« En raison de mauvaises conditions climatiques et de la présence de neige sur la totalité du parcours, la dix-neuvième étape du Giro, Ponte di Legno-Val Martello, est annulée. » C’est par ce communiqué que les organisateurs italiens ont déposé les armes ce matin, vaincus par ce printemps aux relents d’hiver, qui aura décidément pourri la 96ème édition du Giro sans en altérer, heureusement, le résultat désormais quasi final. Certes, l’approche de Bardonèche aura été privée de l’ascension de Sestrières. Certes, le col du Mont Cenis aura été franchi piano par le peloton. Certes, il n’aura pas été permis aux coureurs d’atteindre le sommet du Galibier. Mais le plus fort, et chacun en a définitivement pris conscience hier dans le contre-la-montre ascendant vers Polsa, s’est exprimé. Quelle que soit au fond l’issue de ce Giro.

Car l’issue de la course rose est désormais incertaine. Après les difficultés rencontrées par l’épreuve lors de sa traversée des Alpes le week-end dernier, les organisateurs guettaient soucieusement ce que leur réserverait le ciel dans les Dolomites, par tradition le massif roi du Tour d’Italie. En rapport permanent avec les autorités, les responsables de la course avaient dès hier soir choisi d’apporter des modifications à ce qui devait représenter l’étape-reine de cette édition. Saturés de neige, les deux géants que sont le Gavia (2618 mètres) et le Stelvio (2758 mètres) étaient inabordables. Le plan B prévoyait de leur substituer les ascensions moins aériennes du Passo del Tonale et du Passo Castrin tout en préservant la longue montée finale vers Val Martello (22,4 km à 6,4 %). Mais de la neige en quantité est encore tombée. Et elle s’abat encore à gros flocons dans le Trentin au moment où nous écrivons ces lignes.

Toute la matinée, les organisateurs auront cherché en vain une façon de défier les aléas climatiques, comme ils y étaient parvenus à force de persuasion dimanche vers le Galibier. Cette fois il leur aura fallu se rabattre sur la décision la plus sage en annulant tout bonnement la dix-neuvième étape du Tour d’Italie. La raison a fini par l’emporter et les coureurs dans leur intégralité ont salué la décision responsable des organisateurs. Certains ont même déjà promis de les remercier à la prochaine occasion en leur offrant un grand spectacle. Reste à savoir s’ils pourront tenir parole demain car l’attention se porte à présent sur les routes séparant Silandro des Trois Cimes de Lavaredo. Le Passo Giau est d’ores et déjà fermé et il demeure un risque de neige sur les autres cols, du Passo Costalunga au Passo San Pellegrino, jusqu’à l’arrivée à 2304 mètres.

L’irrécupérable Danilo Di Luca encore contrôlé positif à l’EPO.

La bataille dolomitique pourrait donc tourner court. Et c’est sur un tapis blanc que Vincenzo Nibali (Astana) pourrait être porté sur le trône dimanche à Brescia. Car même si la vingtième étape était tirée des neiges par l’organisation, il en faudra beaucoup pour faire basculer la course demain. Ces conditions dantesques, si elles favoriseront la victoire finale de Vincenzo Nibali, ne permettront en tout cas en rien de crier au vol. Rien à voir cette fois avec le climat délétère de l’édition 1984, lorsque l’étape du Stelvio avait été annulée sans raison valable, avantageant la victoire de Francesco Moser quand tout portait à croire que Laurent Fignon l’aurait fait choir dans cette étape-reine. Cette fois les jeux sont faits ou presque. Les positions sur le podium ne sont pas complètement actées entre Cadel Evans (BMC Racing Team) et Rigoberto Uran (Team Sky), et le duel Majka-Betancur pour le maillot blanc n’a absolument pas rendu son verdict !

On croise les doigts pour que chacun puisse avoir son mot à dire demain. Une faveur qui ne sera plus permise à Danilo Di Luca (Farnese Vini-Selle Italia), dont on a appris ce matin l’expulsion du Giro, un mois tout juste après son retour à la compétition. Privé d’équipe en début de saison, il n’avait dû son retour dans les pelotons qu’à un généreux mécène. On sait aujourd’hui qu’il a été contrôlé positif à l’EPO le lundi 29 avril, hors compétition, au lendemain de sa remarquable rentrée : 10ème à Larciano, 6ème du Tour de Toscane. Suspendu trois mois en 2007 pour son implication dans l’affaire Oil for Drugs, puis interdit de compétition durant deux ans après un double contrôle positif à l’EPO Cera sur le Giro 2009, l’irrécupérable Danilo Di Luca signe à 37 ans son arrêt de mort, lui qui s’était montré ultra remuant ces trois dernières semaines.

Ce matin, les langues se sont déliées au sein de sa formation. « Je suis dévasté, s’est ouvert son directeur sportif Luca Scinto. Je n’ai jamais voulu de Di Luca dans l’équipe et j’ai reçu plusieurs critiques pour n’en avoir pas fait un secret. Nous avons commis l’erreur de répondre à la demande insistante de notre partenaire principal, qui souhaitait que nous accordions notre confiance à un athlète avec lequel il s’était lié d’amitié. Voilà comment cette confiance est aujourd’hui récompensée. » Dès ce matin, l’équipe Farnese Vini-Selle Italia a procédé au licenciement du tricheur en série, engagé contre lui des poursuites civiles en dommages-intérêts, et rappelé que l’Abruzzais ne rentrait pas dans la philosophie de son groupe, obligé encore une fois de l’engager sur l’insistance de son partenaire. Bref, voilà une antépénultième journée de course que le Giro n’est pas prête d’oublier. Un grand coup de froid à quarante-huit heures du point final.

Demain samedi, la vingtième étape doit se tenir entre Silandro et les Trois Cimes de Lavaredo (203 km).

Classement général :

1. Vincenzo Nibali (ITA Astana) en 73h55’58 »
2. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) à 4’02 »
3. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) à 4’12 »
4. Michele Scarponi (ITA, Lampre-Merida) à 5’14 »
5. Przemyslaw Niemiec (POL, Lampre-Merida) à 6’09 »
6. Rafal Majka (POL, Team Saxo-Tinkoff) à 6’45 »
7. Carlos-Alberto Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) à 6’47 »
8. Mauro Santambrogio (ITA, Vini Fantini-Selle Italia) à 7’30 »
9. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) à 8’36 »
10. Samuel Sanchez (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 9’34 »

Classement par points :

1. Mark Cavendish (GBR, Omega Pharma-Quick Step) 113 pt
2. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) 109 pt
3. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) 103 pt
4. Carlos-Alberto Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) 94 pt
5. Mauro Santambrogio (ITA, Vini Fantini-Selle Italia) 89 pt
6. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) 86 pt
7. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) 86 pt
8. Elia Viviani (ITA, Cannondale) 72 pt
9. Maxim Belkov (RUS, Team Katusha) 71 pt
10. Ramunas Navardauskas (LIT, Garmin-Sharp) 65 pt

Classement de la montagne :

1. Stefano Pirazzi (ITA, Bardiani Valvole-CSF Inox) 79 pt
2. Giovanni Visconti (ITA, Movistar Team) 45 pt
3. Jackson Rodriguez (VEN, Androni Giocattoli) 41 pt
4. Carlos-Alberto Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) 32 pt
5. Robinson Chalapud (COL, Colombia) 31 pt
6. Vincenzo Nibali (ITA, Astana) 30 pt
7. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) 18 pt
8. Mauro Santambrogio (ITA, Vini Fantini-Selle Italia) 18 pt
9. Maxim Belkov (RUS, Team Katusha) 18 pt
10. Emanuele Sella (ITA, Androni Giocattoli) 13 pt

Classement des jeunes :

1. Rafal Majka (POL, Team Saxo-Tinkoff) en 74h02’43 »
2. Carlos-Alberto Betancur (COL, Ag2r La Mondiale) à 2 sec.
3. Wilco Kelderman (PBS, Blanco) à 10’18 »
4. Darwin Atapuma (COL, Colombia) à 19’13 »
5. Diego Rosa (ITA, Androni Giocattoli) à 31’37 »
6. Fabio Felline (ITA, Androni Giocattoli) à 1h04’52 »
7. Fabio Aru (ITA, Astana) à 1h14’47 »
8. Jarlinson Pantano (COL, Colombia) à 1h16’07 »
9. Thomas Damuseau (FRA, Argos-Shimano) à 1h23’30 »
10. Salvatore Puccio (ITA, Team Sky) à 1h48’54 »

Classement par équipes :

1. Team Sky (GBR) en 221h35’10 »
2. Blanco (PBS) à 5’49 »
3. Movistar Team (ESP) à 7’01 »
4. Astana (KAZ) à 7’55 »
5. Lampre-Merdia (ITA)  à 9’59 »
6. Ag2r La Mondiale (FRA) à 18’42 »
7. Androni Giocattoli (ITA) à 33’41 »
8. Euskaltel-Euskadi (ESP) à 49’06 »
9. BMC Racing Team (USA) à 56’18 »
10. Team Katusha (RUS) à 58’02 »