La récompense des efforts fournis pendant trois semaines pour atteindre un objectif dans le Tour de France peut parfois s’avérer injuste. Mais Bauke Mollema (Trek-Segafredo) ne s’est pas laissé envahir par ce sentiment le week-end dernier à Paris. Lui qui avait achevé chacune des trois précédentes éditions du Tour dans le Top 10 (6ème en 2013, 10ème en 2014, 7ème en 2015) a dû se contenter d’une 11ème place quand c’est une place sur le podium qui demeurait à sa portée trois jours plus tôt. Des chutes et sorties de route dans la descente glissante du col des Saisies il y a huit jours ont refroidi le grimpeur néerlandais, lui faisant perdre en une journée le bénéfice de tout un Tour. Mais cette expérience juilletiste a contribué à façonner le beau coureur qu’est Bauke Mollema, qui plutôt que de se démobiliser a gardé en tête qu’il y en avait une belle à aller chercher à la sortie du Tour : la Clasica San Sebastian.

La classique du Pays Basque, on le sait, favorise généralement les acteurs du Tour de France, dont on estime à quinze le nombre de jours durant lesquels ils vont pouvoir surfer sur leur forme de juillet. A condition de rester en alerte et de ne pas sombrer trop vite dans la lassitude post-Tour de France. Six des dix coureurs qui précédaient Bauke Mollema au classement général étaient au départ, et ce n’est pas un hasard si deux d’entre eux étaient encore au contact du grimpeur néerlandais dans les moments les plus ardus de la Clasica.

L’épreuve, qui tente depuis deux ans déjà de rafraîchir son tracé en l’adaptant aux exigences des courses modernes, avait adopté avec le Bordako Tontorra une difficulté finale qui n’a pas su s’imposer, produisant plus de polémiques que de spectacle. En lui préférant la montée de Murgil Bidea à 8 kilomètres de l’arrivée, les organisateurs manifestaient leur volonté de tourner la page pour ouvrir un nouveau chapitre. Ce sont 1800 mètres s’élevant presque à la verticale (23 % pour le dernier coup de cul) qui s’annonçaient en guise de tremplin vers la Baie de la Concha. Une portion inédite et suffisamment terrifiante pour réduire les 210 kilomètres préliminaires, avec double ration de Jaizkibel (8 km à 5,8 %) et d’Arkale (2,7 km à 6,3 %), à une excursion quasi pacifique.

Tout juste la première montée de Jaizkibel aura-t-elle marqué un coup d’arrêt pour les six coureurs qui, de bon matin, s’étaient engagés dans une échappée vouée à l’échec à 60 kilomètres de l’arrivée : Loïc Chétout (Cofidis), Jaques Janse Van Rensburg (Dimension Data), Pirmin Lang (IAM Cycling), Moreno Moser (Cannondale-Drapac), Przemyslaw Niemiec (Lampre-Merida) et Jamie Roson (Cajal Rural-Seguros RGA). La suite n’aura été qu’une procession en convoi neutralisé jusqu’au pied de Murgil Bidea. Et une course au placement pour virer au mieux sur la petite route qui allait bientôt serpenter sous les arbres en direction de la bosse.

Le tenant du titre Adam Yates (Orica-BikeExchange), un autre ex prétendant au podium du Tour, qui s’en sera finalement bien sorti avec la 4ème place et le maillot blanc de meilleur jeune, allait être le premier à tenter d’y faire la différence. Mais c’était sans compter la volonté de Joaquim Rodriguez (Team Katusha) de prendre un bain de foule, peut-être le dernier sur ses terres ibériques, lui qui mettra un terme à sa carrière cette année et ignore encore s’il aura l’occasion de courir à nouveau en Espagne. A 9 kilomètres de l’arrivée, le Catalan insistait longuement dans l’interminable montée de Murgil. Avant de voir rentrer in extremis Tony Gallopin (Lotto-Soudal), Alejandro Valverde (Movistar Team) et… Bauke Mollema.

Ce dernier, qui avait permis au trio de rejoindre Purito au sommet entre deux rangs serrés d’aficionados survoltés, n’attendait pas la bascule pour produire un nouvel effort. Au moment où ses compagnons de fugue éprouvaient le besoin de reprendre leur souffle, lui s’engageait à fond dans la section descendante. Et le tour était joué ! Bien qu’en vue de ses poursuivants au retour sur la baie de San Sebastian, où Tony Gallopin allait prendre la 2ème place, il leur résistait vaillamment pour s’en aller gagner sa première classique WorldTour et s’assurer la sortie de juillet qu’il méritait.

Classement :

1. Bauke Mollema (PBS, Trek-Segafredo) les 220,2 km en 5h31’00 » (39,9 km/h)
2. Tony Gallopin (FRA, Lotto-Soudal) à 16 sec.
3. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) m.t.
4. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 22 sec.
5. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) à 34 sec.
6. Gianluca Brambilla (ITA, Etixx-Quick Step) m.t.
7. Simon Yates (GBR, Orica-BikeExchange) m.t.
8. Tom-Jelte Slagter (PBS, Cannondale-Drapac) m.t.
9. Nicolas Roche (IRL, Team Sky) m.t.
10. Dries Devenyns (BEL, IAM Cycling) à 37 sec.