Pour tout cycliste, du coureur au cyclosportif ainsi qu’au cyclotouriste, la sortie en groupe du week-end demeure la séance incontournable de la semaine. Celle à ne manquer sous aucun prétexte : on veut y montrer sa condition physique actuelle. Observer celle des collègues qui sont peut-être de futurs adversaires pour souvent constater qu’il reste des progrès à effectuer lors de l’ascension de la dernière côte de la journée ou du sprint final.

Si le premier objectif de cette sortie d’entraînement reste toutefois de rompre la monotonie des longues heures de selle, indispensables à l’obtention d’une bonne condition physique, elle peut aussi servir à effectuer des séances de qualité. Cependant, dans certains cas, elle peut s’avérer néfaste dans la préparation si certaines « précautions » ne sont pas prises. Voyons alors comment éviter les pièges et utiliser cette sortie pour arriver en forme.

Le groupe oui mais …ou quelques mises en garde sur les sorties collectives !

Le niveau de pratique

S’il semble à première vue toujours profitable de pouvoir rester dans « les roues » les sorties en groupe ne sont rentables que si l’on roule à une certaine intensité, c’est-à-dire avec des cyclistes proches de son propre niveau : en effet, sur des sorties en endurance, voire sur des séquences à allure spécifique « cyclosportive », il faut rouler suffisamment vite pour développer ses capacités cardio-respiratoires sans pour autant se trouver dans le rouge : en effet des sorties à 50% ne développeraient que très peu votre endurance et votre foncier tandis que des sorties répétées à plus de 80% sur toute la durée de l’entraînement vous mèneraient à moyen terme vers le surentraînement.

Alors que les premières épreuves sont encore lointaines, ciblez bien vos sorties : si votre groupe est légèrement plus faible, roulez majoritairement devant. Si ça roule plus fort laissez partir quand les autres accélèrent puis réintégrez le groupe à l’occasion de portions calmes ou de descentes. Ainsi vous aurez un travail plus efficace.

Comment rendre les séances en groupe plus profitables ?

En suivant à la lettre les vielles théories encore bien ancrées dans les pelotons du dimanche matin, nombreux sont les cyclosportifs qui ont passé un hiver studieux sur le petit plateau sans jamais dépasser 70% de leurs capacités. Bien souvent, l’aspiration aidant, ils font peu d’efforts durant les sorties collectives si bien que, victimes de « l’effet diesel », les premières accélérations du printemps font très mal. Logiquement, les contre-performances sont au rendez-vous des premières épreuves.

Au contraire, les sorties club devraient constituer un gros mixage de toutes les formes d’intensité dans une sortie à dominante foncière. C’est ce qu’on appelle « fartlek » (jeu d’allure en suédois). Pour atteindre leur but, les sorties collectives doivent être l’occasion d’effectuer :

  • un travail à dominante « cardio » dans les bosses ou lors d’accélérations contrôlées (fractions d’effort et de récupération déterminées).
  • un travail à dominante « musculaire » : surbraquet sur le plat ou dans les bosses ou, à contrario, travail de vélocité sur petit plateau. L’avantage de ce type de travail est qu’il ne modifie pas la vitesse de déplacement et qu’il permet de rester au sein du groupe tout en travaillant spécifiquement.
  • un travail à dominante « coordination » ou « vitesse » : travail d’hypervélocité, d’explosivité, de sprints courts ou prolongés au niveau des « pancartes » : le groupe pourra travailler sans se disloquer puis récupérer activement.

Déterminer le volume de chaque sortie 

Afin que chacun puisse profiter de sa séance il faut savoir définir un bon volume, en ayant à l’esprit que 4h dans les roues ou 4h seul dans le vent n’ont aucune commune mesure : selon le niveau, les disponibilités horaires et les objectifs de chacun, plusieurs tracés, et donc plusieurs groupes de niveaux pourront être constitués.

De plus, il faut bien avoir à l’esprit une certaine progressivité, nécessaire à une bonne préparation : au fil des entraînements, les sorties seront de plus en plus longues et rapides. Il faut également ajouter qu’un cyclosportif reprenant l’entraînement et un autre achevant sa phase foncière ne pourront avoir le même contenu tant en volume qu’en intensité.

2022 UEC European Championships Anadia (POR) – Junior Men Road Race Anadia – Anadia 125,9 km 22 09/07/2022 – – photo Tommaso Pelagalli/SprintCyclingAgency©2022

Comment faire des sorties en groupe les séances « clef » de votre préparation ?

Les techniques pour rouler en peloton

Le cyclisme étant, par essence, une discipline caractérisée par la présence d’autres pratiquants sur une même course ou épreuve (ce qui est encore plus vrai pour les cyclosportives), les sorties collectives seront une répétition avant la saison en ce qui concerne l’habileté à rouler en peloton.

Pour cela, plusieurs trucs et astuces sont bien connus :

  • Rouler l’un à côté de l’autre le plus près possible en se touchant les mains, les cocottes ou les coudes. Ainsi, vous apprendrez à « frotter ».
  • Se rapprocher au maximum, voire toucher la roue arrière du collègue placé juste devant soi et se dégager
  • Se faufiler au milieu du peloton en essayant de faire sa place
  • Faire des sprints en roulant côte à côte à moins d’un mètre

Savoir inclure de l’intensité intelligemment dans vos sorties de groupe 

D’une manière générale, une séance d’entraînement se caractérise par un volume et une intensité déterminés. Plus encore, quand on roule en groupe, il faut privilégier l’un ou l’autre. Si la sortie est plutôt à dominante « intensité », définissez ensemble à l’avance les fractions d’effort et de récupération afin que chacun puisse savoir où il en est dans sa séance.

Si la sortie est plutôt à dominante « volume », il faut que chacun soit en endurance, ce qui amène à différencier les niveaux de pratique. Néanmoins, on peut inclure quelques touches d’intensité (sprints « pancarte », certaines côtes abordées plus vite) si cela est fait sciemment et intelligemment : en effet, il ne faut pas que la sortie en groupe tourne à la compétition.

Quoi qu’il en soit, on peut utiliser plusieurs paramètres pour rendre bénéfique la sortie en groupe :

  • Savoir utiliser le dénivelé : par exemple, on pourra partir sur une sortie à dominante foncière avec un travail spécifique en côtes. Au niveau des séquences intensives, plusieurs formes de travail sont possibles : travail en renforcement musculaire sur un gros braquet, travail en danseuse et/ou en vélocité, alternance danseuse, position assise etc.
  • Monter progressivement en intensité : toujours dans l’optique de groupes de niveaux, on pourra travailler en « «négative split » : par exemple, monter de 5 pulsations toutes les demi-heures pour terminer la sortie sur une allure de course.

Si les sorties en groupe semblent utiles pour progresser et obtenir une bonne condition physique en vue des échéances cyclosportives, elles doivent respecter certaines règles fondamentales relatives au niveau de pratique, à la charge et au contenu d’entraînement. En outre, pour les rendre plus profitables, des contenus particuliers peuvent être intégrés aux séances. En effet, passer 3 à 4 heures voire plus à une même allure va à l’encontre de votre progression !

Alors, sortez de la monotonie de vos sorties collectives et bonne préparation !

Exemple d’une sortie collective de 3 à 4 heures mixant différentes formes d’intensité.

On remarquera qu’ici la dominante de la séance reste « l’endurance ». Il est tout à fait concevable d’intégrer des séances intensives durant la semaine après de telles séances.

  1. Échauffement sur 30’, 60 à 70% en travaillant la prise de relais
  2. 1 côte de 1 à 3 km en mettant du braquet et en privilégiant la position assise
  3. Récupération sur 10 à 20’ en travaillant l’agilité en peloton
  4. 1 sprint « pancarte »
  5. Récupération sur 10 à 20’ en travaillant l’agilité en peloton
  6. 1 côte de 1000 m maxi en essayant de tout faire en danseuse, intensité proche de 80-85%
  7. Récupération sur 10 à 20’ en travaillant l’agilité en peloton
  8. Fraction de (30 secondes vite – 30 secondes lent) ou (1 minute vite – 1 minute lent) durant 3 à 4 minutes en file indienne et en travaillant les relais
  9. Récupération sur 10 à 20’ en travaillant l’agilité en peloton
  10. 1 sprint « pancarte »
  11. Récupération sur 10 à 20’ en travaillant l’agilité en peloton
  12. 1 côte de 1000 à 2000m en attaquant, le plus vite possible pour arriver au sommet proche de sa FCMax
  13. Récupération sur 30’
  14. Travail progressif sur 20’ jusqu’à environ 90% en augmentant l’allure toute les 5’
  15. Finir sur 30’ souple

Pour résumer, bien sûr la séquence proposée n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Pour la réussite d’une telle sortie, il convient également de sensibiliser et de motiver tous les autres membres de votre groupe à l’intérêt de ce genre de sorties. Le bénéfice retiré sera bien plus important que nombre de sorties collectives qui se déroulent le dimanche matin toujours selon le même schéma : échauffement à seulement 20 km/h puis au fil des kilomètres l’allure augmente, chacun souhaitant montrer sa forme ou dissimuler sa méforme, une véritable « compétition » a ainsi lieu, souvent dans la dernière côte. La multiplication de ce genre de sorties va pourtant à l’encontre de toute progression. Alors place à votre imagination !