Andy, si vous deviez revenir sur votre parcours sportif, qu’en retiendriez-vous ?
J’ai été plusieurs fois champion de France et vainqueur d’étapes de la Coupe du Monde sur piste, la discipline par laquelle j’ai commencé à avoir des résultats. Je faisais de la route en parallèle, et j’y ai percé chez les Juniors. Je suis passé pro chez Casino en juin 1998, à 19 ans seulement, avant de poursuivre ma carrière avec Festina, Ag2r Prévoyance et pour finir Bouygues Telecom en 2007. Je place ma victoire au Grand Prix Ouest-France de Plouay en 2003 tout en haut de mes succès. J’ai été un bon équipier, bon rouleur, disons un coureur utile dans une équipe.

Vous avez mis fin à votre carrière à 28 ans, c’était un choix de votre part ?
Tout à fait. Je ne me retrouvais plus dans le milieu en tant que coureur. J’avais plus de mal à faire des sacrifices et la mutation du vélo à l’époque ne me plaisait pas énormément. J’ai eu la chance de connaître un vélo à l’ancienne qui me plaisait beaucoup, dans lequel le rendement, s’il était important, s’inscrivait dans une démarche moins professionnelle qu’il ne l’est aujourd’hui. Face à ce constat, j’ai fait le choix d’arrêter, sans trop savoir dans quoi me lancer. J’ai heureusement eu la chance d’être contacté très vite par Cycleurope, où j’ai commencé à travailler en tant que commercial dix mois après la fin de ma carrière.

Aviez-vous fait les études pour cela ?
En rejoignant les pros à 19 ans, j’avais fait de petites études. J’avais suivi un BEP Vente-action marchande, ce qui me donnait une base de commercial. Je baignais en outre depuis tout petit dans ce milieu grâce à mon père. La transition s’est donc bien passée, tout a été fait dans les règles. Je suis resté deux ans et demi chez Cycleurope, puis j’ai travaillé chez Bioracer avant d’intégrer le staff de l’équipe Europcar début 2012. J’y suis resté jusqu’en avril 2015, date de mon départ après un désaccord personnel avec Jean-René Bernaudeau. Le vélo est une passion viscérale. C’est dans ce milieu que je souhaite encore m’épanouir à l’avenir.

Avez-vous bénéficié d’une formation pour préparer votre reconversion ?
J’ai pu en bénéficier dès 2008 et je salue le travail de l’UNCP et du CPA en ce sens. Aujourd’hui, grâce à Pascal Chanteur et à ses collaborateurs, il existe une prime de reconversion pour les coureurs remplissant certains critères. Je suis passé par un bilan de compétences, un suivi de l’UNCP. J’ai pu faire une formation pour devenir directeur sportif et passer mon diplôme grâce à cela. Quand on arrête sa carrière, tout sportif le dira, c’est une petite mort qui peut durer plusieurs années. Je conseille aux jeunes coureurs de bien aller aux réunions de l’UNCP car c’est très important. Quand on est coureur, on est sur le haut de la vague. On s’imagine que tout va bien, que tout est facile, mais la vie de tous les jours est diffcile, et on rencontre des problèmes qui sont bien plus difficiles à 35 ans qu’à 20 ans.

En passant de l’autre côté de la barrière, vous reconnaissez-vous aujourd’hui pleinement dans le nouveau cyclisme ?
Bien sûr, même s’il convient de faire la part des choses dans les nouveaux outils qui sont à la disposition des coureurs. Travailler avec un capteur de puissance me paraît très important, j’ai même été l’un des premiers à utiliser un PowerTap et j’ai baigné là-dedans depuis le début avec la piste, mais je suis moins favorable à ce qu’on expose les données au grand public. La technologie a une part prépondérante dans le résultat mais il ne faut pas oublier que le vélo reste un sport d’instinct, de sensations et de courage.

Les données cardiaques ou de puissance diffusées en direct à la télévision peuvent-elles fausser la stratégie en donnant des indications aux équipes adverses ?
En fait, chacun est différent. Nous avons des bases de données en fonction notamment de l’âge d’un coureur, ce qui nous permet d’imaginer sa FCmax. Mais de nombreux facteurs entrent en jeu et il faudrait un suivi en temps réel pour se faire vraiment une idée des capacités d’un coureur à tenir dans une zone critique. Un directeur sportif pourra toujours se servir des données diffusées à la télé pour savoir si un coureur pioche ou non, mais pas de là à savoir quand un coureur va exploser.

Auriez-vous en revanche aimé vivre avec les outils modernes de communication dont disposent les coureurs, notamment à travers les réseaux sociaux ?
C’est un outil à manier avec grande précaution. Il faut faire la part des choses entre vouloir être connu et informer les personnes qui nous suivent. Il y a eu beaucoup de travers il y a deux ou trois ans mais les coureurs ont pris conscience de l’amplitude que ça pouvait avoir. Je crois que c’est un levier important, on ne peut pas être sportif professionnel sans être présent sur les réseaux sociaux, mais il faut rester vigilant.

Vous étiez candidat au poste de sélectionneur de l’équipe de France, finalement attribué à Cyrille Guimard, avez-vous le sentiment qu’il faille redonner du prestige à une sélection nationale ?
L’équipe de France est passée par une mauvaise passe. Mais je crois aujourd’hui qu’avec la nouvelle génération, qui a porté le maillot des Bleus dans les catégories Juniors puis Espoirs, un noyau dur s’est consituté. Et les valeurs du maillot ont repris le dessus. C’est ce que devra établir le nouveau sélectionneur. Tout en créant un collectif pour aller chercher le maillot de champion du monde.