Quand la Toscane s’éloigne déjà dans les rétroviseurs et que la Ligurie et ses reliefs encaissés se présentent dans le viseur, l’occasion est belle pour une poignée d’opportunistes de rattraper le retard pris jusqu’alors au classement général et retrouver les premiers plans. Samedi, on sera déjà dans les Alpes. Et dès lors il deviendra impossible pour quiconque ne visant pas la victoire finale de prendre possession du maillot rose porté depuis mardi par Joaquim Rodriguez (Team Katusha). Les favoris, restés sur la défensive jusqu’à présent, vont bien devoir se découvrir un jour ou l’autre. Et l’on devrait assister dès ce week-end aux premières joutes royales entre ceux qu’on prétend vouloir vaincre ce Giro mais dont on n’a à l’évidence pas encore vu grand-chose. Ils ne se manifesteront pas davantage entre Seravezza et Sestri Levante (155 km).

Nous sommes le jeudi de l’Ascension. Et des ascensions, les coureurs du Giro n’en manqueront pas aujourd’hui. La course rose se rapproche des massifs alpins et dolomitiques et ça se ressent. Aux abords de la mer Méditerranée, on recensera cinq difficultés majeures dans ce qu’il convient d’appeler une étape de moyenne montagne. Sur ce tracé en montagnes russes, une échappée a plus que jamais ses chances d’aller au bout aujourd’hui. Elle mettra du temps à prendre forme. Mais enfin, après une quarantaine de kilomètres, se constitue une fugue sérieuse. Elle comprend neuf garçons : Andrey Amador (Movistar Team), Lars-Ytting Bak (Lotto-Belisol), Jan Bakelants (RadioShack-Nissan), Sandy Casar (FDJ-BigMat), Michal Golas (Omega Pharma-Quick Step), Martijn Keizer (Vacansoleil-DCM), Jackson Rodriguez (Androni Giocattoli), Ivan Santaromita (BMC Racing Team) et Amets Txurruka (Euskaltel-Euskadi).

Aussitôt, le classement général actuel est étudié. Des neuf, deux coureurs présentent un danger concret pour le porteur du maillot rose. Sandy Casar est le mieux classé, 37ème à 4’01 », Ivan Santaromita est annoncé lui à 4’16 ». La perspective de retrouver un Français en rose, treize ans après les huit jours passés de la sorte par Laurent Jalabert, fait fantasmer les suiveurs français. Ça devient bien plus qu’un fantasme quand, après un instant d’hésitation, le peloton décide de se relever. Les Katusha ne manifestent aucun intérêt à défendre un maillot rose qui s’effiloche au fur et à mesure des kilomètres. L’écart grimpe à sept minutes. Sandy Casar, s’il tient Ivan Santaromita à distance, peut convoiter la tunique de premier de la classe. Il en a conscience, il sera l’un des acteurs essentiels à la réussite de l’échappée du jour, qu’il dirige en capitaine.

Il manque finalement 26 secondes à Sandy Casar pour déposséder Joaquim Rodriguez du maillot rose.

Les Katusha ont lâché l’affaire, pas les Liquigas-Cannondale. Comme toujours, ce sont eux qui roulent. Il est bien trop tôt pour dire si Ivan Basso gagnera ou non son troisième Giro dans dix jours, mais cette équipe aura fortement servi les intérêts du futur lauréat du Tour d’Italie. Si ça fait le jeu de tous les favoris, pilotés dans un fauteuil par le train vert et blanc depuis le départ de ce Giro, ça ne fait évidemment pas celui de Sandy Casar. Brusquement, l’écart est en chute libre. De sept minutes au pied du Valico La Mola (9,2 km à 5,2 %), il n’est déjà plus que de 4’15 » au sommet. Il reste alors 32 kilomètres à parcourir et une ascension à franchir, celle de Villa Tassani (5 km à 5,9 %). Mais déjà les rêves de maillot rose se sont momentanément évanouis pour Sandy Casar et Ivan Santaromita. Ce qui est acquis en revanche, c’est que les neuf de tête se disputeront la victoire d’étape. Il en est fini du pacte de non-agression. La guerre est ouverte.

A 30 kilomètres de l’arrivée, au moment où la course bascule dans la descente du Valico La Mola, Michal Golas passe à l’attaque. Malheureusement le Polonais a vu un peu grand. Il commet deux erreurs de trajectoire dans la descente, pas particulièrement dangereuse mais tourmentée. Le peloton, d’ailleurs, préfère ne pas courir de risques stupides. Il lève le pied… et voilà l’écart qui remonte ! Sandy Casar contrôle Ivan Santaromita et s’attache à forcer le rythme pour maintenir une avance suffisamment conséquente sur le paquet. Son œuvre permet le retour du groupe sur Golas dans la dernière difficulté, celle de Villa Tassani. Là, le groupe de tête va encore subir les accélérations brutales des mercenaires candidats à la victoire d’étape. Mais Casar répond à tous les démarrages et neutralise efficacement un Santaromita pourtant très en verve.

Le groupe de tête, chahuté, se recompose néanmoins dans la descente vers Sestri Levante. Sandy Casar répond encore à deux démarrages mais laisse finalement filer Lars-Ytting Bak quand le Danois s’élance à 1700 mètres du but. On ne reverra plus le dernier attaquant, qui s’en va conquérir une sacrée belle étape. Derrière, Sandy Casar sprinte déjà pour la 2ème place et les 12 secondes de bonification qui vont avec. Dès lors le peloton doit se présenter 3’50 » après Casar si le Francilien souhaite prendre possession du maillot rose. On surveille le chronomètre mais le groupe est déjà en vue bien avant la barre fatidique. Il coupera la ligne 3’34 » après l’arrivée victorieuse de Lars-Ytting Bak et 3’23 » après celle de Sandy Casar. Il manque finalement 26 secondes au Français pour déposséder Joaquim Rodriguez de sa tunique de leader. 6ème du Giro 2006, il réalise néanmoins une jolie opération et remonte au 3ème rang du général.

Demain vendredi, la treizième étape se disputera entre Savone et Cervere (121 km).

Classement 12ème étape :

1. Lars-Ytting Bak (DAN, Lotto-Belisol) les 155 km en 3h58’55 » (38,9 km/h)
2. Sandy Casar (FRA, FDJ-BigMat) à 11 sec.
3. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) m.t.
4. Jan Bakelants (BEL, RadioShack-Nissan) m.t.
5. Ivan Santaromita (ITA, BMC Racing Team) m.t.
6. Jackson Rodriguez (VEN, Androni Giocattoli) m.t.
7. Amets Txurruka (ESP, Euskaltel-Euskadi) m.t.
8. Martijn Keizer (PBS, Vacansoleil-DCM) à 43 sec.
9. Michal Golas (POL, Omega Pharma-Quick Step) à 48 sec.
10. Juan-Antonio Flecha (ESP, Team Sky) à 3’34 »

Classement général :

1. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) en 51h19’08 »
2. Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Barracuda) à 17 sec.
3. Sandy Casar (FRA, FDJ-BigMat) à 26 sec.
4. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) à 32 sec.
5. Ivan Santaromita (ITA, BMC Racing Team) à 49 sec.
6. Roman Kreuziger (TCH, Astana) à 52 sec.
7. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) m.t.
8. Ivan Basso (ITA, Liquigas-Cannondale) à 57 sec.
9. Damiano Caruso (ITA, Liquigas-Cannondale) à 1’02 »
10. Dario Cataldo (ITA, Omega Pharma-Quick Step) à 1’03 »

Classement par points :

1. Mark Cavendish (GBR, Team Sky) 77 pt
2. Matthew Goss (AUS, Orica-GreenEdge) 65 pt
3. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 55 pt
4. Domenico Pozzovivo (ITA, Colnago-CSF Bardiani) 49 pt
5. Martijn Keizer (PBS, Vacansoleil-DCM) 40 pt
6. Miguel-Angel Rubiano (COL, Androni Giocattoli) 36 pt
-. Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Barracuda) 36 pt
8. Francisco-José Ventoso (ESP, Movistar Team) 32 pt
-. Geoffrey Soupe (FRA, FDJ-BigMat) 32 pt
10. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) 31 pt

Classement de la montagne :

1. Michal Golas (POL, Omega Pharma-Quick Step) 33 pt
2. Miguel-Angel Rubiano (COL, Androni Giocattoli) 24 pt
3. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) 9 pt
-. Domenico Pozzovivo (ITA, Colnago-CSF Bardiani) 9 pt
-. Jan Bakelandts (BEL, RadioShack-Nissan) 9 pt
6. Cesare Benedetti (ITA, Team NetApp) 7 pt
7. Olivier Kaisen (BEL, Lotto-Belisol) 6 pt
-. Ivan Santaromita (ITA, BMC Racing Team) 6 pt
-. Alfredo Balloni (ITA, Farnese Vini-Selle Italia) 6 pt
10. Sandy Casar (FRA, FDJ-BigMat) 5 pt

Classement des jeunes :

1. Damiano Caruso (ITA, Liquigas-Cannondale) en 51h20’10 »
2. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) à 8 sec.
3. Sergio-Luis Henao (COL, Team Sky) à 25 sec.
4. Peter Stetina (USA, Garmin-Barracuda) à 1’01 »
5. Tom-Jelte Slagter (PBS, Rabobank) à 1’41 »
6. Gianluca Brambilla (ITA, Colnago-CSF Bardiani) à 1’56 »
7. Diego Ulissi (ITA, Lampre-ISD) à 3’45 »
8. Jon Izaguirre (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 8’35 »
9. Tanel Kangert (EST, Astana) à 12’04 »
10. Geoffrey Soupe (FRA, FDJ-BigMat) à 18’48 »

Classement par équipes :

1. Movistar Team (ESP) en 152h43’08 »
2. Liquigas-Cannondale (ITA) à 1’51 »
3. BMC Racing Team (USA) à 2’02 »
4. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 2’49 »
5. Astana (KAZ) à 2’54 »
6. Garmin-Barracuda (USA) à 3’35 »
7. Vacansoleil-DCM (PBS) à 3’59 »
8. Lampre-ISD (ITA) à 4’29 »
9. Androni Giocattoli (ITA) à 5’52 »
10. Euskaltel-Euskadi (ESP) à 6’34 »