Franck, ton nom a marqué des années de VTT, peux-tu nous rappeler els grandes lignes de te carrière ? 

J’ai commencé le BMX avec les grands noms que l’on connait tous maintenant, tout petit à l’âge de 6 ans. J’ai été Champion du Monde en ’90. J’ai dû attendre patiemment les années Cadets en ’94 pour rejoindre les copains en Coupe de France. J’ai vite abandonné le BMX. J’ai eu un titre de Champion de France et en Junior de belles saisons ont suivi. A l’arrêt de Sun, je suis passé chez Scott. Bon team et bonne ambiance. Plutôt mitigé, j’ai fait un TOP 10 Coupe du Monde mais ça a été plus dur pour moi. Grosse chute, coma et multiples fractures, je me suis retrouvé sans contrat. C’est là qu’on a découvert la boutique à Toulouse avec les copains et ça m’a donné goût à autre chose et je pense que ça m’a bien servi.

Ensuite, je suis revenu sur l’Enduro grâce à Max qui a été pour moi un vrai fil conducteur et qui m’a beaucoup épaulé. Il m’a remis sur un VTT Enduro en 2004 et j’ai fait les Enduro Séries jusqu’en 2010. A ce moment là, j’avais du mal à gagner ma vie, j’avais de petits salaires, je gagnais un peu d’argent avec les vélos que les marques me donnaient mais il fallait que je fasse attention. Mes parents étaient derrière moi, décès de mon père en 2007, je me suis retrouvé pilier de la famille et je me suis remis en question, je me suis dit qu’il fallait que je pense sérieusement à mon avenir.

J’ai discuté avec pas mal de membres de ma famille qui m’ont soutenu et épaulé et ils m’ont dit il faut que tu montes un magasin de vélos, c’est ta vie, c’est ta passion. J’y croyais moyennement mais en 2010, j’ai ouvert mon commerce tout seul en totale autonomie. J’ai été épaulé par un magasin de Toulouse avec qui on avait 4 ans d’expérience et qui m’a bien aidé pour le lancement.

La suite des choses: la rencontre avec Marine qui avait son papa qui avait un magasin de vélos sur Rodez, qu’on a repris en 2015. Aujourd’hui, on fonctionne avec nos deux petites boutiques spécialisées, aussi bien vélo d route que VTT. On essaie d’y amener beaucoup de techniques, de passion et de connaissances.

As-tu toujours été 100% pilote ou as-tu toujours eu en tête une possible reconversion ?

Non j’ai toujours été 100% pilote, surtout quand j’avais ma famille derrière moi. Je ne gagnais pas énormément mais cela suffisait de 98 à 2003 avec Scott car j’avais un contrat pro. Ensuite avec ma chute, j’ai dû bosser deux saisons dans un magasin. Puis avec Enduro, j’avais des budgets qui me permettaient d’être autonome et de vivre de ma passion donc oui, je  me suis concentré sur mon sport. Même si je ne gagnais pas des sommes astronomiques, je vivais comme un professionnel.

Deux éléments m’ont fait penser à l’avenir et m’ont remis les pieds sur terre : la chute en 2001 avec trois mois alité, cela te fait relativiser, et la perte de mon papa en 2007, qui m’emmenait partout, qui m’a fait faire le tour du monde quand j’étais petit, qui nous a emmené avec Max aux Etats-Unis quand j’avais 10 ans… De 2007 à 2010, j’ai vraiment réfléchi à faire quelque chose de sérieux et à avoir une vraie stabilité.

Aurais-tu aimé bénéficier d’un bilan de compétences ou d’appui de partenaires pour qui tu as roulé ou de la Fédération pour t’aider à construire ta reconversion ?

Oui c’est sur, on aimerait être encadrés après, on est la tête dans le guidon, on rêve tous de vivre comme des vrais pro dans des structures démesurées. Quelques français y arrivent. Cédric Gracia a eu une image et il l’a toujours, à ma connaissance il est le seul, je n’en compte qu’un. En effet, ce serait bien d’être encadré, après dans une équipe chacun a déjà ses responsabilités, ce n’est pas facile d’épauler pour l’après. J’ai du mal à imaginer comment ce serait possible vu tout le travail qu’il y a et le nombre de bénévoles impliqués qui donnent de leur temps. Encore une fois, là où j’ai eu de la chance, c’est que j’avais ma famille qui m’épaulait.

Y a t-il des exemples de reconversion qui te viennent à l’esprit ? On peut penser à Nicolas Vouilloz qui a tenté de lancer sa marque par exemple…

Je vais reparler de Cédric car pour moi, c’est vraiment une référence, un copain et un grand frère car on a grandi ensemble. On habitait pas loin, on s’entrainait ensemble, on roulait ensemble. Pour moi, c’est lui qui a fait vibrer l’image du VTT et qui le fait encore aujourd’hui. C’est quelqu’un que j’admire, comment il gère ses sponsors, comment il gère sa carrière, son image. Ce qu’il a fait pour notre sport, c’est exceptionnel.

Nous t’avons interviewé au Roc d’Azur, on pourrait très bien t’imaginer dans l’organisation ou manager un Team…

Oui, j’aime faire de nouvelles choses, ça me fait clairement vibrer. J’ai monté un magasin, j’en ai repris un autre, ce sont des challenges qui me plaisent. Quand je vois le Team Gravity, cela me plairait, quand je vois Thomas qui a créé sa propre marque, cela me plairait. Après, il faut garder les pieds sur terre, je dois aussi assumer ma responsabilité de papa et de chef de famille. Je fais attention à ce que je fais, j’y vais step by step, doucement mais sûrement mais toujours dans l’optique de grossir et de me développer.

Conseillerais-tu aux jeunes de penser tôt à leur reconversion ?

Oui bien sûr, les études c’est important et il faut vite penser à l’avenir. J’ai eu la chance d’avoir mon papa qui m’avait averti « attention, cela peut vite s’arrêter ».

 

Mathilde Duriez, vélo101