Christophe, vous avez mis fin à votre carrière il y a six ans. Comment avez-vous célébré cela à l’époque ?
Nous avions organisé un jubilé, en fait un cyclo-cross dans ma ville natale à l’occasion duquel j’avais invité quelques copains. Nous avions surtout fait la fête le soir. Ça reste un bon moment, une belle conclusion à quatorze ans de carrière.

De quand datait votre décision de tourner la page ?
J’avais fait le choix depuis un an déjà. Durant l’hiver 2007/2008, j’étais allé voir Marc Madiot pour renégocier mon contrat à la Française des Jeux. Je lui avais signifié que je souhaitais faire encore une année mais que ce serait la dernière. Psychologiquement, c’était plus facile pour moi de savoir que j’allais courir ma dernière saison. A chaque fois que je me présentais sur une épreuve, Paris-Roubaix, le Championnat de France, je savais que c’était la dernière fois que je la disputais. Souvent, lors de la présentation des coureurs, Marc Madiot ou les autres directeurs sportifs avaient un petit mot sympa à mon égard. Je me suis bien préparé à ma fin de carrière.

En revanche, pour la reconversion, les choses ont été différentes…
Je souhaitais rester dans le milieu du vélo, j’ai donc passé mon Brevet d’Etat dans la foulée. Mais la reconversion n’est jamais simple. Quand vous êtes coureur cycliste professionnel, comme ça a été mon cas pendant quatorze ans, vous êtes sur-assisté. Je n’avais à penser qu’à pédaler et qu’à m’entraîner. Quand il faut revenir dans la vie active, c’est autre chose. J’ai toutefois eu la chance d’avoir toujours travaillé depuis l’âge de 16 ans avant de passer pro sur le tard à 26 ans. Avant d’être coureur, j’avais été menuisier après avoir passé un CAP. J’ai aussi travaillé à mi-temps à l’Est Républicain. Je savais ce qu’était la vie active et ça ne me faisait pas peur d’y retourner à 40 ans.

Vers quel métier vous êtes-vous alors dirigé ?
Tout naturellement, je suis revenu vers la menuiserie car du travail dans les équipes professionnelles, il y en a peu quand même. Je me suis plus spécialisé dans les vérandas et fenêtres en alu. J’avais un emploi du temps correct, ça me plaisait, et j’arrivais à prendre des congés sans solde pour aller sur les courses. En parallèle, j’ai pu travailler sur le Tour de France avec Carrefour dès ma fin de carrière. Et avec mon Brevet d’Etat j’ai encadré les jeunes Cadets-Juniors de Lorraine. Et j’ai pu évoluer quelquefois en tant que directeur sportif adjoint avec la Française des Jeux. J’alterne entre le métier du bois et le vélo, mes deux passions. Ça me plaît de faire les deux.

Et vous avez de futurs projets professionnels…
La boîte dans laquelle je travaillais a déposé le bilan. Je suis donc en formation pour essayer de fonder mon entreprise en Lorraine, du côté de Metz/Nancy. Je vais essayer de me mettre à mon compte à la pose de cuisines, salles de bain, placards. Ça me permettrait aussi d’avoir un peu de temps libre pour rester dans le milieu du vélo.

Vous conjuguez deux passions. Qu’ont-elles en commun ?
Le vélo me sert dans la menuiserie car j’ai toujours été exigeant. J’aime bien que le travail soit bien fait, j’aime le professionalisme. Dans le vélo, j’ai toujours été sérieux et essayé de faire de mon mieux. Dans le métier du bois, il faut aussi être assez minutieux, précis. Ça regroupe mes qualités dans mes deux métiers.

Que reste-t-il de votre carrière dans l’esprit des gens que vous rencontrez ?
L’image qui revient régulièrement, c’est ma chute à Nancy dans le Tour de France 2005. Nous y sommes repassés cette année, avec ce même virage dans lequel j’étais tombé si près d’une victoire d’étape. On m’en a forcément parlé énormément. C’est une image qui a marqué les gens. Il ne faisait pas beau, je me battais contre les éléments naturels. J’arrivais chez moi et je résistais seul au peloton depuis plusieurs kilomètres. Et puis il y a cette chute dans le dernier virage dans laquelle je perds tout espoir de victoire. Tout le monde se souvient en outre des images de Marc Madiot qui s’enflammait derrière son volant. Beaucoup d’éléments ont rendu cette journée marquante pour les gens.

Quels souvenirs particuliers avez-vous conservé de votre carrière ?
Quelques trophées, un maillot de chaque saison, les maillots et médailles de champion de France… Je n’ai pas une armoire remplie de coupes, je ne suis pas nostalgique de ma carrière, mais j’ai gardé les plus belles et les plus importantes. J’ai un ami, Jean-Noël, qui m’a classé tous les articles de journaux. J’ai trois classeurs à la maison classés par années. C’est important aussi de conserver quelques souvenirs, ne serait-ce que pour montrer à ses enfants ou à ses petits-enfants la carrière qu’on a eue. Même si aujourd’hui il est facile avec Internet de retrouver des articles ou des vidéos.

Et le vélo, qu’est-il devenu ?
J’en pratique toujours un peu au sein du club HQBL, un club d’amis. Nous ne faisons pas de compétitions mais nous avons réalisé des maillots rouges juste pour être ensemble et faire quelques sorties familiales. On se donne un rendez-vous à 80 kilomètres du point de départ et les femmes nous rejoignent avec le pique-nique, le barbecue, et on passe l’après-midi ensemble. C’est du vélo plaisir. Je n’ai plus envie de me faire mal. Et puis ça permet à mes potes de se venger en essayant de me larguer dans les montées !