Cyril, allons droit au but : imaginez-vous un Français revêtir le maillot arc-en-ciel dimanche à Florence ?
Clairement, je dis oui. Je trouve que l’équipe élaborée par Bernard Bourreau, de par sa composition mais surtout par les derniers résultats des coureurs qui représentent l’équipe de France, apporte des gages de confiance. L’équipe de France aborde cette année les Championnats du Monde avec un capital-confiance relativement élevé. Et c’est un atout pour aller à la victoire. Ce qu’il faut aussi noter, c’est que tous les coureurs de l’équipe de France vont avoir un rôle d’outsiders, ce qui est bien plus facile à assumer qu’un rôle de leader ou de vainqueur potentiel. Nous avons bon nombre de coureurs qui ont les qualités pour gagner. La configuration est idéale, je suis vraiment confiant pour eux.

Les neuf coureurs retenus sont Bardet, Barguil, Gautier, Moinard, Pinot, Riblon, Roux, Vichot et Voeckler. Comment jugez-vous cette sélection ?
Je trouve que cette sélection 2013 est un bon cru. Elle incarne la jeunesse, ce qui laisse présager de belles choses pour l’avenir, mais elle se distingue surtout par le nombre de coureurs qui pour moi sont capables de créer la surprise. Chacun des neuf sélectionnés peut à un moment ou l’autre approcher la victoire. C’est pourquoi j’ai confiance en cette équipe de France. Nous n’arrivons pas avec un leader qui, s’il n’est pas bien, nous fait passer à côté, mais avec plein d’outsiders capables de tirer leur épingle du jeu. Des jeunes et deux beaux capitaines de route, Thomas Voeckler et Christophe Riblon, qui sont des assises de sérénité pour l’équipe. Le tout cadré par une main de maître, celle de Bernard Bourreau.

Bernard Bourreau, justement, a été nommé sélectionneur de l’équipe de France le 31 juillet, après avoir dirigé les Juniors et les Espoirs pendant de longues années. Que pensez-vous de ce choix ?
C’est un expert qui connaît toutes les qualités et les faiblesses des coureurs pour les avoir tous eus en sélections Juniors. Ça va être une force pour nous car Bernard les connaît depuis très longtemps. Il a une vraie relation avec les coureurs qu’il a au sein de son équipe. Il les suit depuis la sortie des Cadets, les a drivés en Juniors, en a emmenés certains aux Championnats du Monde, les a conduits à la victoire… Il connaît mieux que quiconque tous les coureurs français qui sont dans le peloton professionnel. Il en mesure les qualités et les faiblesses, et il va pouvoir mettre tout cela en forme.

Que va-t-il apporter aux Bleus ?
Tout. D’abord sa sérénité. Il connaît l’exercice de sélectionneur. Ensuite je pense que tous les coureurs ont confiance en lui pour l’avoir connu chez les Juniors. C’est quelqu’un qui leur a permis de continuer de grandir et un jour de passer professionnel. De par son passé de coureur, Laurent Jalabert apportait le respect du champion ! La confiance qu’ils ont en Bernard Bourreau va aussi les désinhiber devant l’enjeu. Le message qu’il peut leur faire passer, c’est « allez-y, vous êtes jeunes, faites-vous plaisir ». C’est pour beaucoup le premier Mondial pro… et pas le dernier ! Les coureurs vont prendre le départ de cette course en toute confiance. C’est ce qu’il peut leur apporter de mieux. Après, il a son expérience des championnats. Un Championnat du Monde, il faut y faire le moins d’efforts possible tout en restant aux avant-postes. C’est à celui qui fera l’ultime effort au bon moment qui saura peut-être aller gagner le titre.

Beaucoup de jeunes intègrent la sélection nationale cette année. Est-ce un pari sur l’avenir ou doit-on pouvoir compter sur eux dès dimanche ?
Il y a des deux. Si Bernard Bourreau les a sélectionnés cette année, on va pouvoir compter sur eux dès dimanche. Ils ont cette capacité à jouer les premiers rôles et créer la surprise. Dans le même temps, ils commencent à écrire la suite de cette équipe de France. Toutes les courses que les coureurs peuvent faire à ce niveau international, c’est de l’expérience hyper importante pour la suite de leur carrière.

Vous l’évoquiez, l’équipe de France est composée d’outsiders plutôt que d’un leader. Quelle doit être sa tactique dans quarante-huit heures ?
A mon avis, on ne doit pas courir avec un leader unique. C’est un risque qu’il ne faut pas prendre. L’an passé c’était différent car Thomas Voeckler était le seul qui pouvait nous mener à la victoire. Il fait 7ème, il était dans le final. Cette année, au vu du profil du circuit et de l’équipe, on a plusieurs opportunités. La course va être très dure mais on peut envisager beaucoup de choses. L’équipe est jeune, il faut la laisser s’exprimer avec instinct. Des Barguil, Riblon, Vichot, Voeckler sont des coureurs qui savent gagner en toutes circonstances. On a une génération de gagneurs, alors ne nous bridons pas dans un schéma tactique qui limiterait tout le monde. On peut imaginer beaucoup de scénarios, ne nous figeons pas dans une stratégie telles que beaucoup d’équipes en auront… Et de toute façon tous les ans il n’y a qu’un sélectionneur qui peut se vanter d’avoir fait la sélection parfaite : c’est celui qui ramène le maillot !

Cette génération de gagneurs est aussi muée par l’envie et la fierté de porter le maillot de l’équipe de France. N’est-ce pas l’héritage de Laurent Jalabert, qui a su redonner du prestige à une sélection nationale ?
Je pense que Laurent Jalabert a apporté énormément à l’équipe de France quand il est arrivé aux commandes. C’est quelqu’un de disponible et à l’écoute des jeunes. Il a ouvert cette porte. Chacun apporte différentes choses. En dépit de ses supers sélections, Laurent n’a jamais eu la chance d’accrocher le titre, mais il a redonné sa noblesse à une sélection en équipe de France. Et je crois que s’il était resté sélectionneur cette année, il aurait réalisé la même sélection des neuf, car elle est incontestable. Maintenant, je suis ravi que Bernard Bourreau ait repris les commandes du navire. Pour moi, c’est la bonne personne, au bon poste, et au bon moment.