Elie, que vous inspirait le Tour de France quand vous étiez enfant ?
Quand j’étais gamin, ça me fascinait d’aller au départ des étapes du Tour de France. Je pouvais approcher tous les coureurs avec des yeux grands écarquillés. J’aimais bien aussi tenter de les voir aux arrivées. Je me souviens notamment être allé au départ d’une étape du Tour 2004 à Lamballe. Je venais d’avoir 9 ans. Et je me rappelle avoir demandé un autographe à Sylvain Chavanel. Cette année je dispute le Tour à ses côtés dans le peloton, c’est un monsieur, et c’est un sacré clin d’œil. Je réalise pleinement que je suis passé de l’autre côté de la barrière et c’est plutôt sympa.

Cet autographe qui vous a marqué enfant vous invite-t-il à prêter davantage attention aux sollicitations des fans ?
Bien sûr. Je me dis aujourd’hui qu’il est important de consacrer un peu de temps à ceux qui nous encouragent pour distribuer un peu du rêve qui est le mien. J’ai été un jour à la place des enfants qui sont derrière les barrières et je garde ça en tête.

Vous étiez le premier à ouvrir la route du Tour de France dans le contre-la-montre de Düsseldorf, avez-vous tout de suite réalisé que vous étiez sur le Tour ?
Au moment de me présenter sur la rampe de lancement, ça m’a fait un drôle d’effet. Là je me suis dit : « Je suis dedans ! » C’était vraiment quelque chose, surtout le jour de mon anniversaire, que la foule s’est mise à me chanter. Ça a fait descendre un peu la pression avant le départ mais une fois en course j’ai réalisé que le Tour de France avait commencé et que j’y étais ! J’ai eu des frissons dans les jambes pendant 14 kilomètres, j’ai aussitôt saisi que je disputais une course à part.

Avez-vous soufflé vos 22 ans après le chrono de Düsseldorf ?
Oui… enfin disons que le cuistot avait fait un gâteau en mon honneur mais que nous étions déjà partis nous coucher à cet instant. Du coup nous n’avons pas vu la couleur du gâteau.

Diriez-vous qu’on devient vraiment coureur cycliste le jour où l’on fait le Tour de France ?
Oui et non. Au regard du grand public, c’est sûr, car à ses yeux le Tour est la vitrine du cyclisme. Mais à titre personnel, je ne me sens pas davantage coureur parce que je fais le Tour de France. C’est la plus grande course du monde mais il y a de très grands champions, des coureurs de classiques, qui ne viennent jamais sur le Tour, et ça n’enlève rien à leur classe.

Quel bilan tirez-vous de cette première expérience après les deux premières semaines de course ?
C’est un bilan positif, ce n’est que du bonus que d’être sur le Tour à mon âge. J’ai pu voir ce que c’était et me rendre compte qu’on ne peut pas toujours être au top, et que c’est normal d’avoir une ou deux journées sans. Il ne faut pas que ça tombe les jours où c’est la grosse bagarre, et mentalement il faut être costaud.

Est-ce que cela ressemble à ce que vous imaginiez avant le départ ?
Oui, à peu près. Mais en le faisant on se rend vraiment compte que c’est énorme. Le vivre, c’est vraiment plus impressionnant que de le voir sur le bord de la route. Sur une étape de plaine ça va rouler aussi vite que sur une classique de début de saison, et c’est comme ça tous les jours, tout le monde roule à bloc dans le final. Il y a un niveau vraiment élevé tous les jours et une journée sans ne pardonne pas. En dehors de la course, tout ce qui va autour est surprenant, c’est un ensemble qui fait que c’est beaucoup médiatisé.

Vous courez avec de grands champions, qui ont dû vous faire rêver pendant votre jeunesse, quel sentiment cela procure ?
Ce n’est pas la première fois que je cours avec eux, mais dans la plus grande course du monde, avec les plus grands coureurs c’est quelque chose d’énorme. C’est le meilleur niveau au monde, et en y réfléchissant on se dit qu’il n’y a rien au-dessus.