Titouan, quel adjectif emploierais-tu pour qualifier ta saison 2016 ?
Satisfaisante. Je pouvais mieux faire, je n’ai atteint qu’une partie de mes objectifs. J’ambitionnais de remporter les Championnats de France et les Championnats du Monde et ces objectifs n’ont pas été atteints. Néanmoins, je remporte trois manches (La Bresse, Lenzerheide et Mont-Sainte-Anne) et le classement général de la Coupe du Monde Espoirs et je termine sur le podium de toutes les manches (2ème à Albstadt, 3ème à Cairns et à Vallnord). Cet objectif a donc été rempli, mais il arrivait en deuxième rideau puisque j’avais déjà gagné la Coupe du Monde l’an dernier. Je voulais me concentrer sur les grands Championnats. Je ne suis donc satisfait qu’à 60%.

Que t’a-t-il manqué pour atteindre ces deux objectifs ?
Les courses d’un jour sont toujours un peu différentes. Je ne m’étais pas mis de pression supplémentaire même si je m’étais préparé pour cela. Il n’y a pas eu de grands changements dans ma préparation pour ces courses-là. Au Championnat du Monde, j’ai eu un jour sans. Je me sentais bien au départ, puis sur la fin j’ai eu de grosses crampes. Au Championnat de France, je suis passé complètement à côté, sans doute à cause de l’altitude. Mais je n’ai pas d’explications plus précises. Pourtant, tous les voyants étaient au vert. Je pense qu’il y a simplement des jours où ça va et d’autres non. Malheureusement pour moi, les courses que j’avais ciblées se sont déroulées sur des jours où ça allait moins bien.

Tu étais un pari lorsque tu es arrivé chez Scott-Creuse Oxygène-Guéret à la suite d’une longue blessure. Tu repars avec le statut de meilleur Espoir des deux dernières saisons. Quel bilan dresses-tu de ces deux dernières années ?
Il y a eu un très gros changement oui. L’équipe a bien évolué au cours de ces deux années. J’ai suivi et j’ai peut-être contribué à cette évolution. L’équipe et moi avons grandi en même temps. Ça a été très important. Le fait que l’équipe et Scott m’aient suivi personnellement m’a fait prendre conscience des choses et m’a aidé à progresser.

Au regard de ta saison et du parcours de Victor Koretzky, ne regrettes-tu pas d’être resté dans la catégorie Espoir cette année, ce qui t’excluait de la course à la sélection olympique ?
Non, je n’ai eu aucun regret. Comme je le disais, mon objectif, c’étaient les grands Championnats. J’avais décidé de rester chez les Espoirs pour conserver le même format de course. Je n’avais pas envie d’être surclassé. J’ai 22 ans, je préfère franchir les étapes petit à petit et apprendre progressivement. Je ne voulais pas y aller trop brusquement. Je sais maintenant qu’il me reste quatre ans en Elites pour prétendre à la sélection aux Jeux Olympiques de Tokyo. C’est plus que dans un coin de ma tête. C’est l’objectif numéro un que je me fixe pour les quatre prochaines années.

Est-ce dans cette optique que tu as choisi de rejoindre le BMC MTB Racing Team ?
Exactement. Rejoindre un team comme BMC est aussi très important dans le cadre de mon passage dans la catégorie Elites, du fait de leur expérience, de leur professionnalisme. Nous avons beaucoup discuté, ils m’ont beaucoup observé et m’ont donné deux ou trois pistes d’amélioration. Et dans l’optique des Jeux, ça ne peut m’apporter que du positif. Ça me permettra de progresser plus vite de manière à prétendre à la sélection olympique dans les deux ans qui précéderont l’échéance.

Tu passeras dans la catégorie supérieure, tu rejoindras l’un des plus gros teams au monde. Ne crains-tu pas que tout cela fasse beaucoup de changements en une seule année ?
C’est vrai que ça fera beaucoup de changements, mais les occasions d’intégrer un team comme celui-là ne se présentent pas chaque année. J’en ai profité. Et puis finalement, il vaut peut-être mieux avoir deux gros changements sur une année que sur deux années consécutives. Je préfère cette solution. On verra si le changement s’avère trop brutal pour moi, mais je ne pense pas qu’il le sera. Au contraire. Je pense que c’est un passage obligé pour progresser, pour monter dans la hiérarchie mondiale. J’ai hâte d’y être ! Nous nous sommes réunis en stage avec tous les membres de l’équipe pendant deux jours. J’ai pu constater que si la structure était imposante, elle gardait une ambiance presque familiale. Le changement se fera sentir par rapport à Scott-Creuse Oxygène-Guéret, c’est sûr, mais ce ne sera pas non plus le jour et la nuit. De ce côté-là, ce stage m’a rassuré.

En quoi ce stage a-t-il consisté ?
Le rassemblement devait simplement nous permettre de nous rencontrer. Nous en avons profité pour parler de la saison prochaine, et pour fixer le calendrier. On en a profité pour faire les cotes du vélo me concernant. Nous aurons un nouveau rassemblement de dix jours fin février. Il s’agira d’un stage en vélo de route pour rouler collectivement, faire un bout de travail foncier ensemble.

Quel rapport entretiens-tu avec Julien Absalon ?
Nous nous connaissions déjà. Nous nous sommes déjà côtoyés dans le groupe France à l’occasion des Championnats du Monde et des Championnats d’Europe notamment. Sur les Coupes du Monde, voire sur des Coupes de France, nous faisions souvent les reconnaissances ensemble le vendredi ou le samedi. J’aime rouler avec lui. Du fait de son palmarès, c’est quelqu’un d’extraordinaire. Mais je sais aussi qu’il aime rouler avec moi, prendre mes traces en descente par exemple. Nous nous entendons très bien, nous discutons beaucoup. C’est une belle collaboration et ce sera très intéressant de travailler avec lui.

Qu’attends-tu de cette collaboration ?
Qu’il partage un peu de son expérience. Mais je n’oublie pas que nous allons courir dans la même catégorie et qu’il ne pourra pas tout me dire. Sans que lui ne fasse quoi que ce soit, j’apprendrai rien qu’en l’observant. Étudier la manière dont il aborde les courses, voir comment il se prépare la semaine qui précède un grand événement, par exemple.

Comme lui, ta présence sur le sol français se fera-t-elle plus rare ?
Oui. Théoriquement, je ne devrais faire que deux Coupes de France l’an prochain : Marseille et Lons-le-Saunier. Le team préfère se déplacer sur des courses où il y a davantage de points UCI à prendre ou sur des Coupes de Suisse. Je vais donc faire plus de courses à l’étranger, qu’il s’agisse de Coupes de Suisse, de Coupes d’Allemagne ou autres. Il y aura peut-être un petit pincement au cœur de ne plus être sur les Coupes de France. C’est une ambiance que j’ai toujours appréciée. Mais ça me permettra de découvrir autre chose, des courses Hors Catégorie d’un autre niveau. Pour la préparation aux Coupes du Monde, c’est tout aussi bien.

Pour ta première saison chez les Elites, quels objectifs t’es-tu fixés ?
Je ne m’en fixe aucun en terme de résultat. Je pars dans l’inconnu, je ne sais pas comment ça roule, je ne connais pas le niveau qu’il peut y avoir, même si je m’en doute un peu. C’est compliqué de se faire une place chez les Elites. Sur chaque course, je veux simplement donner le maximum. Peut-être qu’en milieu d’année, je serai en mesure de me fixer un objectif. Mais dans un premier temps, il s’agira d’une saison d’apprentissage, de découverte et de progression. Si je peux rentrer dans le Top 15, tant mieux, et rentrer dans le Top 10, ce serait génial. Mais si je n’y rentre pas, je ne serai pas déçu. À l’inverse si je suis dans le Top 20, 25, je travaillerai pour progresser.

En quoi consiste ton programme hivernal ?
Pour le moment, je suis concentré sur la préparation physique générale. Je fais un peu de VTT, mais pas énormément. Juste quelques séances de 2h30-3h. En parallèle je fais un peu de course à pied. Je commence aussi à faire du renforcement musculaire, du gainage. Ensuite, je vais attaquer la préparation foncière avec le vélo de route avec des sorties entre 3 et 6 heures. Je vais terminer ce bloc de foncier avec un stage avec l’équipe de France en février à Calpe. Ensuite, j’attaquerai des exercices spécifiques de force, de puissance, de rythme et les courses arriveront fin mars. Mais je ne vais pas m’emballer pour être prêt tôt dans la saison. La première Coupe du Monde n’aura lieu qu’au mois de mai. Je vais donc y aller progressivement, ne pas trop m’enflammer et ne pas m’inquiéter sur les premières courses de l’année.

Propos recueillis le 30 novembre 2016.