Pierre-Henri, tu étais déjà champion d’Europe, te voilà champion du monde, que ressens-tu ?
Je suis très content et je dois vraiment remercier l’équipe car c’est avant tout une victoire collective. Je remercie tout particulièrement Guillaume Martin qui s’est sacrifié pour moi dans le final.

Comment as-tu construit ton succès ce matin ?
On avait pour consigne de faire une course de mouvement. Au début de course on s’est donc employé chacun notre tour à mettre cela en place en prenant les échappées. Ensuite, à deux tours de l’arrivée, j’ai senti que ça frottait vraiment trop pour moi. J’ai décidé d’attaquer dans la bosse. J’ai vu que j’avais fait un écart et on s’est assez vite retrouvé à six. Après, comme nous étions deux Français, on a vraiment beaucoup roulé pour que l’échappée puisse prendre du champ. Cela a assez bien marché même si l’avance n’a jamais été énorme. Finalement ça a payé.

Comment as-tu procédé dans le final pour décrocher ce titre ?
Le Belge Rob Leemans a attaqué avant la flamme rouge. J’ai alors demandé à Guillaume Martin de rouler pour essayer de réduire l’écart. Il a réussi à le maintenir en-dessous des cinq secondes à l’approche du sprint. Ensuite j’ai donné tout ce que j’avais jusqu’à la ligne d’arrivée. Mais je pense qu’on pourrait couper les manches du maillot pour les donner à Guillaume. C’est une vraie victoire d’équipe.

Au vu de la physionomie des derniers kilomètres, il semble que l’équipe de France avait un plan B et que si l’échappée avait été reprise, un train était déjà en place pour emmener un sprinteur. Est-ce vrai ?
Naturellement je n’ai pas vraiment vu ce qui se passait derrière. Mais ce qui est sûr c’est qu’on ne pouvait pas se permettre de tout miser sur l’échappée et courir le risque de tout perdre. J’imagine qu’ils ont dû s’organiser derrière pour pouvoir emmener le sprint à un de mes coéquipiers.

Qu’as-tu pensé du circuit ?
C’est un circuit qui peut s’avérer usant si on fait une course de mouvement. Après je pense que chez les professionnels, demain, cela ne se passera pas comme cela et qu’il y aura quelques équipes pour contrôler la course. En ce qui nous concerne, on avait décidé de durcir la course très tôt en provoquant une course de mouvement. On l’a vu avec Alexis Gougeard, qui a été devant une bonne partie de la journée, et dans toutes les échappées nous étions en surnombre.

C’est une année incroyable pour toi avec le titre européen puis le titre mondial. Olivier Le Gac avait réalisé la même chose l’an dernier. Comment expliques-tu que les Juniors français soient au-dessus du lot ?
Déjà, nous étions huit coureurs au départ. Comme on avait convenu de faire une course de mouvement, cela nous a permis de nous retrouver en surnombre et dans toutes les échappées. Cet élément nous a donc bien aidés pour avoir le contrôle de la course. Ensuite on est une bande de copains et c’est souvent plus facile comme ça. On a eu la chance d’avoir une équipe qui s’est assez peu renouvelée tout au long de l’année. L’équipe n’a quasiment pas bougé depuis le mois de mai. On totalise presque une vingtaine de courses ensemble en plus des stages que l’on a pu faire. Cela permet de créer des liens et de souder le groupe. Dans les moments difficiles des courses, c’est un vrai avantage.

As-tu une explication à la réussite du cyclisme français ces deux derniers jours ?
Les circonstances nous ont été favorables ces derniers jours, mais de façon générale chez les jeunes, l’équipe de France a toujours beaucoup de réussite et obtient de bons résultats. Cela ne m’étonne donc pas vraiment.

Qu’est que cela représente pour toi de porter le maillot arc-en ciel ?
Pour le moment je ne réalise pas trop. J’avais été champion d’Europe mais être champion du monde c’est autre chose. Hier, quand j’ai vu Arnaud Démare avec à l’hôtel, ça m’a fait rêver. On avait aussi crié comme des fous dans la chambre d’hôtel pendant le sprint.

Tu passes Espoir l’an prochain. Tu ne vas donc pas porter beaucoup ce maillot. As-tu des courses prévues d’ici la fin de l’année ?
Initialement je devais arrêter après les Championnats du Monde. Mais ce titre va peut-être remettre les choses en question car ce serait dommage de ne pas porter ce maillot au moins une fois.

Tu roules, tu sprintes pas mal, tu sais tout faire ?
Je ne sais pas si je sais tout faire. Je pense qu’en Juniors il faut rester assez complet. Après on a le temps de se trouver une spécialité. Là, j’adorais la bosse d’arrivée. Au sprint je ne suis pas le coureur le plus véloce mais ce n’était pas un sprint classique puisque l’arrivée était en montée. Cela favorisait la force et c’était mieux pour moi.

Te sens-tu plus attiré par le Tour de France ou par les classiques ?
C’est sûr que le Tour de France fait rêver tout jeune français et je ne déroge pas à la règle. Après, je sais aussi que je ne serai jamais un grand grimpeur. Pour le moment je n’ai vraiment pas de spécialité et j’ai encore le temps avant de décider quel type de course je veux cibler à l’avenir.

En Juniors, on ne parle pas encore vraiment de carrière, mais as-tu déjà un plan pour l’avenir ?
Mon souhait est bien évidemment de passer professionnel, mais avant cela j’ai convenu avec mes parents qu’il fallait que je termine mes études. Si j’ai des problèmes de santé ou que cela ne se passe pas bien, c’est important d’avoir un bagage scolaire suffisant en plus. Je suis encore en terminale et j’aimerais faire un BTS ou un DUT l’an prochain pour avoir quelque chose en plus, en dehors du vélo.

A quel âge as-tu commencé le vélo ?
J’ai commencé à 12 ans. Avant je faisais du football et de la course à pied. Je me suis mis au vélo en commençant d’abord par la route. J’ai aussi fait de la piste et du cyclo-cross jusqu’à l’an dernier et cette année je me suis vraiment concentré uniquement sur la route.

As-tu déjà eu des contacts avec des équipes professionnelles comme c’est le cas pour Olivier Le Gac ?
Pas vraiment pour le moment. Pour Olivier, c’est un peu différent. Il a été champion du monde pour sa première année Junior donc c’est normal qu’il ait eu des contacts. Certains directeurs sportifs français m’ont déjà appelé pour m’encourager à continuer comme cela sans me prendre la tête. Mais après, personne ne m’a proposé de contrat pour l’instant.

Tu côtoies les professionnels de l’équipe de France depuis quelques jours. As-tu parlé avec eux ?
Pas vraiment. Ce n’est pas la même chose qu’avec les Espoirs, avec qui on peut parler et on rigole pas mal. Avec les professionnels, ce n’est pas pareil, il y a comme une barrière. On les respecte et on préfère les admirer plutôt que rigoler avec eux.

Propos recueillis par Sylvain Chanzy à Copenhague le 24 septembre 2011.