On a aimé… la tenacité de Damien Monier

C’est la révélation française de ces dix premiers jours de course. Depuis l’entrée dans les Alpes, Damien Monier (Cofidis) nous surprend de jour en jour, comme il doit se surprendre lui-même. Avec son style, toujours à l’arraché, agrippé à ses cocottes, les épaules dodelinantes, il a tenu la dragée haute aux meilleurs grimpeurs de ce Tour. Hier, il a effectué la majorité de l’ascension dans la roue d’Ivan Basso (Liquigas-Doimo), et Lance Armstrong (RadioShack). Son exploit est encore plus remarquable que l’Auvergnat s’est élancé au départ de Rotterdam avec un Tour d’Italie – d’où il a ramené une victoire d’étape – dans les jambes. A y regarder de plus près, son explosion dans les Alpes n’est pas vraiment étonnante. L’an passé, Monier s’était révélé sur les pentes du Grand Colombier au Tour de l’Ain, où il avait terminé 3ème au sommet sur les basques de ses équipiers Rein Taaramae et David Moncoutié. Un mois plus tard, il s’illustrait dans les cols du Tour d’Espagne, en étant souvent le dernier Français a lâché prise du groupe des favoris (déjà!). Neuf mois après cette Vuelta, le scénario semble se répéter, mais cette fois, à un échelon plus élevé dans la hiérarchie. A la sortie des Alpes, Damien Monier est le premier français du classement général – 21ème à 9’48 – et aurait pu s’immiscer encore plus vite au milieu des favoris sans une maudite chute dans la descente de la Madeleine.

On n’a pas aimé… la sinistrose des outsiders

L’âpreté du duel Contador-Schleck ne doit pas cacher le manque d’initiative – ou d’imagination?- des prétendants à la victoire finale ou à un podium sur les Champs-Elysées. Dans chacune de trois étapes  alpestres et en dépit d’un jour de repos, hormis Joaquin Rodriguez (Katusha) vers Avoriaz, aucun coureur n’a pris le risque de partir à l’abordage. Certes le rythme infligé par Navarro et Fuglsang, cerbères respectifs d’Astana et de la Saxo Bank, renvoit toutes tentatives aux oubliettes, une attaque naissante à un état de mort prématuré. Mais, s’ils veulent peser dans la bagarre, ramener autre chose qu’un accessit de ce Tour, les Gesink, Menchov, Basso, Leipheimer, Kreuziger, Van Den Broeck vont devoir, à un moment donné, s’employer pour sortir des roues plutôt que d’y sauter dedans et d’y rester à l’abri. Rendez-vous dans les Pyrénées.

Le chiffre de la semaine… 417 watts

Dans sa chronique quotidienne parue dans le journal Le Monde, Antoine Vayer, l’ancien entraîneur de l’équipe Festina, a déballé, hier, ses calculs de puissance mesurés dans la montée de Morzine-Avoriaz. D’après ses estimations, dans la montée finale vers Avoriaz, les 14 membres du groupe des favroris – Andy Schleck (Saxo Bank), Cadel Evans (BMC), Alberto Contador (Astana) et consorts – ont développé 417 watts pendant 27 minutes d’effort après 4h30 de course. Dans la même montée vers la station alpestre en 1994, le Letton Piotr Ugrumov (Gewiss) avait atteint les 465 watts, mais dans un exercice chronométré de 46,5 km cette fois-ci. En comparaison, dans la montée de Verbier lors du Tour 2009, Alberto Contador était monté à 490 watts pendant les 20 minutes de son numéro en solitaire. Au temps triomphant de l’US Postal, Lance Armstrong gravitait souvent autour des 450 watts en plein effort.

La photo de la semaine… Santambrogio et Evans, unis dans la douleur

La scène a des fausses allures de piéta. Mauro Santambrogio, le gregario réconforte Cadel Evans, le leader, inconsolable après la perte du Maillot Jaune. L’expression des yeux du transalpin en dit long sur la complicité qui lie les deux hommes, en dehors du vélo. Plus que de la compassion, Santambrogio éprouve de la peine pour son ami. Car, même s’ils ne se connaissaient pas il y a un an, les deux hommes sont très proches. C’est sous le maillot de la BMC qu’ils se sont rencontrés et appréciés. Résidants de part et d’autre du lac de Côme, les deux complices s’entraînent ensemble régulièrement. Le fidèle Santambrogio, ultra-catholique – il avoue dédier une quinzaine de minutes à la prière la vielle des courses et porte deux crucifix autour du cou –  doit maintenant épauler son leader jusqu’à une prochaine rédemption.