Titouan Carod coupe du monde 2018Titouan Carod | © UCI

Yvan, comment s’annoncent ces championnats du monde?

« On y va avec un état d’esprit conquérant. Je pense que nous avons la capacité d’aller chercher des médailles sur quasiment toutes les courses, mis à part chez les espoirs femmes ou ça sera peut-être plus compliqué du fait que nous sommes sur un renouvellement de génération et que la concurrence est rude. Ca sera la course aux médailles dans toutes les autres épreuves. C’est toujours délicat d’envisager les choses, mais on serait déçu en dessous de trois médailles sur l’ensemble des catégories cross-country. C’est tous les ans un petit peu plus dur d’atteindre les mêmes objectifs que l’année précédente, il y a plus de nations, plus de densité…»

Il y a un beau potentiel dans chaque catégorie, des juniors aux elites. Attendez-vous de certains athlètes qu’ils confirment?

« A La Bresse nous avons fait solde de tout compte sur l’année de coupe du monde. Sur ces championnats, on rentre dans une autre dimension. C’est une course d’un jour, il n’y a que la médaille et le maillot qui comptent, notamment chez les jeunes, et ce sont ces courses là qui révèlent les vrais champions. Il faudra aussi compter avec ceux qui ont pu avoir des trajectoires un peu différentes au cours de l’année, au niveau de la dynamique de forme par exemple. On a commencé très tôt, au mois de mars, en Afrique-du-Sud. Il peut donc y avoir des surprises. Concernant certains couerurs comme Joshua (Dubau) par exemple,  on constate qu’il est monté en pression au cours de la saison. On est optimiste pour une médaille le concernant, je sais qu’il ne rêve que d’une chose: le triplé* avec le maillot de champion du monde. »

Concernant le parcours, savez-vous à quoi vous attendre à Lenzerheide?

« Ca sera technique, avec de la racine. Niveau météo on peut s’attendre à des orages en montagne. Ce sont des circuits qui peuvent réserver des surprises, un peu comme lors de la dernière manche de coupe du monde. J’ai presque envie de croiser les doigts pour qu’il y ait du mauvais temps. On a pu voir à La Bresse les Français remonter dans les classements dès que les circuits ont été rendus techniques, un peu boueux, glissant, « à l’ancienne ». On préfère ça aux circuits un peu trop artificiels, trop roulant ou trop secs. Cette saison il y a eu beaucoup de soleil et aucune course dans la boue au niveau international de toute l’année. Si il y a de l’orage et de la pluie, tant mieux pour nous. Mais même sans cela je crois que c’est un circuit où nous sommes en capacité de faire des différences. » 

« On a pris le temps de parler de la saison durant l’hiver et de la dynamique qu’on souhaitait mettre en place »

Pauline Ferrand Prévot et Jolanda NeffPauline Ferrand Prévot et Jolanda Neff | © UCI

Chez les femmes, Jolanda Neff semble un ton au dessus cette saison. Pensez-vous qu’il est possible de bousculer la hiérarchie ?

« Jolanda (Neff) est dans une très bonne séquence et il faudra bien que ça s’arrête un jour. C’est comme ça pour tout le monde. D’autre part, elle sera chez elle et ultra-favorite. On a pu voir par le passé que c’est quelqu’un qui pouvait craquer sous la pression. De l’autre côté, Pauline (Ferrand-Prévot) monte en régime. Elle a bien préparé son affaire et apprécie vraiment le circuit de Lenzerheide. Elle a fait de ce mondial son objectif de l’année. Pauline (Ferrand-Prévot) nous a déjà montré par le passé qu’elle sait répondre présente le jour J, on est confiant. Avec les Suissesses, elles seront cinq ou six à prétendre à une médaille. On peut s’attendre à une course similaire à celle de La Bresse avec un final plutôt serré. Dans la tête il faudra être fort, avoir de l’expérience, et c’est ce qu’a Pauline (Ferrand-Prévot).

Et du côté des hommes ?

« C’est différent. Derrière Julien (Absalon), il faut retrouver une organisation française, un leader. Aujourd’hui, clairement, notre leader c’est Maxime (Marotte). Sur nos six coureurs, personne n’a déjà fait de médaille individuelle sur un championnat du monde. Il y a donc ce plafond de verre à aller briser. Maxime (Marotte) est prêt, il a le niveau pour le podium. Titouan (Carod) l’a également montré début août à Mont-Saint-Anne (Canada). Maintenant, ça se passe chez les Suisses, il faudra être capable de casser ces barrières et se persuader qu’on peut le faire. »

Croyez-vous que « jouer » à domicile puisse accentuer la pression coté Suisse ?

« Sur le papier ça joue pour eux. On le sait, un Mondial à la maison c’est toujours un avantage. Maintenant, quand il y trop d’attentes ou trop d’envie il peut se passer des choses. Il y aura certainement des failles dans lesquelles il faudra s’engouffrer, mais pas beaucoup. Ce sont nos meilleurs ennemis, on adore les Suisses mais on aimerait bien les battre chez eux. »

Avec l’expérience qui est la votre, pensez-vous qu’on puisse s’attendre à une belle surprise sur ces Mondiaux ?

« Oui, je le pense. Des athlètes comme Titouan (Carod), Maxime (Marotte), Victor (Koretzky) sont des champions, des jeunes qui ont su gagner le jour J dans d’autres catégories, ils ont ça en eux. Ils ne viennent pas pour faire de la figuration, ils veulent être acteur, gagner et montrer leurs qualités. Ça reste dense, beaucoup d’athlètes ont la même envie. Il faudra aussi compter avec ceux qui sont revenus sur le devant de la scène, je pense notamment à Kerschbaumer ou Van Der Poel. Je crois maintenant que c’est un peu plus dur d’aller chercher un podium mondial, les hiérarchies étaient un peu plus établies avant. Je fais confiance aux athlètes français, je sais comment ils se sont préparés. L’année dernière nous étions arrivés en Australie avec une équipe un peu fatiguée, mais cette année on a pris le temps de parler de la saison durant l’hiver et de la dynamique qu’on souhaitait mettre en place. La parenthèse un peu difficile du mois de juillet pour nos elites, en coupe du monde, est peut-être ce qui va nous permettre d’être bien durant ces championnats. Quelque part c’était un peu prévu d’avoir un coup de mou sur juin ou juillet pour après être capable de faire fort sur la fin de saison. J’ai bon espoir que ça paie cette année. » 

Chez les Juniors, quelles sont les chances? 

« Isaure (Medde) s’est bien préparée, elle est dans son tableau de marche. Maintenant on sait qu’il y a une extra-terrestre dans cette catégorie: Laura Stigger. Elle va quasiment aussi vite que les meilleures mondiales du circuit elite. C’est un vrai défi. L’année dernière Loana (Leconte) n’avait pas réussi à la battre. L’objectif avec Isaure (Medde), Justine (Tonso) ou Pasquine (Vandermouten) c’est d’aller chercher une médaille. »

M.L.

Joshua Dubau est déjà champion de France et d’Europe chez les espoirs, ndlr.