Les 5 favoris à suivre:

Primoz RoglicnullPrimoz Roglic en camp d’entrainement en mai | © Jumbo Visma

Au départ de Burgos, le champion olympique du contre-la-montre apparaît comme l’immense favori de cette 76e édition de la Vuelta. Mis hors-jeu du Tour après une vilaine chute lors chaotique final à Pontivy, le slovène a amplement rassuré sur sa condition à Tokyo. Equipier modèle de son compatriote Tadej Pogacar sur la course en ligne, il s’est ensuite offert le luxe de reléguer à plus d’une minute Tom Dumoulin, Rohan Dennis et Filippo Ganna, soit les vainqueurs des quatre dernières éditions des championnats du monde de chrono !

Or, sans être une orgie de contre-la-montre, ce Tour d’Espagne présente toutefois 40 kilomètres d’exercice en solitaire. Et avec sa force présupposée, l’ancien sauteur à ski pourrait bien y trouver l’occasion d’éliminer ou de renverser ses rivaux, pas forcément friands de ce genre d’épreuves. Toutefois, s’il excelle dans cette discipline, le slovène se débrouille aussi en montagne. Pour ainsi dire, cela fait quatre ans qu’il n’a plus terminé hors du podium un Grand Tour, récoltant sur son passages moultes succès sur les courses d’une semaine. Dès lors, puisque Tadej Pogacar ne figure pas sur la liste de départ, seules la chute ou la maladie paraissent en mesure de contrarier les ambitions du champion de Trbovlje, bien déterminé à réaliser la passe de trois sur les routes hispaniques.

 

Egan BernalnullPrimoz Roglic en camp d’entrainement en mai | © Team INEOS Grenadiers

Sortir un nom de l’armada INEOS-Grenadiers est déjà prendre un risque. En effet, nul ne sait avec certitude qui du colombien, de Richard Carapaz, d’Adam Yates, de Pavel Sivakov ou de Thomas Pidcock prendra finalement le leadership du rouleau-compresseur britannique, même pas les intéressés eux-mêmes. Peu coutumier de la langue de bois, le natif de Bogota confiait hier, en conférence de presse, faire partie d’un dispositif collectif plutôt que constituer le dernier étage d’une fusée. Dans ce choix, il n’y a donc que le poids du palmarès, les derniers résultats et la construction du calendrier qui a tendu vers le vainqueur de la Grande Boucle.

En effet, enfin débarrassé de ses maux de dos et récent vainqueur du Tour d’Italie, celui-ci avait envisagé le doublé Giro-Vuelta dès l’entame de sa saison, et l’a donc construite dans cette perspective. Une coupure de deux mois a ainsi fait suite au sacre de Milan, avant une reprise de la compétition en douceur à la Classica San Sebastian puis au Tour de Burgos, où Bernal a d’ailleurs esquissé un progressif retour en forme. Quatrième de l’étape reine, aux Lagunas de Neila, il prenait déjà les devants sur ses équipiers Yates et Sivakov, et battait même Mikel Landa, vainqueur de l’épreuve. Le temps devrait d’ailleurs pencher en sa faveur, face à des adversaires possiblement émoussés par une année marathon.

 

Mikel LandanullMikel Landa | © Team Bahreïn – Victorious

Eliminé très rapidement du Giro par une chute, le basque a également la fraicheur avec lui. Cumulant seulement sept jours de course depuis la mi-mai, Mikel Landa a pu se soigner tranquillement avant de reprendre sereinement l’ascension vers son pic de forme. Inexistant lors de la Classica San Sebastian puis abandonnant le Circuit de Gexto, il s’est ensuite montré solide lors du Tour de Burgos, qu’il a remporté en signant trois tops 10 d’étape. Le coureur de la Bahreïn-Victorious devrait donc se montrer saignant tout au long des trois semaines de course, et plus particulièrement lors du traditionnel bouquet final de montagne.

 

Hugh CarthyHugh Carthy, vainqueur au Pico Blanco samedi dernier, au terme de l'étape reine du Tour de BurgosHugh Carthy, vainqueur aux Lagunas de Neila samedi dernier, au terme de l’étape reine du Tour de Burgos | © Team EF Education – Nippo

Il n’a pas le palmarès d’un cador mais en a tout l’air. En constante progression depuis ses débuts, le britannique semble avoir franchi un cap depuis un an, et son honorable podium sur la Vuelta. D’ailleurs, son explosion sur les routes hispaniques n’a rien d’étonnant. A l’aise sur les forts pourcentages, Hugh Carthy est fait pour l’Espagne. Dès 2015, il accédait au monde professionnel par l’intermédiaire d’une historique équipe locale , la Caja Rural. Un an plus tard, c’est dans cette même contrée qu’il glane ses premiers succès européens, au Tour des Asturies. Et en 2020, c’est dans ce même massif qu’il entre dans une nouvelle dimension, en s’imposant en costaud au sommet du terrible Angliru, au nez et à la barbe de tous les grands.

Avec son récent succès sur l’étape reine du Tour de Burgos, le coureur de la formation américaine EF Education – Nippo confirme son statut de favori sur cette 76e Vuelta, et peut désormais viser la plus haute marche du podium. Son équipe y croit, et lui offre une équipe à la hauteur de ses ambitions, entièrement dédiée à son rêve.

 

Alexandr VlasovAlexandr Vlasov lors du Tour d'Italie 2021Alexandr Vlasov lors du Tour d’Italie 2021 | © AstanaPremTech

Avec lui on ne sait jamais. Brillant ou transparent, acteur ou figurant, le russe est une énigme. S’il a démontré à des moultes reprises l’immensité de son potentiel, il peine encore à l’utiliser avec constance. Par conséquent, ses exploits alternent avec ses défaillances, et à ses résultats majeurs se mêlent des prestations insipides. Ainsi, l’an passé, il avait chuté à la 11e place du classement général à l’issue de la dernière étape de montagne, après avoir réalisé trois tops 5 en deux semaines de course.

Pour cette 76e édition de la Vuelta, il est fort à parier que la recrue phare du Team BORA-Hansgrohe pour la saison 2022 connaîtra un parcours similaire, après de fades Jeux Olympiques et un Tour de Burgos sans coups d’éclats. Mais qui sait ? Sa quatrième place finale au Giro ne permet pas de le rayer. Le natif de Vyborg est si dur à cerner…

 

Les étapes à ne pas manquer :Parcours de la Vuelta 2021Parcours de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

 

3e étape, Santo Domingo de Silos – Espinosa de los Monteros/Picón Blanco (lundi 16 août)Profil de la 3e étape de la Vuelta 2021Profil de la 3e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

3e étape est déjà une première arrivée au sommet, voilà qui est digne de la Vuelta ! Pour le coup, celle-ci emprunte son épouvantail de la journée, le Picon Blanco (7.9km à 9.2%) à son petit frère du Tour de Burgos, qui y a déjà tracé le final de sa troisième étape la semaine dernière. Les images de l’arrivée parlent d’elles-mêmes avec des pourcentages effrayants et de grosses défaillances, démontrant que personne ne pourra s’y cacher.

 

7e étape, Gandia – Balcon de Alicante (vendredi 20 août)Profil de la 7e étape de la Vuelta 2021Profil de la 7e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

Il s’agit de la première « vraie » étape de montagne de cette 76e Vuelta. Avec six ascensions au programme, elle devrait lessiver les organismes à la sortie d’une première semaine nerveuse, pour créer plus facilement des différences dans l’ascension finale. Ses pourcentages irréguliers devraient d’ailleurs être à l’avantage des purs grimpeurs, qui pourront espérer créer des différences sur les pentes à plus de 10% des deux derniers kilomètres.

 

9e étape, Puerto Lumbreras – Alto de Velefique (dimanche 22 août)Profil de la 9e étape de la Vuelta 2021Profil de la 9e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

Si la 7e étape n’emmènera pas les coureurs à plus de 1000m d’altitude, ce tracé conduira en revanche les coureurs à la rencontre de la haute montagne. Les sommets tutoieront les nuages et les cols s’allongeront radicalement, pour proposer une journée à plus de 60km d’ascension répertoriés. La difficulté finale se formulera en opposition au Balcon de Alicante : dure au pied, elle adoucira la pente à mesure que les coureurs approcheront du sommet. Les attaquants ne devront pas trainer, au risque de voir les rouleurs-grimpeurs leur ravir la victoire.

 

14e étape, Don Benito – Pico Villuercas (samedi 28 août)Profil de la 14e étape de la Vuelta 2021Profil de la 14e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

Si la route ne se sera que peu aplanie pendant la semaine, elle devrait en revanche proposer un peu de répit dans la bataille pour le classement général, avant que celle-ci ne reprenne de plus belle avec cette 14e étape. Si l’ascension de l’Alto Collado de Ballesteros se montrera spectaculaire avec ses pourcentages effarants (2,9km à 13,4%), elle est malheureusement trop loin de l’arrivée pour créer du mouvement. Surtout, les 14 kilomètres de montée du Pico Villuercas n’encourageront pas les attaques lointaines, puisque ses pentes sont essentiellement roulantes. L’ultime raidard à 15% devrait donc sélectionner le vainqueur des survivants des trains INEOS Grenadiers et Jumbo-Visma.

 

17e étape, Unqera – Lagos de Covadonga (mercredi 1er septembre)Profil de la 17e étape de la Vuelta 2021Profil de la 17e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

Rien n’égale les classiques comme juges de paix ! Cette année, le Giro a eu le Monte Zoncollan, le Tour sa double ascension du Ventoux et la Vuelta renoue avec la tradition des Lacs de Covadonga. Si son pourcentage moyen n’est pas très impressionnant (6,9%) en raison de ses replats au sommet, cette ascension est belle et bien terrifiante, avec ses 9 premiers kilomètres tournant autour des 10% de moyenne. Et pour être certains qu’ils seront sélectifs, les organisateurs ont machiavéliquement placé une double escalade de l’abrupte Collada Llomena (7,6km à 9,1%) en amont. La bataille devrait être rude, et le vainqueur grand.

 

18e étape, Salas – Altu d’El Gamoniteiru (jeudi 2 septembre)Profil de la 18e étape de la Vuelta 2021Profil de la 18e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

En cette rentrée scolaire, les fans de cyclisme auront à faire l’école buissonnière. Avec ses deux âpres cols de première catégorie dans sa première partie, puis la montée bonifiée de l’Altu la Sega o del Cordal pour préparer l’entame de l’ascension finale, cette ultime étape de haute montagne aura pris le soin d’essorer les coureurs avant de les passer au séchoir de Altu d’El Gamoniteiru. Avec 14,6km d’ascension à près de 10% de déclivité moyenne, autant vous dire qu’ils ne vont pas s’y amuser ! Pour les purs grimpeurs, il s’agira là d’une occasion en or de creuser l’écart avant le chrono final, en profitant d’une pente assaillant les mollets sans relâche pour s’envoler vers les sommets. Le second volet de ce diptyque asturien s’annonce déjà épique !

 

21e étape, Padrón – Saint-Jacques de Compostelle (dimanche 5 septembre)Profil de la 21e étape de la Vuelta 2021Profil de la 21e étape de la Vuelta 2021 | © La Vuelta

Ces dernières années, le Giro avait remis à la mode ces contre-la-montre finaux, permettant de conclure trois semaines de course avec suspense et spectacle, comme popularisé par le fameux chrono des Champs-Elysées du Tour de France 1989, où Greg Lemond avait renversé Laurent Fignon sur la plus belle avenue du monde. Abandonnant son traditionnel circuit de Madrid, la Vuelta va donc également tenter l’expérience, dans la cité ô combien symbolique de Saint-Jacques de Compostelle. Long de 33,8km et relativement accidenté, il devrait parfaitement convenir à Primoz Roglic, pour asseoir son sacre ou rattraper son retard. En tout cas, sa perspective incitera grandement les purs grimpeurs à l’offensive dans la montagne, car ils pourraient perdre jusqu’à deux minutes sur des spécialistes de l’exercice. Cette fois, la dernière étape ne sera pas un simple pèlerinage !

 

Les 3 chiffres à retenir :

7, comme le nombre d’arrivées au sommet. Cette orgie de montagne perpétue la tradition du Tour d’Espagne, paradis des grimpeurs – cauchemar des sprinteurs, et continue de dénoter avec ses acolytes Grands Tours. Ainsi, en 2021, le Tour n’aura offert que quatre finaux en altitude à ses concurrents, préservant ainsi sa réputation d’épreuve complète. Plus généreux en spectacle de haute-voltige, le Giro, quant à lui, en a proposé 6.

40, comme le nombre de coureurs espagnols au départ de Burgos. Cette statistique n’a jamais été aussi élevée depuis 2012 (48), et contraste nettement avec celle de l’an passé (29). Cela s’explique notamment par l’invitation des basques d’Euskaltel – Euskadi et par l’hispanisation de la composition de la formation Burgos BH.L'équipe 100% espagnole alignée par la formation Euskaltel - Euskadi au départ de BurgosL’équipe 100% espagnole alignée par la formation Euskaltel – Euskadi au départ de Burgos | © FundaCiclistaEuskadi

5, comme le nombre de coureurs ayant remporté un sprint massif en Grand Tour. Il s’agit du français Arnaud Démare, du belge Jasper Philipsen, du néerlandais Fabio Jakobsen, du slovène Luka Mezgec et de l’italien Matteo Trentin. A titre de comparaison, ils étaient 6 sur le Giro et deux fois plus sur le Tour (10). Cette statistique apparaît ainsi comme une conséquence du choix des organisateurs, multipliant les étapes de montagne au détriment des parcours de plaine, qui manque d’attractivité pour les sprinteurs.

Par Jean-Guillaume Langrognet