrés, au sein du contingent, se toisent furtivement, et se protègent des élans d'enthousiasme d'un public farceur et primesautier. 

 

L'expression faciale de ces coursiers pourrait s'apparenter à une palette de couleurs, d'un impressionniste anodin, où la peur, l'anxiété, la sérénité, l'angoisse y seraient mêlées. La chaleur a, depuis un moment déjà, oeuvré au détriment de ces "guerriers de l'apocalypse". La sueur, fidèle compagne de juillet, goutte puis ruisselle inexorablement le long de ces corps meurtris. Les maillots détrempés et souillés colle tels une seconde peau. Un désagrément suave, si l'on peut dire, avant la souffrance insoutenable proprement dite. En file indienne, debout sur leurs étriers, les éclaireurs progressent et ouvrent la route. Déjà, "Maître jacques" et "Poupou" ne se lâche pas et moulinent côte à côte. Le démarrage de Julio Jimenez a lieu à l'endroit même où la route se dresse comme un mur à l'embranchement de la montée vers l'observatoire. L'attaque est tranchante, incisive et sa fulgurance a le don de sortir le groupe, en état de somnolence, de sa torpeur. Aussitôt, l'"Aigle de Tolède" lui emboîte la roue arrière en gesticulant comme un damné. Les deux "mouflons Ibères" enivrés par le parfum des cimes, sont dans leur élément et ils le démontrent de fort belle manière. Derrière, le trou est ébauché, c'est la débandade. Le groupe est éparpillé sur tout le flan de la montagne vengeresse. Seuls, Anquetil et Poulidor ne se sont pas, encore, désunis. Ils peuvent même apercevoir les deux voltigeurs hispaniques au détour d'un virage. Derrière les deux belligérants, c'est la curée. Le "Colosse de Mannheim" tente bien un rapproché sur les deux Français mais les quatre vingt kilos, qu'il accuse sur toutes les balances de la planète, sont autant de handicaps rédhibitoires pour entretenir l'espoir d'un retour, quoique. Pendant que le duo Espagnol caracolent et virevoltent en amont de la course, nos deux "Chouchous" s'étalonnent courtoisement. Anquetil, prudent comme à son habitude, se trouve du côté de la paroi rocheuse, Poulidor, moins regardant mais tout aussi prudent, flirte dangereusement avec le précipice. En fait, le Limougeaud s'est octroyé la place que le Normand à bien voulu lui abandonner. 

 

Les deux "faux frères" sont, dorénavant épaule contre épaule, il s'effleure, se touchent, parfois, épisodiquement et imperceptiblement mais jamais ô grand jamais leur regard ne se rencontre. Chacun à son tour tente d'impressionner son compagnon de galère en le devançant d'un boyau à la faveur d'un lacet, par exemple, ou bien en se dressant prestement sur les pédales, mimant une probable et utopique attaque, en pure perte, cependant. Ils se connaissent parfaitement nos deux héros. Certains, et non des moindres, décèleront une once de bluff de la part d'un des deux ou des deux antagonistes lors de ce mano a mano. A scruter les visages décomposés des deux hommes, j'éviterai de souscrire à cette éventualité. A un peu plus d'un kilomètre du sommet, alors que les deux fuyards ont course gagnée, le Normand donne les premiers signes de l'homme qui va céder. Aplati, comme rarement, sur sa monture, le natif de Mont Saint Aignan commence à arpenter la chaussée avec difficulté. Poulidor, lui, poursuit à son rythme. Mètre après mètre l'écart évolue au bénéfice de l'enfant de Saint Léonard de Noblat. Ce dernier n'a nullement attaqué, ni même haussé la cadence à l'inverse Anquetil s'est littéralement liquéfié. Les mètres se sont transformés en hectomètres et le suspens est à son comble. La foule hystérique vocifèrent et gesticulent dans un galimatias sonore assourdissant. Le contraste entre les deux opposants est affligeant car il ne donne aucun signe distinctif sur l'état de fraîcheur des deux Français. En effet, les deux sont dans un état de fatigue très avancée. La défaillance a embrumé, un temps, la vision teinte d'opacité du Normand mais celle ci s'est évaporé avec décence. Le Limougeaud, quant à lui, le regard fixé sur l'horizon d'un énièmes virages laisse apparaître le rictus du "tueur". Les secondes s'égrainent, toutefois, en faveur du coureur de "Tonin". Aura t'il assez de ressources pour poursuivre son chemin de croix et ainsi revêtir le maillot jaune au sommet de l'épouvantable Puy de Dôme ? La France retient son souffle. A l'avant, Julio Jimenez a décramponné aisément son compatriote vieillissant, Frédérico Bahamontès, dans les ultimes kilomètres pour s'en aller cueillir une victoire de prestige devant tous le parterre de favoris. 

 

L'empoignade se poursuit à l'arrière. Poulidor, l'animal blessé, s'arc boute sur sa machine et brûle toutes les dernières cartouches qu'il possède encore en son sein. Cela suffira t'il ? Anquetil, le fier hidalgo, a perdu de sa superbe, l'instinct de survie lui permet de croire encore au miracle. Lui, l'esthète de l'effort solitaire a tout d’une fleur fanée qui ploie sur sa tige pour choir finalement, sans vie. Nos deux « Seigneurs » tels des duellistes, de la gardes des mousquetaires du temps jadis, s’escriment à fleuret non moucheté au paroxysme de l’effort, le coup de grâce comme vecteur commun, le Ko flotte dans l’air pur des monts environnant. L’oreille scotchée au transistor, le regard vissé au téléviseur, le versatile peuple « François » extrapole, fabule, exulte puis frémi, renâcle et soupire. Il trépigne, hurle son admiration ou sa haine. Du jamais vu dans les annales de la course. Enfin, quand Raymond Poulidor apparaît en vue de la ligne, c'est du délire orgiaque de la part de ses fans. Portés comme jamais auparavant, peut être, les dents serrées, la bouche béante il feint un semblant de sourire avant de s'affaler, épuisé, sur le guidon de son vélo. A quelques encablures en aval, Vittorio Adorni, le « Showman », un moment débordé par le rythme effréné des hommes de tête, parvient, dans son style pas très académique mais diablement efficace, à se ressaisir promptement. Apercevant Anquetil en point de mire malgré la foule envahissante, l’ancien confectionneur de macaroni chez Barilla, remonte irrésistiblement, se hisse à la hauteur du Normand et le dépose, là, dans la foulée, sans autre forme de procès. Quand, à son tour, Jacques Anquetil se libère de la marée humaine qui a pris possession de la route, il présente un visage déformé par l'effort, blême comme un linceul immaculée. Il accroche plus qu'il ne franchit la ligne d'arrivée salvatrice sous les encouragements chauds mais distingués de ses inconditionnels et les quolibets "poétiques" de ses détracteurs. 

 

Tout ça pour ça ! Pour quatorze secondes, le futur premier quintuple lauréat du Tour de France, poursuivra sa marche triomphale jusqu'à Paris. En effet, à sa descente de vélo, Anquetil eu cette phrase sibylline mais significative du combat dantesque livré et de l'animosité au caractère irascible qui règne entre les deux hommes : "Si Poulidor m'avait pris le maillot, je rentrais à la maison ce soir !" Quand on songe, pourtant, que le dernier chrono lui aurait sans doute permis de le récupérer, ses mots "violents" assénés dénotent une extrême lassitude physique et mentale. Poulidor, pour sa part, revendiquera une erreur de braquet pour tenter d'expliquer sa stagnation suite à son envolée improductrice. Lorsque "Tonin" lui demande, alors, pourquoi il n'était pas allé reconnaître, comme promis, l'ascension du Puy de Dôme, "Poupou" lui rétorquera, aussitôt, "En effet, je n'ai pas reconnu la montée, mais avant le départ de Rennes je m'y suis rendu, malheureusement, on m'a interdit de monter au dessus du péage ! C'est défendu en temps normal. Alors je ne savais pas exactement ce qui nous attendais !".

 

Un bras de fer, un duel aux couteaux, un combat des chefs, voilà ce que les passionnés demandent et suggèrent à leurs héros. La dramaturgie au comble de l’étourdissement. Les radios reporters de l’époque ont su rendre du relief à l’évènement. A l’époque, ils maîtrisaient, à la perfection, l’art du commentaire. Ils n’omettaient jamais de dépeindre les moindres faits et gestes des acteurs en pleine lumière. Leur élocution sans faille, et leur profonde culture achevaient de les rendre indispensable au drame qui se nouait. Cette page d’anthologie a laissé des traces dans la mémoire collective. Elle éclabousse de son empreinte, malgré le poids des ans, chaque retour du Tour, en ce lieu saint. Citer le Puy de Dôme, à la ronde, et des milliers d’yeux émerveillés vous toiseront et vous répondront à l’unisson, « J’y étais ! » pareil à un remake des grognards de la grande armée impériale. Pourtant, l'affrontement n'a duré que quelques kilomètres, ne s’est déroulé que dans un laps de temps des plus restreint, alors ? Alors, l'atmosphère ambiant associé à deux combattants hors normes a fait le reste, dit on !"

 

 

Soudain, tel un automate, ma main s'égare au sein de la poche de mon blazer et en soustrait une feuille de papier sur laquelle est notée les extraits un  autre récit que j'avais rédigé, de mon vivant, quelques années auparavant et consacré à "Tonin le Taciturne" et au "Roi René" lors de leur Tour 1934. Pourquoi ce récit plutôt qu'un autre ? allez savoir : "... C'est exactement en ces lieux divins qu'un Cannois ombrageux et belliqueux à la pédalée onctueuse, à l'assise parfaite, aux déhanchements de ballerines, en un mot, au style d'une élégance rare, allait forger les premiers exploits d'une légende dont Louis Nucera nous narrera avec brio et passion les grandes lignes dans une œuvre dédiée au méridional. René Vietto, bientôt idole de tout un peuple pour les raids solitaires voir suicidaires qu'il entreprenait et adulé comme rarement dès qu'il côtoya le firmament de la notoriété, fut affublé du pseudonyme significatif de "Roi René".  Ce dernier va bientôt éclabousser de sa classe et de son altruisme le cyclisme de ces années là. Apôtre de la "Joconde", il va jusqu'à l'imiter dans sa façon d'être et de paraître à tel point qu'un jour il se fendit de cette réflexion pour le moins flatteuse à l'égard du Transalpin : " Alfredo Binda est le plus grand de tous. Un styliste incomparable. Il pouvait partir dans une course avec un bol de lait sur le dos. Quand il arrivait le bol était encore plein. Aucun déhanchement. Nulle contorsion. Il ne faisait qu'un avec sa machine. L'élégance. La pureté. Un artiste. La beauté en action sur un vélo." 

Lors de cette étape Aix-les-Bains Grenoble, les coursiers devaient emprunter le Galibier, toit du Tour, toujours appréhendé par la face Nord, la plus ardue, à cette époque. Sous le tunnel qui jouxte le sommet le "lilliputien" Ibère de service, Ezquerra, bascule en tête, bientôt suivi pas René Vietto. Le virevoltant tricolore absorba sa proie dans la descente vers l'Oisans puis l'abandonna à ses trajectoires "olé, olé" pour gagner Grenoble en vainqueur trois minutes devant son compatriote et maillot jaune Antonin Magne et l'Italien Giuseppe Martano, dauphin de ce dernier. Le "Roi René" remit le couvert sans attendre le surlendemain à l'occasion de la neuvième étape Gap Digne.  René Vietto prit son envol dès le col de Vars où il fit montre d'une facilité déconcertante voir insolente. Derrière c'est l'hallali. Tous sont logés à la même enseigne. Le Cannois caracole en tête sans faiblir, bien au contraire, impitoyablement il franchit le col d'Allos dans la foulée nanti de la même détermination et doté de la même impression de facilité. A Gap, il assomme un peu plus la concurrence. Trueba limite la casse à moins de trois minutes tandis que la doublette Magne - Martano débourse la bagatelle de plus de six minutes. Finalement, la chance de ces derniers, si je puis dire, a été de profiter, bien involontairement d'ailleurs, de la crevaison de Vietto lors de la première étape. En effet, cet incident de course rejettera le méridional dans les profondeurs du classement mais surtout il accumulera en la circonstance un retard conséquent et rédhibitoire. Après le triplé de René Le Grevès, sur les routes ensoleillés de l'arrière pays Niçois, le peloton prenait la direction de Cannes. La Turbie ferait office de juge de paix au même titre que les cols de Braus et de Castillon. Ces routes vallonnées et escarpées sont très prisées de notre voltigeur des sommets. Vietto en connaît tous les coins et recoins. Ce sont ses lieux d'entraînement et le public chaleureux et enthousiaste de la région le sait mieux que quiconque. Il est venu en grand nombre encourager le "minot", il ne tombera pas sur un ingrat. A l'instar de ses deux apparitions lors des étapes alpestres, René Vietto écrabouillera la concurrence. Le "Roi René" se présentera au bout de la "Croisette", inondée d'une foule de fanatiques bon enfants et hilares, tel un "conquistador". Ce feu d'artifice, ce panache, cette outrageuse domination n'a, évidemment, pas laissé indifférent journalistes, suiveurs et inconditionnels du vélo de tous poils, à la fois stupéfaits et estomaqués de tant de maturité à un si jeune âge. Toujours est il, que le leader Antonin Magne ne relâche en aucun cas son attention. Son principal soucis étant le représentant Italien, l'Auvergnat s'acheminait, cahin caha, vers les Pyrénées toutes proches, dernier bastion de la rébellion. 

Ces Pyrénées seront le théâtre de ce qui fait que le Tour est une épreuve à nulle autre pareille. La légende est en marche, ce qui va suivre marquera d'une empreinte indélébile tous les acteurs et suiveurs présents. L'étape Perpignan Ax- les-Thermes se déroule idéalement pour "Tonin". Le passage au sommet du Puymorens se passe sans incident notoire et en compagnie de Martano, invariablement vissé à son porte-bagages. Le natif d'Ytrac aborde alors la descente en direction de l'Hospitalet. Soudain, le Français, pour des raisons troubles et inexpliquées, perd le contrôle de sa machine et chute lourdement sur le macadam. Plus de peur que de mal, néanmoins, pour le coureur excepté que la jante en bois de sa roue s'est brisée sur un rocher. Pendant ce temps là, Martano n'a pas demandé son reste et file tel un voleur de grand chemin vers Ax. Vietto est le premier à dépanner son capitaine de route, en pure perte, néanmoins, la roue du méridional n'étant pas doté du même axe, celle-ci refusa de s'emboîter. C'est finalement le Champion du Monde, Speicher, qui mit fin à l'interminable attente en lui cédant sa monture. Aidé de ses compatriotes et après une poursuite impitoyable, Antonin Magne ne déboursera en tout et pour tout que quarante cinq misérables secondes à l'Italien par ailleurs copieusement conspué. Le lendemain, les rescapés de cette 28ème édition prennent la direction de Luchon. La chaleur étouffante qui règne sur ce Tour est toujours présente et pèse sur les organismes déjà passablement entamés. Dans les premiers lacets du col de Port le jeune espoir Renaud prend la poudre d'escampette. A Saint-Girons, son capital temps est de près de trois minutes sur un peloton amorphe toujours groupé. A moins de cent bornes de l'arrivée, dans les rampes abruptes du Portet d'Aspet un contre énergique se dessine à l'arrière. Vignoli, âme damné de Martano, joue les filles de l'air à l'intention de son leader, qui ne pipe mot, toujours scotché à la roue de l'Auvergnat. Au somment du Portet d'Aspet, Renaud bascule seul en tête devant Vignoli dans l'aspiration. Ce dernier précède alors Vietto et Gyssels de plus d'une minute, Martano et Geyet de deux minutes. Magne, accompagné de Lapébie, Vervaecke, Morelli, Maes et Franzil pointe vingt secondes derrière le leader Transalpin. Dans la descente le "Roi René" attend "Tonin le Taciturne" qui se colle à la roue arrière du Cannois. Requinqué Magne laisse filer Vietto à l'avant. La descente se poursuit sans heurt ni malheur. Pourtant, au bas de celle-ci, un nid de poule se présente devant la roue avant de l'Auvergnat comme par enchantement. Sous l'effet du choc violent et assourdissant, la chaîne a littéralement explosé. Non seulement elle a sauté de son support mais, comble de malchance, les maillons la constituant sont inexorablement et définitivement vrillés. Un long silence suit le drame qui se noue. Antonin Magne, le visage décomposé d'où perlent quelques larmes, demeure interdit, prostré le long de la route sur laquelle défilent toujours les retardataires insensibles à la détresse du persécuté. Vietto, qui ne soupçonne, apparemment, pas le moins du monde ce qui se passe à l'arrière, est loin devant. Quant aux autres tricolores, ils évoluent au trente sixième dessous, à des années lumières de la tête de course. Tout est perdu, se dit alors "Tonin". Malheureux, dépité et l'amertume à fleur de peau l'Auvergnat contemple une dernière fois son beau et futile dorénavant maillot jaune. Alors qu'il s'apprêtait à rebrousser chemin, "Tonin" aperçois une silhouette pédestre qui remonte la pente dans sa direction. Le flou s'estompe à mesure que l'homme se rapproche. Soudain, le visage du maillot jaune s'éclaircit, on voit alors poindre une esquisse de sourire puis ses yeux s'embrument de larmes. Le "Roi René", petit bonhomme altruiste et bourré d'un talent naissant, rejoint bientôt son compagnon d'infortune et lui offre gracieusement sa bicyclette. Le conciliabule qui s'ensuivra demeurera leur secret. Toujours est il qu'Antonin Magne accompagné de Roger Lapébie, revenu de l'arrière, se lancera dans une poursuite effrénée et qu'il ne tardera pas, toute hargne dehors, a recoller au groupe de tête sous les yeux incrédules d'un Martano dépité. A l'arrière, le pauvre Vietto, attendant en vain une assistance qui ne viendra que très tardivement, sanglote et pleure, la tête entre ses mains tremblantes, une victoire d'étape à Ax-les-Thermes, qui lui était promise, ainsi qu'une probable troisième place sur le podium à Paris ... "

 

La légende du cyclisme a continuellement bercé mon existence et je pense que c'est dans l'abnégation, le courage, la résistance à la douleur, les tripes plus que le coeur, quatre traits de caractère dont j'ai nombre de fois affublé les "Forçats de la Route" qu'il me faudra aller chercher le droit de poursuivre la route en votre compagnie !

 

 

Emile "Mimile" Arbes, Karl "Carlito" Coudre, Daniel Beillard, Serge "Sergio" Delesalle, JF "Jef" Guiborel, Jean Guy "JG", Hervé "Docteur" Delebarre, Isaac "Papy" Stene, Bruno Stene, Isabelle "Zaza" Ramès, JL "Jubilador" Castel, Laeticia Baschieri, "Momo" Larbi Slimane, Bernard "Derby" Lecoanet, Jean Daniel "JD" Lotovic, Christian Moncassin, François "Fanfan" Perrin, Bertrand Petas, Eric "Ricky" Robin, "Seb" Pecqueur, Guido "Reybroeck" Speier, Stephane "Stef" Toupenet, Xavier Boileau, Christian "Cricri" Berthelet, Fabienne "Fab" Vidau, Bernerd "Nanard" Kimmes (ex-Cyclopedie), Bernard "Nanard" Vaillant, Bruno Barboille, Benoît Bastide, Christian Peru, Claude Moussu, Denis Tissinier, Dim "Ma Poule" Kosek, Eric Follebout, Eric "Rico" Marguerat, Daniel "Danilo" Graziano, Joachim "Jojo" Garreau, José Manuel "Oscar" Freire, JC Durban, Luigi "Bergamasque" Giacobetti, Patrice "Pat" Magin, Michel Glineur, Michel "Mimi" Roth, Nicolas Barattero, Patrick "Pat" Louis, Patrick "Patmouille" Mouillard, Philippe Auberger, Pierre Heroin, Pierre Yves "Nations" Archambault, Rémy "Réminou" Deutsch, Sébastien "Seb" Baudon, Roland Tissier, Stephan Zam, Michel Serres, Bernard "Valverde" Kuip, Marcel Ferran, Stephan Zamy, Max Medina, Stephane "Steph" Echardour, "JP" Martinez, Jean Marie "JM" Bessière, Cedric Lissonet, Renaud "Aristo" de Lidge, Régis "Cannibale" Gregoire, Laurent "Lolo" Teixidor, Jacques "Jacot" Dupont, Christian "Chris" Fontanella, Didier "Didi" Salembier, Christophe Capon, "FX" "Pilou" Beloeil, Serge Masselot, Michel Pelsener, Jean Pierre "JP" Not, Michel Dussun, Franck Steinel, Freddy Maertens, Robert "Bob" Develotte, Bernard "Nanard" Luc, Daniel Berton, Sylvain Karle, Eric Artus, Bernard Mischler, Jean Jacques "JJ" Delmas, La famille Bienfait, Pierre Rosec, Nicolas "Nico" Ozouf, Gérard "Gg" Miard, Michel "Mimi" Badard, Michel Penneteau, Edwige Leconte, Françoise Macel, Bruno "Rando" Langen, Dimiti "Dim" Di Luca, Patrick Carrignon, Alex Baron, Dominique Meuret, "Alex" Moreau, Olivier Blanc, Elie Richaud, Thibault Jolais, Rémi Loriot, Marc Ruwet, Samuel Mesnil. Les pronostiqueurs ..., Igor Beyer, Fabrice Deldongo, "JF" Adamski, Claude "Claudio" Carries, Franck Pastor, Steve Disalvo, Christian "Cricri" Landrain, Georges Maillet, Rémy Faure, Eric Mazare, Chris Albanel, Hervé Maxfly, Jean Marie "JM" Leblond, Sebastien "Seb" Marty, Pascal Delrivière, Frank Serr, Pierre Traversaz, Jean Roland "JR" Laisement, Jean Marc Mayer, François Baben, Michael Berthelot, Alain "Ribaudet" Ribaud, Marc Charpentier, Alain Cormary, Jean Pierre Mathelier, Rémi Duvernes, Henri Richard, Cédric Hugon, David Magentie, René Frederick, Olivier Comment .......... et tous mes amis de « Radio 51 » dont, bien évidemment Daniel « Danilo » Génon … ainsi que l’inénarrable Gary "Tartempion" et tous ceux que j'aurai omis de citer pour cause d'alzheimer précoce et pugnace ainsi que tous les nouveaux avec lesquels je n'ai pas eu le temps de lier connaissance et bien évidemment, Philippe Lesage et Julien Perrot les perpétuels et indéracinables duettistes de ce merveilleux site que je vénère depuis 2001 !

Michel Crepel (micwachow), webmaster de Radio 51, le seul média de la planète consacré à la "Petite Reine", auteur de trois ouvrages, "Ma Légende du Vélo 1, 2 et 3" sans prétention, et journaliste-pigiste à Vélo 101, Vélo Club, Mémoire du Cyclisme, les Actus du Cyclisme, webmaster de feu Cyclopédie et de Cyclisme au Jour le Jour ...... !

 

JE VOUS SALUE et vous adresse tous mes sincères voeux de bonheur pour les longues années à venir et un Joyeux Noel !

 

Michel Crepel

 

 

 

 

 

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il y a 5 ans aujourdh ui pile poil on annoncait a christian berthelet son cancer , le jour meme de ses 60 ans , 5 ans apres il est toujours la a  lire ce qui se passe autour de lui  et  a  rouler , alors certes rien n est jamais pareil pour personne mais je ne peux qu espérer avec tout le monde qu il y a encore en toi suffissament de forces et d energie pour te battre , 

au plaisir de te lire je l espere avec encore plus de verve ,je suis pas sure que tout le monde ait envie de te voir rappliquer de si tot la haut 

 courage pour la suite 

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Moi qui me suis mis au velo sur le tard, que de belle histoires découvertes grâce à toi. Grace aux coureurs bien sur mais aussi a ta manière unique de raconter les raconter, de nous montrer comment ils se sont dépassés.

Rien n'ai jamais écrit et il y a un gros morceau devant toi, c'est bien peu mais je penserai bien à toi, et je suis sur que fera peuve de tempérament : en as-tu manqué une fois ?

Au plaisir de te lire très bientot

bonnes fêtes

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Bonsoir Michel,

   Un grand bonjour du Nord-Sarthe et un amical salut au Maître de la Plume. Je te souhaite courage et bonne fortune dans ton combat. 

  Le vieux Catho que je suis priera pour toi Dimanche matin et demandera à Sainte Thérèse de ne pas t'oublier dans sa distribution de Grâces.

  Mon cher Michel, je te souhaite la plus belle des fêtes de Noël au milieu des tiens et un retour aussi rapide que possible sur le vélo.

                                                                        Bien amicalement à toi

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Bonsoir Mimi,

 

Cette maladie est de moins en moins une fatalité de nos jours. De plus en plus de gens s'en sortent et se portent très bien par la suite. J'en connais un tas dans mon entourage. Il y a d'ailleurs ici des témoignages de forumeurs qui ont vaincu le crabe. Alors pourquoi pas toi. Reste optimiste, c'est déjà la moitié de la guérison.

Le traitement est parfois lourd, alors accroches-toi, garde le moral et fais confiance à la médecine qui a beaucoup progressé dans ce domaine. Je suis certain que tu t'en sortiras.

Bon courage. Et au plaisir de te lire encore pendant de nombreuses années sur "velo101".

Reviens-nous l'an prochain aux pronos car tu me manques comme adversaire coriace.😄

Bonnes fêtes de fin d'année.

Amitiés,

Michel

 

 

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