Plus que trois ! Voilà ce que les coureurs se diront sans doute le 19 juillet au matin avant de signer la feuille. Pour certains, cela voudra dire qu’ils n’auront qu’une hâte : rallier Paris. On pense notamment aux sprinteurs sevrés d’étapes dessinées pour eux depuis de longs jours et qui auront hâte de retrouver les Champs Elysées. Pour d’autres, cela voudra signifier que le temps leur est compté pour combler un retard qu’ils auront accumulé. Si le Tour est déjà joué, celui qui portera le maillot jaune saura qu’il lui reste deux jours avant de défiler à la tombée de la nuit entre Versailles et Paris. Mais celui qui aura la chance d’occuper le fauteuil de leader à Bourg d’Oisans ne pourra certainement pas crier victoire avec l’étape qui l’attend ce jour-là.

204 kilomètres, cinq cols, deux mythes, 66 kilomètres de montée, plus de 5000 mètres de dénivelé positif. Les chiffres donnent le tournis et montrent que sur cette étape, tout peut arriver. À dire vrai, deux scénarios sont possibles. Soit, les perdants des dernières journées jouent leur dernière carte sur cette étape pour tenter de combler leur retard pour donner lieu à une étape totalement explosive. Soit, la grande bagarre se déclenchera dans la dernière ascension et c’est un petit groupe de costauds qui pourrait se disputer la victoire au Grand-Bornand comme ce fut le cas en 2004.

Ce plan B serait pourtant bien frustrant compte tenu du programme en ce 19 juillet. C’est en tournant le dos à l’Alpe d’Huez que le départ sera donné au centre de Bourg d’Oisans. Après une poignée de kilomètres de plat (qui seront rares au cours de la journée), les coureurs s’attaqueront au premier morceau de bravoure : le col du Glandon. Derrière ses 21,6 kilomètres à 5,1 % de moyenne se cache un col irrégulier où la pente dépasse par endroits les 10 %. Le peloton ne se hissera pas jusqu’au col de la Croix de Fer et tournera à gauche au sommet pour basculer vers Saint-Colomban des Villards. Dès le bas de la descente, on enquille avec le deuxième gros morceau de la journée : le col de la Madeleine.

Là encore, sa pente régulière autour des 8 % sur près de 20 kilomètres est connue de beaucoup. Ceux qui se sont lancés dans la grande offensive dans le Glandon auront l’occasion royale de la prolonger et même d’accroître leur avance sur le peloton ou ce qu’il en restera. Il faudra donc souffrir pour se hisser à 2000 mètres d’altitude tout rond par Saint-François Longchamp. Cette belle montée comporte de belles portions ombragées qui offriront un peu de répit aux coureurs en cas de chaleur sur les terribles lacets de la Madeleine. Il faudra ensuite plonger vers Albertville. En fait, toute cette première partie est l’inverse exact des 100 premiers kilomètres de l’Étape du Tour acte I, l’an dernier entre Albertville et la Toussuire.

Si le Glandon comme la Madeleine sont des ascensions relativement classiques et souvent empruntées dans l’histoire, Christian Prudhomme et son équipe ont choisi de faire la part belle aux cols aux noms moins clinquants. Dans les Alpes, pour la 100ème, point de Galibier, d’Izoard, d’Iseran ou encore de Joux Plane. Les trois derniers cols de cette longue journée seront moins réputés. Deux cols de 1ère catégorie et un de 2ème pour conclure cette étape reine. Les dernières ascensions ne présentent certes pas de caractéristiques ayant de quoi faire peur aux meilleurs, mais c’est l’enchaînement qui devrait rendre les choses difficiles. Avec deux cols Hors Catégorie dans les pattes et après dix-huit jours de course, les trois dernières difficultés de cette journée pourraient faire mal.

Il y a d’abord, le col du Tamié qui présente une première partie assez raide et une deuxième partie plus roulante. Classé en 2ème catégorie, il ne devrait cependant pas peser sur la course. D’autant qu’en bas de la descente, une fois atteint Faverges, se présente la seconde partie plate de la journée. Qu’on se le dise, ce sera la dernière et elle sera relativement courte. Car le pied du col de l’Epine est tout proche. Là encore, on est loin des deux premiers cols en terme de difficultés et de distance, mais cette ascension présente de beaux pourcentages à mi-pente qui pourraient favoriser les offensives. En haut, il restera une quarantaine de kilomètres et les plus audacieux pourraient tenter leur chance à cet endroit. Au sommet, on ne redescend pas immédiatement et il faut encore aller chercher le col du Marais, non-répertorié.

À cet endroit, il faudra basculer dans la descente qui mènera au pied de la Croix-Fry, où beaucoup pourraient se retrouver carbonisés. Plus long (11 kilomètres) et plus difficile, il intervient après plus de 180 kilomètres et risque de faire très mal. Selon les scénarios, c’est à cet endroit que les plus offensifs pourraient jeter leurs dernières forces, ou c’est ici que les hostilités seront déclenchées. Dans le premier cas, on aurait sans doute l’une des étapes marquantes de l’histoire du Tour, dans le second, on resterait sur notre faim en ayant la sensation que le tracé royal, n’aurait pas totalement été exploité. Malgré tout, quel que soit le scénario adopté par le peloton, celui qui lèvera les bras au Grand Bornand sera un beau champion pour avoir su dompter les cimes.

Pour vous rendre compte de la difficulté de cette étape, nous vous invitons demain, à découvrir la vidéo de la reconnaissance que nous avons effectuée.