Chaque jour, elle œuvre à la crédibilité de notre sport, à l’authenticité des exploits de nos coureurs. Partisante du « plus jamais ça », elle s’attache quotidiennement à éviter toute reproduction, partielle ou intégrale, de l’affaire Festina. Souhaitant rendre l’actualité et l’avenir du cyclisme meilleur que son douloureux passé, elle s’adonne incessamment à rétablir le lien entre les spectateurs et la Petite Reine, que les scandales à répétition ont malheureusement brisé avec fracas. Cherchant à enfouir définitivement une époque où la course se déroulait davantage à l’hôtel que sur la route, où les entourages des équipes se dotaient de douteux personnages, où les montées étaient escaladées à un rythme inhumain, elle poursuit aujourd’hui la tâche de ses prédécesseurs en mettant en œuvre les moyens de redorer le blason éthique de la bicyclette. Pour que les médailles ne s’obtiennent plus dans les tribunaux mais sur les podiums, pour que les meilleurs remplacent les plus chargés au sommet des classements, pour que l’on puisse croire à nouveau aux merveilles physiques des corps des athlètes et non plus aux prouesses chimiques de leur médecin, l’Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD) veille. Portrait de sa présidente, portrait de Dominique Laurent.Dominique LaurentDominique Laurent | © AFLD

Son parcours :

Haute-fonctionnaire, Dominique Laurent en a le parcours universitaire d’excellence. Diplômée de Sciences Po Paris puis membre de la promotion Guernica de 1976 à l’Ecole Nationale d’Administration, où elle y a notamment côtoyé Christian Noyer, aujourd’hui devenu gouverneur de la Banque de France, ainsi que de nombreux futurs conseillers d’Etat, elle a par la suite orienté sa carrière autour de trois pôles dont elle s’est rendue spécialiste : la justice, la santé et le sport. En effet, après des premières années professionnelles passées dans les antres de l’appareil étatique, Dominique Laurent s’est hissée en 1990 à la direction du cabinet de Bruno Durieux, alors ministre délégué à la Santé. Passée à la direction des affaires juridiques de la municipalité de Paris après le remaniement ministériel de 1992. A partir de 1996, elle y a d’ailleurs mis à profit ses compétences en matière de santé au sein d’une mission centrée sur l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris, au sujet des astronomiques dépassements d’honoraires permis parfois par le secteur libéral. Longtemps restée directrice des sports du ministère éponyme entre 2002 et 2008 auprès de l’ancien épéiste Jean-François Lamour, elle a connu sa première fonction de régulation juridique d’une activité en accédant en 2010 au comité de membres du collège de l’Autorité Nationale des Jeux (ARJEL). Parallèlement, elle devient aussi présidente à la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins, renouant ainsi avec le domaine médical.

Placée au sommet de la hiérarchie juridique administrative en tant que conseillère d’Etat, elle y est membre de la section sociale, exerçant de la sorte un poste doté de grandes responsabilités nationales. Faisant également partie du Conseil National de l’Ordre des Sages-Femmes, elle y symbolise son attachement au secteur de la santé, qu’elle n’a jamais quitté des yeux. Enfin, nommée présidente de l’Agence Française de Lutte Antidopage en juillet 2017 sur décret présidentiel, elle y remplace jusqu’à aujourd’hui Bruno Genevois, qui y siégeait depuis 2010.

 L’AFLD :

Enfant de l’affaire Festina et fruit de l’action ministérielle de Marie-Georges Buffet, ministre des Sports au sein du gouvernement Jospin, l’Agence Française de Lutte contre le Dopage a pris progressivement de l’ampleur les années passant. Organisme de référence en lien avec l’Agence Mondiale de Lutte Antidopage pour le contrôle des sportifs de haut-niveau, la récupération du Laboratoire National de dépistage du dopage sous sa tutelle en 2006 a été prépondérante dans l’accroissement de son pouvoir d’action. Durant cette même période, cette Autorité Publique Indépendante (API, disposant donc d’une personnalité juridique à l’inverse d’autres AAI) a également profité du conflit larvé entre l’UCI et ASO pour se voir attribuer la charge des contrôles anti-dopage sur le Tour de France, contribuant par conséquent à son affirmation. Comptant aujourd’hui près de 240 préleveurs vacataires répartis sur l’ensemble du territoire français, elle a mis un point un système de localisation via le logiciel Adams, permettant de localiser sans interruption plus de 500 sportifs de haut-niveau afin de pouvoir effectuer de réguliers contrôles inopinés, quoique axés en priorité sur les individus suscitant des doutes quant à leur propreté médicale. Cette méthode impose toutefois contraintes drastiques pour les sportifs, n’ayant droit qu’à deux manquements avant d’écoper d’une lourde sanction. Grégory Baugé, Jeannie Longo et Yohan Offredo en ont d’ailleurs fait les frais. De même, après une succession de « no-show », Clémence Calvin se retrouve aujourd’hui dans l’œil du cyclone, en ayant écopé le 11 décembre dernier d’une suspension de 4 ans de toute compétition.

Coopérant aujourd’hui avec l’OCLAESP dans la lutte anti-dopage, l’AFLD a permis de mettre en place un système à l’efficacité avérée, permettant de réduire nettement les cas de dopage chez les athlètes tricolores depuis l’entame du XXIe siècle. Si son fonctionnement est extrêmement contraignant pour les sportifs ciblés, elle se présente comme un mal-nécessaire pour assurer la crédibilité éthique de leurs performances. Cependant, en contraste des opérations menées par cette API, il apparait regrettable que ce niveau de surveillance soit loin d’être atteint dans de nombreux pays du monde, laissant subsister sur le sport mondial de larges traces d’une suspicion tenace à son égard. Face à ce laxisme notable de nombreuses nations étrangères, il serait alors à l’UCI de sévir. En excluant la Russie des prochains Jeux Olympiques, le CIO lui a en tout cas montré la voie.

Par Jean-Guillaume Langrognet