Bien que mis en danger hier, sur les routes d’un autre temps du Colle Delle Finestre, Alberto Contador (Tinkoff-Saxo) remporte un nouveau Tour d’Italie, le second après son sacre en 2008. Un soulagement pour l’Espagnol, qui sera passé par tous les états durant les trois semaines de course. La joie d’abord, après une prise de pouvoir dès la 5ème étape à Abetone. Il n’aura pas le temps d’en profiter, puisqu’une sévère chute le lendemain lui rappelle qu’un faux pas est susceptible de tout gâcher. Mais l’Espagnol est un champion, un teigneux. Après quelques jours à panser ses plaies, il remet les pendules à l’heure sur le contre-la-montre de 59,4 kilomètres entre Trévise et Valdobbiadene. A l’issue de ce chrono où il fait étalage de son talent, il repousse déjà Fabio Aru (Astana), son second, de 2’28 ». On se dit alors que le Giro est plié.

C’était sans compter sur une dernière semaine à rebondissements, où, encore une fois, le porteur du maillot rose connaîtra le meilleur comme le pire. Le meilleur d’abord, pour avoir triomphé des assauts de Fabio Aru et de Mikel Landa (Astana) en début de semaine. A Aprica notamment, distancé sur crevaison, il repris le contact avec Aru qui avait pourtant fait rouler son équipe. Mais à l’heure où se profilent les deux dernières étapes de montagne, terribles, Contador commence à montrer des signes de fatigue. Il frôle la correctionnelle hier, victime d’une défaillance dans le Finestre avant de se ressaisir dans la montée vers Sestrières. Le maillot rose s’est fait peur, mais il peut savourer son sacre.

Ce Giro est aussi la confirmation des espoirs que l’Italie place en Fabio Aru. Le jeune Italien aura lui aussi connu des hauts et des bas. Il goûta à son premier maillot rose le temps d’une journée. A la peine en début de dernière semaine, il fit taire les mauvaises langues en s’adjugeant les deux dernières étapes de montagne, avec le panache et la tenacité qu’on lui connaît. Lui aussi appartient à cette classe des champions. Troisième l’an dernier, il gagne une marche sur le podium à Milan. Avant pourquoi pas connaître la plus haute dès l’année prochaine ?

Iljo Keisse et Luke Durbridge matent les sprinteurs dans les rues de Milan.

Ce Giro aura aussi été marqué par la bataille des collectifs. Tinkoff-Saxo contre Astana. C’est sans doute une équipe plus forte qui a manqué à Alberto Contador en cette fin de Giro. Livré à lui-même en haute montagne, cela aurait pu lui coûter cher. C’est tout l’inverse d’Astana, présente autour de Fabio Aru dès que la route s’élevait, avec entre-autres, Mikel Landa, Tanel Kangert et Diego Rosa. Un début de polémique était même lancé quand Astana laissait le poids de la course reposer sur les épaules de Tinkoff-Saxo. C’est de la sorte que les équipiers d’Alberto Contador se sont grillés les ailes, alors qu’ils semblaient si fort au début de Giro.

Avant de monter sur le podium final, il reste une dernière étape à couvrir. 178 kilomètres pour rallier Turin à Milan. L’étape, toute plate, est promise aux sprinteurs. Le début d’étape est d’humeur joviale et détendue. Alberto Contador prend le temps de trinquer avec ses coéquipiers ainsi que son manager, Oleg Tinkoff, qui arbore une coupe de cheveux rose pour l’occasion. La course s’accélère à l’approche du sprint intermédiaire, où Philippe Gilbert (BMC Racing Team) décide de passer à l’offensive pour faire un rapproché au classement par points. Le Belge ne serait-il pas rassasié par ses deux succès d’étapes ? Tout rentre dans l’ordre à l’approche de Milan où un peloton groupé se présente.

A 28 kilomètres de l’arrivée, Iljo Keisse (Etixx-Quick Step) et Luke Durbridge (Orica-GreenEdge) trompent la vigilance des équipes de sprinteurs. Les deux échappés unissent parfaitement leurs efforts pour porter leur avance à 40″ au maximum. La marche du peloton est perturbée par plusieurs crevaisons, notamment des sprinteurs Luka Mezgec (Giant-Alpecin) et Heinrich Haussler (IAM Cycling). Leopold König (Team Sky) est lui aussi contraint de s’arrêter, obligeant son équipe à l’attendre au détriment des intérêts d’Elia Viviani (Team Sky). Avec 3 équipes en moins pour rouler, c’est tout bon pour les deux fuyards. En bon pistard qu’il est, Iljo Keisse se campe dans la roue de son adversaire dans la dernière ligne droite pour le déborder aux 200 mètres et s’offrir la victoire. Arrivé dans le peloton, Alberto Contador peut souffler : il vient de remporter son deuxième Tour d’Italie.

Classement 21 ème étape :

1. Iljo Keisse (BEL, Etixx-Quick Step) en 4h18’37 »
2. Luke Durbridge (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
3. Roger Kluge (ALL, IAM Cycling) à 9 sec.
4. Alexander Porsev (RUS, Team Katusha)m.t.
5. Giacomo Nizzolo (Trek Factory Racing) m.t.
6. Luka Mezgec (SLO, Giant-Alpecin) m.t.
7. Juan-José Lobato (ESP, Movistar Team) m.t.
8. Moreno Hofland (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
9. Davide Appollonio (ITA, Androni-Sidermec) m.t.
10. Elia Favilli (ITA, Southeast) m.t.

Classement général final :

1. Alberto Contador (ESP, Tinkoff-Saxo) en 88h22’25 »
2. Fabio Aru (ITA, Astana) à 1’53 »
3. Mikel Landa (ESP, Astana) à 3’05 »
4. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) à 8’10 »
5. Ryder Hesjedal (CAN, Cannondale-Garmin) à 9’52 »
6. Leopold Konig (TCH, Team Sky) à 10’41 »
7. Steven Kruijswijk (PBS, Team LottoNL-Jumbo) à 10’53 »
8. Damiano Caruso (ITA, BMC Racing Team) à 12’08 »
9. Alexandre Geniez (FRA, FDJ) à 15’51 »
10. Yury Trofimov (Team Katusha) à 16’14 »