Denis, pouvez-vous d’abord nous rappeler les grandes lignes de votre carrière ?

Je suis passé pro en fin 1983, dans l’équipe Cop Andwed, puis Renault, Subaru … Ma meilleure performance a sûrement été ma victoire d’étape sur le Tour d’Espagne. J’ai également terminé 10ème du Tour d’Espagne 1990 et du Tour de France 1988.

Vous êtes resté pro jusqu’en quelle année ?

Jusqu’à fin 1992, j’ai donc fait 9 saisons. A la suite de cela, j’avais préparé en amont mon brevet d’entraineur et je me suis fait embaucher par la fédération Canadienne pour les 4 ans avant les JO d’Atlanta.

Vous avez préparé ce diplôme à quel moment ?

J’ai passé mon BE1 en 1987 et mon BE2, je l’ai fait par correspondance en 1989. Quand je me suis fait embaucher par le Canada, j’ai aussi passé le brevet Canadien.

A la fin de votre saison 1992, vous aviez d’autres propositions ou vous avez arrêté par peur de faire l’année de trop ?

En fait, j’ai passé une dernière année spéciale dans l’équipe Subaru. On passait une majeure partie de l’année sans courir en Europe et il y avait moins d’équipes que maintenant et du coup, avec des soucis familiaux en plus, j’ai décidé d’arrêter. A l’époque, beaucoup arrêtaient à 32 ans et c’est aussi ce que j’ai fais.

Denis Roux 1Denis Roux 1 | © Le site du cyclisme

Aller au Canada, c’est eux qui vous ont démarchés ?

Oui, c’est eux. J’ai eu un entretien avec eux là-bas et ça c’est bien déroulé, j’ai dit « banco » et on tente l’aventure Canadienne. J’étais alors entraineur national et responsable des entraineurs pour les JO d’Atlanta, j’y suis resté jusqu’en 1996. Ensuite, j’ai eu Roger Legeay qui m’a contacté pour m’embaucher dans son équipe GAN. J’avais déjà travaillé pour eux et j’y suis arrivé fin 1996, j’ai fait les dernières courses et je me suis adapté à mon retour chez les pros.

Le cyclisme avait changé ?

Oui, en 4 ans énormément, c’était énorme. Il a fallu s’adapter, on perd vite le fil et la réadaptation se refait vite. Je connaissais les types, j’étais tourné également vers les jeunes, avec ceux-là il n’y avait pas de soucis, avec les anciens, il fallait s’adapter un peu car les méthodes étaient différentes.

Vous avez suivi l’aventure Crédit Agricole jusqu’au bout, comment s’est fait la transition avec Roger Legeay ?

J’étais entraineur et DS, je m’occupais du planning de course, on a fait l’enchainement entre les deux et on a enchainé les saisons au fil des années, comme Roger faisait moins de course, j’ai doucement pris le rôle de DS et puis responsable de l’équipe quand j’étais au Tour d’Italie et de nombreuses autres épreuves aussi !

Denis Roux 3Denis Roux 3 | © Var Matin

Et depuis ce stade, quelles ont été les étapes ?

Depuis fin 2007, j’ai décidé de changer de vie donc j’ai démissionné de manière amicale et j’ai décidé de partir faire le Tour du monde avec la famille. On a acheté un camping-car et nous sommes partis durant 7 ans et demi pour un long périple, on s’est posé une année aux Seychelles, 7 mois au Mexique et le retour s’est fait il y a trois ans et par l’intermédiaire d’une amie d’ASO, j’ai été en contact avec Krys et je suis venu faire relations publiques, pilote avec eux.

Ça veut dire que c’est une occupation du mois de juillet, le reste du temps c’est quoi ?

Le reste du temps, je suis agent immobilier dans le sud de la France. Ma femme a monté son agence et du coup on a décidé d’aborder l’immobilier d’une autre façon, on travaille sur mandat de recherche. Donc on recherche des clients. J’habite dans la région Toulonnaise et ça marche bien. On a eu des Suédois mais ce sont principalement des Parisiens ou des Lyonnais qui cherchent à s’installer dans le sud.

Si vous deviez à travers votre carrière, retenir des valeurs qui vous sont restées ?

La méthode et l’organisation, j’ai toujours été comme ça, même durant notre voyage, tout était organisé, on gardait l’aventure mais avec 3 enfants, il fallait cadrer. Je me sers un peu de ça et dans l’immobilier, je m’occupe de mes clients et je ne lâche pas.

De tous les coureurs que vous avez côtoyés, est-ce qu’il y a des modèles de reconversion que vous mettriez en évidence ?

Un coureur qui a été leader, a une reconversion orientée vers la communication et la notoriété, comparé au nom qu’il y a derrière. Des coureurs de second nom comme moi, avec un bon niveau mais plutôt lieutenant ont plus une orientation vers la direction sportive, la communication, on voit que ça sur le Tour de France et c’est une orientation plus facile. Enfin, certains coureurs ont décidé de repartir à leur métier initial. Donc je n’ai pas un modèle en tête, j’ai plein de copains qui ont réussi, d’autres non. Chacun essaie de se prendre en main. Plein de coureurs ont fait une bonne carrière en se donnant à 100%.

Denis Roux 2Denis Roux 2 | © DNA

Vous auriez aimé avec un programme de formation afin d’être chapoté lors de voter reconversion ?

Le problème quand on est en activité, c’est que c’est un peu difficile, les saisons sont longues et la coupure est courte et est nécessaire. On y reste aussi concentré. C’est vrai que c’est difficile. Quand j’ai fait mon BE2 par correspondance, c’était difficile car on n’est pas toujours à bloc dans sa formation.

Aujourd’hui, l’environnement des coureurs pro, vous auriez aimé le connaitre ?

Je préfère le cyclisme de mon époque. Peut-être pas au niveau de la rémunération, on gagnait moins à l’époque mais malgré tout, on avait une façon de courir différente, il y avait les oreillettes. J’étais content de les avoir quand j’étais DS et aujourd’hui on a plus le choix que de les avoir donc on ne reviendra jamais en arrière là-dessus, pour la sécurité c’est indispensable. Et enfin toutes les histoires ont fait que j’étais encore dans les bonnes années du vélo.

Aujourd’hui, les coureurs évoluent dans la médiatisation, vous auriez aimé avoir ce rôle-là à gérer ?

On se rend compte qu’aujourd’hui ce sont les leaders qui sont mis en avant, les capitaines de route sont reconnus par les dirigeants et non par le grand public. Les réseaux aident à se mettre en avant et favorisent les infos à tout va, il y a de tout et il faut toujours rester attentif.

L’expérience Nord-Américaine vous a apporté beaucoup dans votre carrière ?

C’était une superbe expérience et je pense que ça m’a beaucoup apporté avant mon retour dans une équipe pro. J’aurais fait mon retour sans à ça, j’aurais eu des manques sur ma vision, ma façon de voir les choses. Le fait de revenir dans le niveau amateur et féminin m’a ouvert les yeux sur un cyclisme que j’avais oublié. Le niveau amateur avait beaucoup évolué et ça m’a ouvert l’esprit sur une vision plus globale. Le fait d’avoir vécu à l’étranger, je communiquais d’une autre façon, avec les Australiens, les Américains ou les Anglais, c’était plus facile que si j’étais resté franco-français.