Benoît, tu as remporté le classement Vélo 101-Powertap.fr sur l’ensemble de tes bons résultats en 2013. Qu’est-ce qui te rend le plus fier si on évoque la saison dernière ?
Avoir gagné le Grand Prix de Lillers pour la troisième fois. C’est la première course de Classe 2 que j’ai remportée chez les pros. Etant maintenant Calaisien, c’est à une demi-heure de la maison. Ça présente un intérêt particulier pour les gens du nord. Les conditions étaient compliquées étant donné que je m’étais cassé la clavicule au mois de novembre. J’avais passé un hiver compliqué, la forme ayant été très longue à revenir. Mais la semaine qui a précédé le Grand Prix de Lillers, je me suis soudain mis à y croire. Je me suis dit « et si je le faisais, et si je gagnais… » On m’a regardé bizarrement lorsque j’ai dit ça, mais j’ai réussi mon coup.

Cette victoire à Lillers a marqué le début d’une belle série, avec des victoires tous les mois. Quel est le secret de ta régularité ?
Mon truc, c’est qu’une fois devant je cherche toujours la solution pour gagner. Je ne cours jamais pour faire 2, quelle que soit la course. Maintenant, la régularité que vous évoquez je ne la perçois pas comme ça sur l’année 2013. J’ai eu des hauts et des bas, des week-ends où j’étais complètement absent en raison de certaines blessures. Je me suis senti moins régulier qu’en 2012. Mais quand j’étais devant je ne me suis pas beaucoup raté. Et quand on gagne trois Classes 2, deux Coupes de France, ça marque les esprits.

A quelles blessures fais-tu référence ?
J’ai couru deux mois avec une chaussure ouverte, ayant un problème au pied. J’avais aussi des kystes au niveau de la selle dont je me suis fait opérer en fin d’année. Ça m’a obligé à faire des jours sans vélo, plusieurs jours de repos la veille des courses, ce qui a pas mal compliqué la donne. Mais je n’avais pas le choix. C’est pourquoi je pense qu’il y a des week-ends sur lesquels j’aurais dû mieux marcher. Maintenant, ça reste une saison exceptionnelle quand même.

Après une saison aussi aboutie, est-ce plus facile de se motiver ou a-t-on tendance à se démobiliser ?
Il y a un an j’avais plutôt eu du mal à me remotiver après ma fracture de la clavicule. De ce fait j’avais un manque de condition physique, moins de sensations sur le vélo. L’hiver est arrivé au bon moment dans cette période plus difficile. Mais désormais je suis motivé. J’ai été au boulot quasiment tout l’hiver (NDLR : Benoît Daeninck est fonctionnaire de police) et j’ai très envie de réaliser une saison 2014 exceptionnelle, qui sera sûrement l’une de mes dernières. Je veux continuer à prendre du plaisir et encore gagner des courses, forcément.

Comment prépares-tu la saison à venir ?
J’ai repris l’entraînement début novembre, ayant coupé plus d’un mois après mon opération des kystes. J’ai travaillé tout le mois de novembre, si bien que je ne pouvais rouler que trois fois par semaine, essentiellement le week-end. Depuis la mi-décembre, je peux rouler au quotidien, ce qui m’a permis d’intensifier les kilomètres. Je reste assez fidèle à ce que je faisais par le passé. Pourquoi changer des choses qui ont marché ? J’ai voulu changer ma préparation une fois quand j’étais jeune et je suis complètement passé au travers en début de saison. Maintenant, dans le nord, les conditions météo l’hiver nous empêchent parfois de faire du vélo, mais la préparation est bonne à l’approche de la rentrée.

Comment travailles-tu à l’entraînement ?
Je travaillais en collaboration avec Charlie Leconte par le passé, désormais je suis suivi par John Saccomandi sans avoir pour autant changé mes méthodes d’entraînement. Je lui envoie mon rapport tous les dimanches, je lui dis ce que je compte faire dans la semaine, puis nous en discutons ensemble pour peaufiner les petits détails.

Tu bénéficies du statut de sportif de haut niveau dans la Police, comment cela se traduit ?
Je suis l’un des rares fonctionnaires de police à encore bénéficier de cet avantage, les critères étant de plus en plus pointus. J’ai un nombre de jours à effectuer dans l’année que je gère comme je veux, en fonction des compétitions et des entraînements. Je les fais donc essentiellement l’hiver. L’an passé j’avais tout fait l’hiver, cette année je vais gérer différemment en faisant quelques jours en début d’année. Je remercie tous les jours la Police Nationale de me laisser continuer ma passion à ce niveau-là.

Tu as vécu deux années chez les pros avec Roubaix Lille Métropole en 2010 et 2011, qu’en as-tu gardé ?
J’ai beaucoup appris sur différentes méthodes d’entraînement. J’ai appris aussi à subir les courses. C’est facile de dominer les courses quand on est amateur, c’est beaucoup plus compliqué de les subir quand on est pro. Malheureusement je menais à l’époque un double projet avec l’équipe de France sur piste en vue des Jeux de Londres. Ce double projet, être à haut niveau l’hiver sur la piste et l’été sur la route, est compliqué à mener. Personne ne peut gérer les deux. J’étais pro mais je rêvais d’aller aux Jeux, je ne pouvais pas choisir, si bien que le double projet a échoué  : je ne suis pas allé aux Jeux et je suis redescendu amateur !

Tu fais partie des meilleurs amateurs français depuis des années, pourquoi n’as-tu pas réussi à percer chez les pros ?
La façon de courir est totalement différente chez les pros. Ça ne me convenait pas forcément. Et pour moi les conditions n’étaient pas toutes réunies à Roubaix Lille Métropole pour que je puisse m’exprimer.

La saison 2014 va démarrer prochainement, as-tu déjà coché des rendez-vous ?
J’ai déjà coché des dates. On en discutera plus avec mes directeurs sportifs au cours du stage. Nous verrons ce qu’on fait, si on le fait, comment on peut le faire. La ligne de conduite, au CC Nogent-sur-Oise, ça reste les Coupes de France. Ce sont des objectifs importants. Certaines manches me motivent plus que d’autres mais pour l’équipe il faudra être présent sur toutes les épreuves.

Le club a été bien renouvelé cet hiver, avec dix nouveaux venus sur seize coureurs, comment le sens-tu ?
Il y a énormément de jeunes mais il y en a toujours eu majoritairement à Nogent. C’est toujours une équipe très jeune. Ce sont des jeunes de qualité pour tous. Certes, il y a beaucoup d’Espoirs 1 ou 2 mais ils ont l’air d’avoir bien travaillé tout l’hiver et vu l’ambiance du dernier stage, il ne devrait pas y avoir de souci. De mon côté, j’assume mon rôle de capitaine. Je fais le lien entre les directeurs sportifs et eux. Sur le vélo, quand les choses ne vont pas, je suis le premier à gueuler. Je vois souvent mieux que les directeurs sportifs ce qui se passe en course. C’est donc à moi de leur donner des conseils, de prendre des décisions en pleine course.

Tu as remporté le classement Vélo 101-Powertap.fr 2013, est-ce un classement auquel tu prêtes une attention particulière ?
Pas forcément en début de saison. Je ne cours pas pour ces classements mais à l’approche du dernier tiers de la saison, quand je voyais mon nom en tête, je me suis dit que j’avais moyen de le gagner. J’ai commencé à regarder ce que faisaient les autres, je surveillais avec attention ce que faisait Alexis Gougeard sur le mois d’octobre, une fois que j’ai arrêté de courir. J’avais demandé à mes coéquipiers de le surveiller un petit peu pour qu’il ne marque pas trop de points ! C’est toujours bien de voir son nom en tête d’un classement, quel qu’il soit.

Tu es récompensé par un PowerTap. Est-ce un outil que tu utilises déjà à l’entraînement ?
J’en ai eu un par le passé. C’est vraiment un outil très intéressant, à condition de savoir l’exploiter. Maintenant, je fais partie de cette génération qui marche encore un peu aux sensations. Mais pour travailler des zones précises ou en intensité, c’est quand même nettement mieux que les pulsations. Ça reste un outil indispensable pour la nouvelle génération du vélo. Aujourd’hui, on est obligé de tout travailler avec ça. La puissance a pris le pas sur les pulsations qui ne voulaient rien dire.

A propos de puissance, quelle est la tienne ?
Je ne la connais qu’en rapport avec les tests à l’effort que j’ai réalisés lorsque je reprenais. Je faisais 525 watts à ma reprise mais il me manquait alors 20 pulsations. Ça correspondait en fait à ma fréquence moyenne sur vingt-cinq minutes sur un chrono de fin de saison… Maintenant, en saison, je n’en sais rien. Il faudra que je la calcule un jour.

Propos recueillis le 14 janvier 2014.