L’avancée au calendrier du Lombardie, qui anticipe désormais de deux semaines sa date traditionnelle, aurait pu contester à la classique son sobriquet de « classique des feuilles mortes », une image qui illustre d’ordinaire les routes automnales de l’épreuve italienne. Il n’en aura rien été ! Même disputé un dernier samedi de septembre, le Lombardie a su préserver ses couleurs d’automne pour nous offrir un ciel pluvieux, grisâtre, que l’arc-en-ciel de Philippe Gilbert (BMC Racing Team) aurait aimé percer. Vainqueur de la classique deux années de suite en 2009 et 2010, il y a perdu ses marques depuis l’an dernier et la ligne d’arrivée nouvellement dressée dans les rues de Lecco. C’est que le Lombardie aime exploiter de nouvelles pistes et modifier son parcours au gré des envies. Quelques nouveautés sont encore à prévoir sur cette édition.

Au départ de Bergame, où l’on honore ce samedi-même le 70ème anniversaire de Felice Gimondi, le peloton réunit les derniers champions encore en course cette saison. Philippe Gilbert baptise comme il se doit son maillot de champion du monde frappé des couleurs de l’arc-en-ciel. Malheureusement on dit parfois de ce maillot qu’il procure malchance à qui le porte. Ce drôle de syndrome ne s’est pas vérifié pour chacun de ses possesseurs, ce qui est sûr c’est que le bail de Philippe Gilbert avec la tunique irisée ne va pas très bien commencer. La route grasse patine à de nombreux endroits. Ce sera houleux à certains moments, fracassants à d’autres. Le champion du monde fait les frais d’une chute dans la descente du mur de Sormano, avec Alessandro Ballan (BMC Racing Team) et Luca Paolini (Team Katusha). Il est contraint de se retirer. Par précaution plus que par nécessité, mais il ne faudra pas compter sur lui aujourd’hui.

Le mur de Sormano, c’est précisément la nouveauté principale de ce parcours. Réintroduite après cinquante ans d’absence, la difficulté propose des rampes à 25 % à quelques 80 kilomètres de l’arrivée. Son retour sur le tracé du Lombardie ne sera pas sans conséquences. Si le mur de Sormano élimine sur chute Philippe Gilbert, il accélère le processus de sélection au sein du groupe des prétendants à la victoire. La suite est connue de tous. Le final jusqu’à Lecco reprend les routes proposées l’an dernier avec l’incontournable ascension de la Madonna del Ghisallo (8,6 km à 6,2 %) à 46 kilomètres du but et la montée forcément décisive de Villa di Vergano (3,3 km à 7,4 %), à 9,5 kilomètres de l’arrivée à Lecco. C’est sur ce tremplin final que tous les favoris présents en tête de course ont jeté leur dévolu, au moment où la pluie redouble d’intensité.

Sous le déluge, on s’attend bien évidemment à voir gicler un puncheur de la trempe de Joaquim Rodriguez (Team Katusha). Mais on n’imagine pas un instant l’Espagnol capable de réaliser une telle différence. Au moment où le Catalan place son attaque dans les pentes les plus raides, personne ne parvient à accrocher son sillage. Il y a pourtant là des cadors comme Alberto Contador (Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) et Rigoberto Uran (Team Sky), respectivement lauréats cette semaine de Milan-Turin et du Tour du Piémont, mais aucun de ces deux-là ne va réussir à répondre au démarrage de  Joaquim Rodriguez. A la bascule à 9,5 kilomètres de l’arrivée, le champion espagnol a déjà fait la différence. Il ne lui reste plus qu’à virer dans les 6,5 kilomètres de descente puis à accomplir les 3000 mètres de plat jusqu’au Lungo Lario Isonzo. La poursuite ne s’organisant pas dans son dos, Rodriguez s’en va conquérir le Lombardie.

De tous les favoris, Joaquim Rodriguez faisait assurément partie de ceux que l’on attendait le plus, motivé qui plus est par la possibilité de remporter le WorldTour pour la seconde fois de sa carrière après un premier succès il y a deux ans. En 2010, l’Espagnol s’était déjà avéré le plus régulier sur l’ensemble des courses du circuit mondial. Avant le Lombardie, il lui fallait gommer un débours de 9 points sur Bradley Wiggins, absent en Italie ce week-end. Il aura fait mieux que cela en s’adjugeant la dernière classique de la saison. Et le Tour de Pékin, qui clôturera cette saison 2012 dans deux semaines, ne changera rien à la donne. Désormais, c’est acquis, Joaquim Rodriguez finira l’année au poste de numéro un mondial. A Lecco, le lauréat n’est cette fois pas tombé de la dernière pluie. Il précède Samuel Sanchez et Rigoberto Uran.

Classement :

1. Joaquin Rodriguez (ESP, Team Katusha) en 6h36’27 »
2. Samuel Sanchez (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 9 sec.
3. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) m.t.
4. Mauro Santambrogio (ITA, BMC Racing Team) m.t.
5. Sergio-Luis Henao (COL, Team Sky) m.t.
6. Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Sharp) m.t.
7. Bauke Mollema (PBS, Rabobank) m.t.
8. Oliver Zaugg (SUI, RadioShack-Nissan) m.t.
9. Alberto Contador (ESP, Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) m.t.
10. Fredrik Kessiakoff (SUE, Astana) m.t.