Julian, quel sentiment vous laisse votre 2ème place à Liège-Bastogne-Liège ?
J’aurais préféré gagner… Je suis quand même content de ma condition actuelle. Arriver sur le podium de Liège-Bastogne-Liège pour ma première participation est une belle performance. Dans le dernier kilomètre, j’étais à l’arrière du groupe de tête. Tous les coureurs surveillaient Alejandro Valverde. C’était le grand favori et on savait qu’il était le plus fort. A 400 mètres de la ligne, il est parti pour aller rechercher Moreno. Il y a eu une légère cassure. J’ai été obligé de combler le trou. J’ai donc dû produire un effort important. Après le dernier virage, tous les concurrents étaient à bout de forces. Je me suis un peu accroché avec Rui Costa mais cela ne m’a pas gêné. Alejandro était le plus fort.

Pensez-vous que vous payez votre manque d’expérience ?
Evidemment, Liège-Bastogne-Liège est une course où l’expérience est un facteur très important. Aujourd’hui, j’ai pris le départ pour la première fois. J’ai beaucoup appris. Je suis content de terminer aux avant-postes avec de grands coureurs comme Joaquim Rodriguez ou Alejandro Valverde. Ça me fait plaisir et me motive pour la suite de la saison. Il ne me manque qu’une marche sur le podium pour gagner ! Mon placement aurait pu être meilleur. Je dois continuer à progresser.

A-t-il été facile pour vous de gérer les jours qui ont suivi votre podium à la Flèche Wallonne ?
J’ai plutôt bien géré. J’ai dû répondre à beaucoup de sollicitations mais ça représente également énormément de joie. Après la victoire de Michal Kwiatkowski à l’Amstel Gold Race, toute l’équipe était très motivée pour les deux classiques suivantes. Je me suis bien reposé entre les deux courses.

Le travail effectué aujourd’hui au service de Michal Kwiatkowski a-t-il joué en votre défaveur ?
Je ne pense pas. J’ai fait le travail qui m’avait été confié par l’équipe. Michal a payé les efforts qu’il a faits cette semaine. Il a dû répondre à beaucoup de sollicitations. Remporter l’Amstel Gold Race avec le maillot arc-en-ciel est une grande performance. L’équipe a réalisé une magnifique semaine.

Quand avez-vous compris que vous pourriez jouer votre carte aujourd’hui ?
J’étais très motivé. Nous avons accompli un très beau travail pour être bien positionnés tout au long de la journée. Pour ma part, j’ai été pris dans la chute qui a eu lieu à une quarantaine de kilomètres de l’arrivée. J’ai été forcé de m’arrêter pour resserrer ma roue qui avait été déplacée. J’ai chassé derrière le peloton pendant plusieurs kilomètres. Je suis rentré dans le groupe de tête au sommet de la Redoute. Ensuite, j’ai essayé de récupérer au maximum avant d’aborder la finale. Nous étions bien placés avec Michal Kwiatkowski et Zdenek Stybar. Dans la côte de Saint-Nicolas, j’ai effectué le travail qui était prévu. Je devais aller chercher les attaques. Au sommet, j’ai appris que Michal se sentait moins bien et que je pouvais tenter ma chance au sprint.

Vous avez été informé plus tôt qu’à la Flèche que vous pouviez jouer la gagne. A quoi avez-vous pensé ?
Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour réfléchir. Tout le monde était épuisé. Les derniers kilomètres défilent très vite. L’ensemble des hommes de tête avait mal aux jambes. Je me suis contenté de m’accrocher. Dans la côte de Saint-Nicolas, j’ai dû produire un effort important. C’est seulement à ce moment que j’ai réalisé être le seul coureur de l’équipe encore présent aux avants-postes.

Pour battre un coureur comme Valverde, n’aurait-il pas fallu attaquer plus tôt ?
Oui, bien sûr. Tout le monde se méfie de lui. Il est le coureur le plus costaud pour le moment. Certains ont essayé de déjouer la tactique en attaquant dans la Roche-aux-Faucons ou dans Saint-Nicolas. La finale a été mouvementée.

Êtes-vous conscient que vous avez changé de statut en seulement une semaine ?
Je suis content de ma forme actuelle. J’ai préparé ces courses pour arriver en bonne condition cette semaine. Je me rends compte que le travail paye. C’est une satisfaction et un plaisir de réaliser de bons résultats. Toutefois, je pense que mon statut n’a pas changé énormément. Mes performances m’ont seulement confirmé que je pouvais encore progresser. Je vais continuer à travailler dur pour m’imposer dans le futur.

Ne pensez-vous pas que votre vie a changé en huit jours ?
Non. Elle n’a pas changé. Je vais continuer à accomplir mon travail pour l’équipe. Je suis très content de terminer 2ème de la Flèche Wallonne mais aujourd’hui Michal Kwiatkowki était désigné comme notre leader. Lui aussi a préparé ces courses. Finalement, la situation a été modifiée au dernier moment. Il faut s’adapter aux faits de course. Peut-être qu’un jour, je serai le leader et que je ne pourrai assumer mon rôle. Je continue à travailler comme l’équipe me le demande. Je le fais avec grand plaisir.

Malgré ces belles places d’honneur, vous êtes déçu. Vous considérez-vous comme quelqu’un de perfectionniste ?
J’aime gagner dans tout ce que j’entreprends. Quand je prends le départ d’une course, je veux essayer de la gagner. Je ne peux pas me satisfaire pleinement d’une 2ème place même si je suis très content. Passer aussi près de la victoire est très frustrant.

Que vous a dit Bernard Hinault, qui reste depuis 1980 le dernier vainqueur français de Liège-Bastogne-Liège, sur le podium à l’arrivée ?
J’ai parlé un peu avec lui. Il était très content pour moi. Il m’a conseillé de continuer sur ma lancée et m’a informé que j’étais le seul Français à réaliser d’aussi beaux résultats depuis ceux qu’il a réalisés. Ça m’a fait vraiment plaisir. Je ne dois toutefois pas m’affoler. Le plus dur sera de confirmer. J’espère pouvoir progresser.

Propos recueillis par Pol Loncin à Liège le 26 avril 2015.