Peux-tu nous rappeler les grandes lignes de ta carrière, l’année où tu es passé pro et tes principaux succès ?

Alors, je suis passé pro fin 2009 pour l’équipe BKCP-Powerplus, une équipe de cyclo-cross. A ce moment là, j’étais en fin espoir 1 début espoir 2. J’ai fait 5 ans pro dans cette équipe. Ensuite, j’étais dans une autre équipe belge: Telenet-Fidea.

J’ai fait deux fois Champion du Monde de cyclo-cross, la première fois en 2008 en Junior en Italie à Trévise et en 2010 en République Tchèque. C ‘était devant Peter Sagan au sprint, on est de la même année, de la même génération. D’ailleurs la même année, j’avais fait Vice-champion du Monde en VTT derrière lui. C’était un concurrent en Junior.

Pour la saison route, je m’y suis retrouvé à 19 ans donc assez jeune. Je me suis retrouvé à courir avec des Philippe Gilbert ou des Tom Boonen. Au début, j’essayais juste de bien finir les courses et après sur la fin de carrière, j’arrivais à tenir plus les kilomètres. je n’ai jamais fait de grandes places mais le but c’était d’avoir de l’expérience. Dans les équipes où j’étais, la route ce n’était vraiment pas une priorité. La route servait à se préparer pour le cyclo-cross. Mais moi, j’avais pris goût à la route et je me régalais à faire des échappées. J’ai fait des 10ème place en arrivée en col mais je n’ai jamais eu de victoire d’étape chez les pros.

Avec une fin de carrière vers 24 ans, tu es notre plus jeune « Que sont-ils devenus ». As-tu subi cette fin de carrière ou était-elle prévue ?

C’était fin 2013, mon contrat s’est arrêté. J’ai essayé de passer à la route mais je n’avais pas trouvé d’équipe pro et repasser amateur, cela ne m’intéressait pas forcément. J’ai toujours fait du vélo par plaisir et de la compétition par passion. Quand je suis passé pro, c’est devenu un métier. Je savais que je ne voulais pas faire ça toute ma vie.

J’ai toujours roulé avec des pédales Time et j’avais pensé à une reconversion comme commercial chez Time et cela s’est fait. Mon contrat s’arrêtait au 31 décembre 2013 et dès début janvier j’étais embauché. Il n’y a eu environ que dix jours entre les deux.

En ayant arrêté aussi ta carrière aussi jeune, as-tu quelques regrets ?

Non je ne regrette pas, je me suis régalé sur le vélo et je continue à le faire. Je ne garde que les bons souvenirs. Si début 2014 on m’avait proposé un contrat, j’aurais continué oui, mais c’est comme ça, c’est la vie. J’ai pleins d’autres passions et je m’éclate dans ce que je fais.

Y a t’il une valeur ou une compétence que tu as développée grâce au vélo et que tu retrouves actuellement au quotidien ?

Le vélo et la compétition, c’est un peu l’école de la vie. Cela m’a beaucoup appris et le vélo m’a beaucoup aidé mentalement. Sans le vélo, à l’heure actuelle, je ne travaillerais pas de la même façon. Quand on s’est battu pendant sa carrière, on est beaucoup plus solide dans la vie. Parfois, j’ai des amis qui me disent que je suis fort mentalement, et c’est vrai car quand on arrive sur un Championnat du Monde où on est favori, il y a énormément de pression. J’ai appris à gérer ça et cela me sert beaucoup maintenant dans mon travail.

Justement, d’avoir été cycliste pro, cela te confère t-il une certaine crédibilité vis-à-vis de tes clients chez Time ?

Oui un peu mais au début, quand j’arrivais dans les magasins, je ne disais pas « Bonjour je m’appelle Arnaud Jouffroy, j’ai été Champion du Monde », je suis quelqu’un de humble donc je me contentais d’un « Bonjour, je suis Arnaud, le nouveau commercial Time ». Après, on a appris à se connaitre et on a échangé. Ils se rendaient compte que au niveau commercial j’avais des choses à apprendre mais que je connaissais bien le vélo.

Je continue de rouler et je pense que c’est important car après je peux dire au magasin j’ai essayé tel ou tel produit et je peux vraiment bien en détailler les caractéristiques.

Y a t-il des points communs entre une équipe cycliste et l’équipe Time dans laquelle tu travailles actuellement ?

Oui je suis un peu un équipier maintenant dans l’équipe. En arrivant j’étais le plus jeune, ils ont décidé de renouveler l’équipe et ils ont pris deux autres cyclistes de DN1. Forcément, c’est un plus dans une équipe de commerciaux. Certains commerciaux n’ont jamais fait de vélo mais se mettent à en faire parce qu’ils vendent tel ou tel produit. Nous, c’est l’inverse.

Il y a des cyclistes comme Jean-Philippe Dojwa qui ont eu la même trajectoire que toi, avez-vous l’occasion de vous croiser parfois ?

Oui, on se croise parfois en magasin mais comme on a des secteurs d’activités assez vastes, on se croise plutôt sur les salons où on discute, on échange et c’est bien car on a toujours la passion du vélo et du beau matériel. On est vraiment comme des gamins avec des nouveautés et du matériel à tester, on se régale.

Te verrais-tu travailler pour une marque entrant sur le marché ou avec moins de moyens que Time ?

Moi, le jour où je me suis dit que je devais arrêter, je me suis dit que je voulais aller chez Time, que si j’achetais un vélo, c’était un Time, c’est une marque que j’ai toujours adoré. Si je dois vendre un vélo, c’est parce que je suis convaincu. J’aime bien vendre un bon vélo, un peu prestigieux. Il y a beaucoup de belles marques mais c’est vrai que parfois les nouvelles marques essaient de se caler dans la ligne des grandes marques. Moi, tant que je peux bosser pour une belle marque, j’y reste.

Dans votre équipe, il y a Eric Boyer, qui est consultant, toi qui est aussi sympathique et qui parle facilement, te verrais-tu t’orienter vers les médias ?

Oui, je ne compte pas faire ce métier toute ma vie, j’ai envie d’évoluer. Faire un métier comme Eric, cela me plairait, avec le côté un peu communication et marketing. Tout cela me plairait, y compris l’aspect design. Parfois, je vois un vélo et je prends une photo et je l’envoie et je dis « tiens ça, ça pourrait être sympa ». Il faut s’inspirer des tendances, y compris dans d’autres milieux comme la moto ou la voiture, il faut suivre tout cela.

Un peu comme Fondriest avec sa marque de vélo ou Jalabert dans les médias, as-tu un exemple de reconversion que tu aimerais citer ?

Honnêtement ? Je ne regarde pas trop tout cela, j’essaie de faire mon parcours, je vais piocher un peu partout et je regarde tout ce qui se fait mais là, non, je n’ai pas d’exemple.

Ta reconversion a été plutôt facile, penses-tu qu’un système de formation pour les cyclistes en fin de carrière serait une bonne chose ?

Oui, j’ai déjà eu cette discussion avec la Ligue pro, ce serait bien qu’il y ait une notion de l’après quand on est cycliste pro. Certains coureurs ont du mal à avoir une transition réussie. Pourquoi ne pas imposer un temps de formation obligatoire de une à deux semaines en coupure pour tous les pros ?

 

Mathilde Duriez,vélo101