Que serait Milan-San Remo sans le Poggio ? Paris-Roubaix sans l’arrivée au vélodrome ? Un Liège-Bastogne-Liège qui bouderait la côte de la Redoute ? Un monument du cyclisme comme le sont ces grandes classiques est empreint de lieux mythiques où repose la légende pour toujours. La tradition, qui n’est pas un vain mot dans notre sport, les a rendus indispensables. Le Mur de Huy, la Tranchée d’Arenberg ou le Cauberg font partie du patrimoine cycliste. Et pourtant rien ne les protège ni ne leur assure leur maintien indéfectible sur le parcours de nos plus belles classiques. Ainsi le Mur de Grammont, le formidable juge de paix du Tour des Flandres depuis une quarantaine d’années, va-t-il tirer sa révérence en 2012. Les organisateurs du Ronde ont adopté un nouveau site d’arrivée, Audenarde en lieu et place de Meerbeke. Le tracé en sera chamboulé.

C’est donc bien plus qu’une simple délocalisation de la ligne d’arrivée. Ce déplacement d’une quarantaine de kilomètres plus à l’ouest entraînera une révolution sur le tracé de la classique bientôt centenaire – ce sera en 2013 –, avec l’adoption d’un parcours que les organisateurs estiment plus dynamique et plus contemporain… Ce nouveau concept rendra décisifs les monts des Ardennes flamandes, avec trois ascensions du Vieux Quarémont et le Paterberg dans les 75 derniers kilomètres, sans oublier le Hoogberg, le Kruisberg et le Koppenberg. En revanche le Tour des Flandres deviendra orphelin l’an prochain du légendaire Mur de Grammont et de ses pentes abominables tournicotant en direction de la chapelle, à 16 kilomètres de l’arrivée. Même sort pour le Bosberg, évidemment. Nul ne sait encore à quoi il faudra s’attendre sur le Tour des Flandres newlook, mais il est certain qu’un sentiment amer régnera sur cette édition.

Ce n’est pourtant pas la première fois que le Tour des Flandres adopte un nouveau tracé. Depuis sa création en 1913, la course a subi de nombreuses métamorphoses. Et pour ses organisateurs, la course doit demeurer vivante et ne pas s’enclaver dans la tradition. La popularité débordante de l’épreuve et les problèmes de sécurité qui en découlent ont aussi pesé au moment d’adopter ce nouveau tracé, qui rendra le déplacement du public moins massif et plus sécurisé. L’idée d’un changement de parcours trottait dans la tête des organisateurs flamands depuis déjà plusieurs mois. Un appel à candidature avait été lancé. Ville d’arrivée depuis 1973, Meerbeke était toujours candidate à la finale du Ronde, mais en compétition avec Renaix et Audenarde. La prestigieuse classique s’établira donc à Audenarde pour six ans au moins, Fabian Cancellara demeurant le dernier coureur à avoir franchi en tête le Mur de Grammont, en avril dernier.