Pour prétendre un jour inscrire son nom au palmarès d’un Grand Tour, quel qu’il soit, il faut avant tout présenter un profil bien particulier, celui de coureur complet. Savoir gravir les ascensions les plus rudes ne suffit pas en effet, quand bien même les étapes de montagne sont supérieures en nombre aux étapes chronométrées. Les différences, quand les grimpeurs se valent, se font sur la force pure, celle que réclame un exercice comme le contre-la-montre individuel. Il n’y en a qu’un cette année au programme du Tour d’Espagne, mais les 46 kilomètres tout plats proposés autour de Peñafiel vont peser lourdement dans la balance alors que trois coureurs se tiennent encore en moins d’une minute au lendemain de la seconde journée de repos. Il faudra une petite heure pour parcourir les 46 bornes du jour. Ce sera une petite heure de vérité.

En Rouge grâce au punch dégagé dans les arrivées en altitude, le Catalan Joaquin Rodriguez (Team Katusha) se sent en mesure de gagner cette Vuelta. Catalogué à ses débuts comme un puncheur, révélé cette année comme un grimpeur constant, celui qui devrait conclure la saison au rang de numéro un mondial pèche toutefois par son inefficacité dans les contre-la-montre. Les chronos sont sa bête noire et le Maillot Rouge, qu’il aura pris soin d’assortir à l’ensemble de sa combinaison aujourd’hui, ne va pas lui donner les ailes que procurent parfois les tuniques de leader. On dispose d’assez peu d’éléments de comparaison vis-à-vis d’un coureur comme Vincenzo Nibali (Liquigas-Doimo), son challenger débiteur de 33 secondes ce matin, mais l’Italien est davantage réputé pour son coup de pédale dans l’exercice solitaire. Les plus entreprenants misent sur une différence proche des trois minutes entre les deux hommes…

Le duel est donc posé, arbitré par l’Espagnol Ezequiel Mosquera (Xacobeo-Galicia), qui lutte pour une place sur le podium. Le contre-la-montre est organisé sur un terrain archi plat par-delà des routes rectilignes exposées au vent, contraire à l’aller, favorable au retour. C’est un exercice pour purs rouleurs et ça commence plutôt mal pour Vincenzo Nibali, victime d’une crevaison de la roue avant dès les premiers kilomètres. L’Italien se range sur la droite, demande à enfourcher son vélo de secours, mais son staff s’emmêle un peu les pinceaux. Tandis qu’on lui descend une machine, le mécanicien change la roue à plat. On perd quelques secondes précieuses dans la panique mais l’Italien repart finalement sur le même vélo et commence à creuser les écarts qui vont faire la différence. Car malgré cet incident, Rodriguez est déjà repoussé.

Vincenzo Nibali repousse Joaquin Rodriguez de 4’17 » quand Ezequiel Mosquera ne lui cède que 18 secondes.

Après 15 kilomètres de course, le porteur du Maillot Rouge concède déjà 1’18 » à son adversaire transalpin. Et il perd du temps de manière constante, plus encore que ce que les prévisions les plus alarmistes avaient annoncé. Au 31ème kilomètre, Rodriguez est déjà repoussé de 2’54 ». Il va lâcher 1’23 » de plus dans les 15 derniers kilomètres pour franchir la ligne d’arrivée en 4’17 » de plus que Vincenzo Nibali ! Le contre-la-montre de Peñafiel aura donc sonné la fin des illusions pour le coureur espagnol, qui cède évidemment son Maillot Rouge à Vincenzo Nibali, 15ème de l’étape aujourd’hui, et rétrograde à la 5ème position du classement général à 3’44 ». Vincenzo Nibali aura donc répondu présent, fidèle à sa réputation de rouleur honorable. Pour autant la victoire finale dans cette Vuelta n’est pas encore acquise, c’eut été trop simple, car Ezequiel Mosquera aura pour sa part impressionné son monde dans ce chrono.

Le Galicien n’est pas non plus un adepte de l’effort solitaire, mais il s’arrache à la route comme il sait si bien le faire en montagne pour faire quasiment jeu égal avec Nibali. A l’arrivée, Mosquera n’abandonne que 18 petites secondes au nouveau leader du classement général. Avec 38 secondes de retard seulement en vue de l’étape de la Bola del Mundo samedi, qui livrera le verdict final, rien n’est joué du tout. D’abord, Ezequiel Mosquera possède autour de lui une équipe bien aussi forte que celle de Vincenzo Nibali. Ensuite, le grimpeur ne rechigne pas à attaquer, il l’a fait à chaque fois que la route s’élevait et le refera inévitablement samedi. Enfin les 20, 12 et 8 secondes de bonification promises au sommet de la Bola del Mundo pourront bénéficier à Mosquera s’il se présente là-haut parmi les trois premiers. On va vivre un final phénoménal !

Il y a Nibali et Mosquera, et puis il y a les autres, ceux qui n’ont pas forcément dit leur dernier mot. Le Slovaque Peter Velits (Team HTC-Columbia) a fait une remontée fulgurante au classement général en réalisant le chrono de sa vie à 52,355 km/h de moyenne. Pénalisé par le vent de face qui s’est levé en fin de journée puis finalement favorisé sur le retour par le fort vent arrière, il réalise les 15 derniers kilomètres à 56,250 km/h et reprend à Fabian Cancellara (Team Saxo Bank), leader jusque-là, 1’50 » en l’espace des 15 derniers kilomètres ! A l’arrivée, Peter Velits signe une extraordinaire performance et remporte la dix-septième étape du Tour d’Espagne, gagnant trois rangs au classement général pour prendre place sur la troisième marche du podium provisoire, à 1’59 » de Vincenzo Nibali mais avec de la marge, 1’44 », sur Frank Schleck, Joaquin Rodriguez et Xavier Tondo, qui se tiennent à égalité au pied du podium.

Demain jeudi, la dix-huitième étape traversera les plaines ventées de la Castille-et-Leon de Valladolid à Salamanque (148,9 km).
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Classement 17ème étape :

1. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) les 46 km en 52’43 »
2. Denis Menchov (RUS, Rabobank) à 12 sec.
3. Fabian Cancellara (SUI, Team Saxo Bank) à 37 sec.
4. Gustav-Erik Larsson (SUE, Team Saxo Bank) à 50 sec.
5. Luis-Leon Sanchez (ESP, Caisse d’Epargne) à 1’03 »
6. Leif Hoste (BEL, Omega Pharma-Lotto) à 1’07 »
7. David Zabriskie (USA, Garmin-Transitions) à 1’10 »
8. Carlos Barredo (ESP, Quick Step) à 1’14 »
9. Philippe Gilbert (BEL, Omega Pharma-Lotto) à 1’24 »
10. David Millar (GBR, Garmin-Transitions) à 1’27 »
Classement complet

Classement général :

1. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) en 71h19’50 »
2. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo Galicia) à 38 sec.
3. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) à 1’59 »
4. Frank Schleck (LUX, Team Saxo Bank) à 3’43 »
5. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 3’44 »
6. Xavier Tondo (ESP, Cervélo TestTeam) m.t.
7. Tom Danielson (USA, Garmin-Transitions) à 3’54 »
8. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) à 4’02 »
9. Carlos Sastre (ESP, Cervélo TestTeam) à 4’12 »
10. Luis-Leon Sanchez (ESP, Caisse d’Epargne) à 5’42 »
Classement complet

Classement par points :

1. Mark Cavendish (GBR, Team HTC-Columbia) 111 pt
2. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) 93 pt
3. Tyler Farrar (USA, Garmin-Transitions) 90 pt
4. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Doimo) 89 pt
5. Philippe Gilbert (BEL, Omega Pharma-Lotto) 75 pt
6. David Moncoutié (FRA, Cofidis) 72 pt
7. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) 72 pt
8. Peter Velits (SVQ, Team HTC-Columbia) 68 pt
9. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) 53 pt
10. Daniele Bennati (ITA, Liquigas-Doimo) 53 pt

Classement de la montagne :

1. David Moncoutié (FRA, Cofidis) 48 pt
2. Serafin Martinez (ESP, Xacobeo-Galicia) 38 pt
3. Luis-Leon Sanchez (ESP, Caisse d’Epargne) 25 pt
4. Gonzalo Rabuñal (ESP, Xacobeo-Galicia) 25 pt
5. Mikel Nieve (ESP, Euskaltel-Euskadi) 21 pt
6. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) 19 pt
7. Ezequiel Mosquera (ESP, Xacobeo-Galicia) 16 pt
8. Carlos Barredo (ESP, Quick Step) 15 pt
9. Niki Terpstra (PBS, Team Milram) 14 pt
10. Xavier Tondo (ESP, Cervélo TestTeam) 11 pt

Classement par équipes :

1. Team Katusha (RUS) en 213h44’51 »
2. Caisse d’Epargne (ESP) à 20 sec.
3. Xacobeo-Galicia (ESP) à 11’45 »
4. Cervélo TestTeam (SUI) à 19’32 »
5. Ag2r La Mondiale (FRA) à 35’07 »
6. Omega Pharma-Lotto (BEL) à 49’25 »
7. Liquigas-Doimo (ITA) à 52’00 »
8. Team HTC-Columbia (USA) à 1h02’07 »
9. FDJ (FRA) à 1h10’08 »
10. Euskaltel-Euskadi (ESP) à 1h11’30 »