Un nouveau vélo qui claque coup sur coup la victoire finale du Tour de Californie puis le podium du Giro, ça ne peut pas tout à fait laisser indifférent. Quand on sait que les coureurs récompensés ont largement participé, avec le champion du monde Philippe Gilbert, à la mise au point du vélo, l’intérêt est encore renforcé. On le sait, le rêve d’Andy Rihs est d’installer en Suisse une industrie du vélo comme l’industrie horlogère a réussi à le faire tout autour de Bienne. A Grenchen, siège de BMC, on s’évertue à développer depuis le début des années 2000 une gamme route. Et avec la coopération étroite du double champion olympique Julien Absalon, désormais une gamme de VTT cross-country et enduro, essentiellement à partir du standard 29 pouces.

Les grandes étapes de cette montée en gamme sont connues par les modèles et/ou les performances des coureurs et des équipes sponsorisées par BMC : alu/carbone pour Phonak à partir de 2002, arrivée du Pro Machine, le premier cadre monocoque carbone en 2006, l’Impec mis au point et produit en Suisse sur une unité de production totalement nouvelle, puis Team Machine avec tige de selle intégrée et pédalier BB 30 et enfin Team Machine mis en lumière à l’occasion de la victoire de Cadel Evans sur le Tour 2011.

C’est dans le cadre paradisiaque du domaine de la Coquillade à Gargas, dans le Luberon, que toute l’équipe BMC a présenté son nouveau Team Machine SLR 01 ACE Technology. L’équipe est multilingue, très internationale, les concepteurs sont jeunes, pratiquants, c’est essentiel et obligatoire pour les retours et le dialogue avec les coureurs pros. Ils sont partis de la page blanche pour optimiser le design, maximiser les plis carbone, faire les calculs de toutes les formes, réaliser des aller-retour avec la fabrication, intervenir sur site et faire tester les premiers prototypes en laboratoire puis sur le terrain au moment où le projet est creusé déjà depuis plus d’un an.

Au total il aura largement fallu plus d’un an et demi de développement avant que ne sorte définitivement le nouveau Team Machine. Les essais avec les pros, du côté de Lugano chez Cadel Evans, et sur les hauteurs de Monaco pour Tejay Van Garderen et Philippe Gilbert, ont vraiment attaqué début 2013.

La nouvelle technologie ACE Technology (pour Accélération, Composite, Evolution) est assez complexe. Il s’agit d’un outil de calcul dédié au design des cadres de vélos avec fourches, tige de selle, permettant de tester un nombre infini de solutions avant de faire les outillages, même si les fibres de carbone permettent beaucoup d’adaptation. Le but est toujours le même : combiner rigidité, équilibre et confort, le tout avec un poids réduit. La coopération s’est faite avec une société fondée par des universitaires qui travaillent sur les outils de simulation. Chose importante, les tailles les plus grandes sont les plus rigides avec un nombre de plis plus importants pour optimiser le comportement du cadre. On retrouve la volonté d’unir ses forces, d’allier les compétences, d’aller de l’avant sur le high-tech, et de faire de la Suisse une grande nation qui entend se donner les moyens d’avoir toujours un temps d’avance (!) dès qu’il s’agit de technologie, de précision, de design ou d’ingénierie.

Le retour des pros a été essentiel, semble-t-il en particulier Cadel Evans, surnommé le « professeur ». Les ingénieurs de BMC sont arrivés vers les trois coureurs avec deux versions : une jaune et une rouge plus rigide, avec une différence de 3 %. Chacun a accepté le jeu du blind test. A l’aveugle, les trois ont adopté la version rouge, celle qui a déjà performé ce mois de mai et celle sur laquelle les autres coureurs vont rouler à compter du Dauphiné et du Tour de Suisse, puis du Tour de France. Les ingénieurs et les coureurs ont joué sur les combinaisons possibles de cadres, de fourches, etc., pour assembler le modèle idéal qui allie à la fois rigidité et confort.

Cadel Evans, exemplaire de gentillesse à l’occasion de sa visite avec Andy Rihs trois jours après l’arrivée du Tour d’Italie à Brescia, l’a souligné : il veut performer sur des courses à étapes et pas seulement sur les vingt secondes d’un sprint. Il prend de l’âge, il vient du VTT où les suspensions sont plus qu’un outil et les pneus bien plus larges, d’où son besoin de confort, d’équilibre et de rigidité bien sûr quand il faut réponde en instantané.

Le gain de poids vis-à-vis de la version précédente est énorme : 14 % gagnés sur une version peinte en taille 54 par exemple. Sur le Giro, le vélo de Cadel Evans était à 6,550 kg avec le pédalier SRM, pédales, porte-bidons, et selle pas spécialement light. Résultat ? 250 grammes de tares rajoutés pour atteindre le 6,8 kg imposé par l’Union Cycliste Internationale.

La météo enfin clémente, tout le staff BMC s’est mis en quatre pour nous permettre d’aller essayer ce nouveau SLR 01 sur les belles routes du Luberon et les environs du Ventoux sur le col de Murs, Gordes, Roussillon. Au total 70 kilomètres pour une prise en main qui souligne le très bon équilibre du vélo, assez facile à rouler, qui répond très bien, et qui évidemment renvoie une impression de légèreté dès la prise en main. Un vélo sur lequel beaucoup de monde va se sentir à l’aise. Bien entendu nous aurons l’occasion de tester de manière plus intense ce nouveau SLR 01, rendez-vous le mercredi 3 juillet pour un test vidéo si la météo veut bien nous le permettre…

Ce nouvel SLR sera disponible début juillet, au moment où les pros seront sur le 100ème Tour de France. Voilà le menu : 6,250 kg pour la version Di2 et 9999 euros, 6,390 kg et 6999 euros pour le Dura-Ace mécanique, 6,550 kg pour la version SRAM Red et 5999 euros, 7,050 kg pour l’Ultegra mécanique et 3999 euros. Enfin, pour le cadre complet, seul 1,350 kg et 3599 euros, autant dire que BMC attend des victoires encore plus marquantes pour développer des versions replica Tour ou pourquoi pas champion du monde.