Fils de Jean-Pierre Bruni, pionnier et légende du VTT descente en Europe, il est son digne héritier. Alors que son père s’illustre désormais en catégorie master, accumulant les succès et les titres, lui a conclu un mariage avec la toison arc-en-ciel chez les élites. A seulement 25 ans, il apparaît comme le maître incontesté de la discipline, invaincu en championnats du monde depuis trois ans, et désormais suffisamment régulier pour réaliser le prodigieux doublé Mondiaux – Coupe du Monde. Dévalant les pentes, survolant les racines et slalomant entre les pierres, il est un véritable fou du guidon à bord de son Vélo Tout Terrain. Loin des pelotons de la route et des épreuves de durée, lui s’est pleinement engagé dans la vitesse, le risque et la vivacité. Dans un sport avant tout spectaculaire, il a appris à maîtriser les flans des montagnes, les descentes des collines et les sentiers des sous-bois pour s’en jouer, se défaisant avec une facilité déconcertante de chaque obstacle, tel un funambule sur sa machine. Dialoguant avec le danger, misant sur l’audace, il aime valser avec la nature, dompter ses pièges et résister à son imprévisibilité. Aujourd’hui, portrait d’un champion hors normes au sport impressionnant, portrait de Loïc Bruni.Loïc Bruni lors des championnats du monde 2018Loïc Bruni lors des championnats du monde 2018 | © UCI 

Son parcours :

Loïc Bruni a été biberonné au cyclisme, et plus en particulier au VTT descente. Habitué à voir son père braver quotidiennement les pentes escarpées des montagnes azuréennes, il ne tarde pas à enfourcher un vélo et à s’essayer à ses premières cascades. Doté du fabuleux gène paternel, celui de la lecture inimitable des descentes tortueuses, il révèle rapidement ses talents en la matière. Plongé dans un univers empli de succès internationaux, s’inscrivant dans la lignée de ses aînés Nicolas Vouilloz et Fabien Barel, cumulant à eux deux pas moins de neuf sacres mondiaux, le cagnois devient le nouveau prodige de la French Riviera.

Grillant toutes les étapes, grimpant de catégorie en catégorie à une allure effrénée, écœurant systématiquement ses concurrents plus âgés, Loïc Bruni ne tarde pas à étinceler en compétition. En effet, champion de France junior en 2011, il est repéré par l’équipe Lapierre avec laquelle il s’engage dès l’année suivante.

Sous les couleurs de l’équipementier français, il s’affirme alors parmi les grands de la discipline. En effet, à peine majeur, il se hisse déjà au sommet planétaire de la catégorie de jeunes, s’offrant même le luxe de glaner un podium lors de l’étape de Windham en Coupe du Monde élite. Trop fort pour ses conscrits, le maralpin se permet déjà de titiller les grands, et ne met qu’un an de plus à les inquiéter. Multipliant les accessits lors de la Coupe du Monde 2013, il conclut sa première saison en élite par une impressionnante quatrième place au classement général, fort de deux podiums à Val Di Sole et à Léogang. Si la régularité manque quelque peu en 2014, les coups d’éclats de l’azuréen se poursuivent bel et bien. Facile champion de France DH pour la deuxième année consécutive, il glane à nouveau deux nouveaux podiums en Coupe du Monde, confirmant ainsi toutes les promesses placées en lui.

Sensible à l’ambiance familiale régnant dans sa formation, il rempile pour l’année 2015 avec Lapierre, pour la saison de l’accession au sommet de son sport. Quatre fois deuxième en Coupe du Monde, il progresse brillamment au classement général final, seulement barré du titre par l’incroyable Aaron Gwin, intouchable cette année-là. Intouchable, réellement, l’américain ? Pas face à un Loïc Bruni des grands jours. Déchaîné à Vallnord pour les championnats du monde, le cagnois va combiner un run parfait et la malchance de ses adversaires pour remporter avec brio la première victoire élite de sa carrière. Mettant parfaitement à profit ses qualités physiques hors du commun sur le haut de la piste, il époustoufle ensuite par sa lucidité dans les portions techniques pour enchaîner les trajectoires propres et précises. A l’arrivée, c’est avec plus de deux secondes d’avance qu’il déloge le sud-africain Greg Minnaar de la première place, qu’il conserve ensuite définitivement. En ce dimanche 6 septembre, exactement dix ans après le dernier titre de Fabien Barel, la relève française conquiert à nouveau le toit du monde, par l’intermédiaire d’un fabuleux héros, surnommé « Super Bruni ».Loïc Bruni sacré pour la première fois en 2015Loïc Bruni sacré pour la première fois en 2015 | © Wikipédia

L’année 2016 ne connait pas la même réussite, parenthèse de revers dans une carrière de triomphe. Victime d’une chute dans le final de la piste de Lourdes, le maralpin échappe malheureusement à une victoire qui lui tendait les bras, après un début de parcours tonitruant. Mais ce n’est que partie remise pour le français. En effet, deux semaines après cet échec, Loïc Bruni se relève et se joue des forêts tropicales du Queensland. Dévalant avec cran une piste truffée de dangers naturels, il réalise un final magistral en dépassant au chrono l’australien Troy Brosnan, pour enfin s’offrir sa première victoire en Coupe du Monde. Par la suite blessé à la clavicule après une chute à l’entraînement, le cagnois renonce à la conquête de la première place en déclarant forfait pour plusieurs manches, mais revient en force au Mont-Saint-Anne et à Vallnord, où il s’adjuge deux brillantes troisièmes places.

Dévêtit de sa tunique arc-en-ciel par la faute de la malchance, Loïc Bruni ne tarde pas à reprendre son bien. Peu en réussite sur les premières manches de la Coupe du Monde 2017, l’azuréen montre aux mondiaux que si la régularité n’est pas son fort, il est décidément un homme des grands jours, un membre de ce cercle des champions qui savent se surpasser lorsque l’enjeu grandit. De retour sur la piste de Cairns où il avait glané sa première victoire professionnelle l’année passée, le cagnois se montre à nouveau à son aise dans la jungle australienne. Impeccable dans la portion technique et puissant sur les parties physiques, il s’empare alors du meilleur temps final, pour trois dixièmes de secondes devant l’autochtone Michael Hannah. Sacré pour la seconde fois de sa carrière à seulement 23 ans, « Brownie » a transformé les espoirs en révélations, métamorphosant son profil de jeune prometteur en rider fabuleux.

Copie conforme de sa saison 2017, l’année 2018 réserve à Loïc Bruni les mêmes difficultés en Coupe du Monde, mais aussi le même sacre final, lui offrant à nouveau la délicieuse saveur d’un triomphe mondial, et de douze nouveaux mois passés sous le signe de l’arc-en-ciel. En effet, éclipsé par ses compatriotes Amaury Pierron et Loris Vergier lors des premières manches, la faute à une vilaine chute contractée à Losinj, le maralpin monte doucement en puissance pour conquérir au Mont-Saint-Anne son premier succès de l’année sur le championnat international. Prêt à temps pour l’évènement de l’année à Lenzerheide, dans ce format « one shot » de championnats du monde qu’il affectionne, Loïc Bruni éclabousse encore son monde de son talent, écœure ses adversaires de sa maîtrise et réalise une descente idéale pour escalader une troisième fois la marche de la consécration planétaire.

Mais rien n’empêche Loïc Bruni de viser toujours plus haut. Non satisfait d’empiler les couronnes mondiales, l’azuréen réussit en 2019 l’incroyable doublé Coupe du Monde – Championnats du Monde, 12 ans après sa dernière réalisation par l’australien Sam Hill. Ecrasant la concurrence dès la manche d’ouverture de Maribor, il réalise sa première saison pleine, glanant pas moins de 3 victoires et deux secondes places, pour enlever d’un souffle la première place finale, quarante points devant son compatriote Amaury Pierron. Surtout, il réalise à nouveau un époustouflant ride sur la piste du Mont-Saint-Anne lors des mondiaux, repoussant son principal concurrent de la journée, l’australien Troy Brosnan, à plus de 5 dixièmes de secondes, remportant alors pour la troisième fois consécutive la tunique-arc-en-ciel, bien décidé à en faire sa seconde peau.

Son statut aujourd’hui :

Ainsi, non seulement Loïc Bruni possède déjà un glorieux passé en VTT descente, mais son actualité est tout aussi triomphale, et son jeune âge (25 ans) lui promet un avenir florissant. Toutefois, après tant de succès, de sacres et d’exploits, le cagnois va devoir éviter le piège de la lassitude ou trouver des nouveaux défis pour conserver cette rage de vaincre qui caractérise son pilotage. A ce titre, il est extrêmement regrettable que l’épreuve de descente ne figure pas aux Jeux Olympiques, d’autant plus que l’évènement quadriennal est doté d’un grand prestige chez les coureurs de cross-country, unique discipline du VTT y étant représentée. En effet, non seulement Loïc Bruni survole la discipline, mais ses compatriotes Amaury Pierron et Loris Vergier pointent aussi sérieusement le bout de leur nez, pour offrir à la descente française une nouvelle génération dorée, digne du début des années 2000.

Enthousiasmés par le niveau de leurs performances ainsi que par le plaisir ostensible qu’ils prennent sur leur vélo, nous leur souhaitons tout le meilleur pour les saisons futures, espérant continuer d’assister à leurs démonstrations en Coupe du Monde comme aux Mondiaux !

Par Jean-Guillaume Langrognet