Jérémy, à 22 ans et après l’accession chez les pros de Bryan Nauleau, tu occupes dorénavant le rôle de capitaine de l’équipe Vendée U. Comment l’appréhendes-tu ?
Je n’y ai pas trop pensé durant l’hiver. Je me suis préparé comme d’habitude avec l’objectif d’arriver le plus en forme possible. Nous sommes avant tout un groupe au sein duquel chacun a sa chance. Ceux qui marchent bien ont leur opportunité. Il faut bien nuancer mon rôle. Je ne me considère pas comme un leader mais bien comme un capitaine de route. C’est à moi, le plus ancien, d’inculquer l’esprit du Vendée U, de guider mes coéquipiers et de faire le relais en course des directives des DS. Nous serons plusieurs dans l’équipe à tenir ce rôle avec Julien Morice et Romain Cardis. C’est un rôle qui me tient à cœur car j’aime partager, échanger, en particulier avec les Espoirs 1.

Le groupe a partiellement évolué durant l’hiver, avec cinq nouveaux venus sur un effectif de quatorze coureurs…
Et nous avons eu un peu de mal à trouver nos marques au début de l’année, ça s’est ressenti du côté des résultats, n’ayant rien gagné au Circuit des Plages Vendéennes contrairement à ce que nous réalisons d’habitude. Désormais je pense que nous sommes sur la bonne voie, nous arrivons bien à courir ensemble. On l’a vu sur la Coupe de France sur laquelle nous nous sommes montrés omniprésents, avec cinq gars dans les trente à l’arrivée. Nous avons montré que nous étions là, ne reste plus qu’à finaliser pour rivaliser avec une équipe comme l’Armée de Terre, qui a été plus performante ces deux dernières semaines. Nous sommes assez confiants. Nous avons prouvé l’année dernière que nous étions capables de renverser la vapeur. Nous allons continuer à bien travailler en ce sens.

Qu’a-t-il manqué au groupe pour obtenir les résultats auxquels il nous avait habitués en tout début de saison ?
Nous avons eu du mal à se trouver en début d’année. J’ai connu ces dernières saisons les belles années du Vendée U, avec des piliers, des hommes forts. En ce début d’année, aucun leader ne s’est démarqué physiquement. C’est aussi pourquoi les DS m’ont confié ce rôle de capitaine, sans que je sois physiquement au-dessus du groupe. Il est parfois difficile de savoir qui est le plus fort en course. Ce sont parfois les nouveaux mais ils n’osent pas forcément le dire. Nous nous sommes des fois retrouvés à cinq devant sans savoir profiter de notre surnombre. C’est ce qui nous a coûté plusieurs victoires dès le début de l’année.

Sans compter qu’il vous a manqué un coureur rapide en ce début de saison ?
Le Team U Nantes-Atlantique s’est avéré très performant. Il a des hommes rapides que nous n’avons pas forcément, entre Thomas Boudat qui est concentré sur la piste, Romain Cardis qui a eu un problème de genou, Lucas Destang qui n’était pas là… Nous avons souvent été en infériorité au départ des courses. Sans sprinteur on court différemment, c’est plus dur. Il faut réussir à débrider la course. Et ensuite ça se joue parfois à rien, comme aux Courses au Soleil. Jeudi dernier à La Chapelle-Hermier il ne nous a pas manqué grand-chose mais nous sommes tombés sur un grand Kévin Lalouette qui a fait foirer nos plans. Il nous manque de petits automatismes pour être excellents, mais nous ne nous inquiétons pas. On sait que les choses vont se caler et on attend la suite avec impatience.

Tu sors de plusieurs saisons incomplètes, à quoi l’attribues-tu et comment travailles-tu pour y remédier ?
Je souffre d’allergies au pollen depuis que je suis tout petit et ça s’intensifie d’une année sur l’autre. Ça commence à me gêner mi-avril puis je deviens quasiment inexistant jusqu’en août, le temps de reprendre l’entraînement. Une saison de vélo avec trois mois importants en moins, c’est difficile. Avec Hubert Long, le médecin du Team Europcar, nous avons mis en place une désensibilisation au pollen cet hiver. Ça devrait me permettre de mieux appréhender la partie de l’année où le pollen va vraiment être en quantité. J’espère que cette fois ça va fonctionner pour que je puisse emmener l’équipe le plus loin possible et que chacun arrive à remporter une victoire.

Le maître-mot chez Vendée U reste le collectif. Comment parvient-on à conjuguer cela avec ses ambitions personnelles, et notamment celles de rejoindre les pros ?
C’est cela qui s’est passé en ce début de saison. Tout le monde voulait être l’homme fort, ce qui a donné lieu à un groupe avec des individualités alors que logiquement ce sont des individualités qui forment un groupe. C’est une grosse nuance. Jean-René Bernaudeau dit souvent : « il faut donner beaucoup pour espérer recevoir un petit peu ». L’an dernier, j’en ai gagné qu’une, mais une grosse à Manche-Atlantique, grâce à Bryan Nauleau qui m’a renvoyé l’ascenseur. C’est pour des moments comme cela qu’on aime se sacrifier pour les autres. Au final, ce n’est pas non plus celui qui sera le mieux placé au classement FFC qui passera pro à la fin de l’année. Notre avantage, c’est qu’on court dans le même groupe qu’Europcar, qui connaît la valeur de chaque coureur, son envie et les sacrifices qu’il a consentis pour un leader. Ça permet à tout le monde d’avoir sa chance.

La force du Vendée U, c’est aussi qu’une partie de l’équipe vit aux Essarts, dans le mythique manoir. Comment y est la vie ?
J’y ai vécu deux ans après le bac. Je suis ensuite rentré faire ma licence chez moi à Caen avant de m’installer cette année à Nantes. Au manoir, on sent vraiment toute la valeur du Vendée U et du Team Europcar. Là-bas, nous y sommes vraiment tous ensemble. On mange le midi avec les mécanos et le staff. C’est un bon moyen d’évoluer avec un outil de travail qui permet à tout le monde de se regrouper. Nous n’avons pas besoin de louer un gîte comme les autres équipes, nous avons tout sur place au manoir. Maintenant que j’habite à Nantes j’y retourne souvent avant les courses. Ça permet de rouler en groupe car il y a toujours du monde, parfois des pros. Ça permet d’en faire beaucoup plus, c’est pourquoi nous nous retrouvons ensuite plus facilement en course. C’est ce qui fait la force collective du groupe.

De ton côté, quelle échéance t’es-tu fixé pour passer pro ?
J’ai fini mes études de commerce l’année dernière et je me consacre à 100 % au vélo depuis un an. J’ai surtout envie de finir sur une année durant laquelle je me serai vraiment fait plaisir. Une année sans regret. Ce n’était pas le cas l’an passé, je ne pouvais pas m’arrêter là-dessus, ayant eu trop d’arrêts dans la saison. Je veux finir avec une année pleine de vélo, ce que je n’ai jamais réussi à faire. Le moment est peut-être enfin venu. On verra alors si ça passe pour rejoindre les pros. J’espère vraiment que ça passera pour être à nouveau à la présentation de l’équipe l’an prochain… mais avec un maillot vert.

Propos recueillis à Mouilleron-le-Captif le 25 février 2014.