Les choses sérieuses n’ont pas franchement commencé que, déjà, se sont éclaircis les rangs au classement général. Pas encore entre les favoris, tous regroupés dans un mouchoir de poche, mais on dénombre de moins en moins de parasites dans les premiers rangs de la hiérarchie, ce qui facilite la lecture et la compréhension des événements. Les Apennins, massif intermédiaire emprunté avant les Alpes puis surtout les Dolomites, présentent donc cet intérêt. Dans ses cols, la sélection se fait par l’arrière et propulse à la pédale les meilleurs aux avant-postes du classement général. Mais pour l’heure il n’est pas encore question d’assister à une confrontation directe entre ceux qui convoitent une tunique rose désormais portée par Ryder Hesjedal (Garmin-Barracuda), invité à la défendre en Campanie entre Sulmona et Lago Laceno (229 km).

Sous le soleil qui accompagne quotidiennement le Tour d’Italie depuis son arrivée sur le sol transalpin mardi dernier, quatre hommes choisissent de porter une attaque dans le Piano delle Cinque Miglia (15,4 km à 4,6 %), qui ouvre l’étape sans round d’observation. Le Français Julien Bérard (Ag2r La Mondiale), dont vous pouvez retrouver la chronique presque quotidienne dans notre gazette du Giro, est de la bonne ! Il s’échappe avec Andrey Amador (Movistar Team), Tomasz Marczynski (Vacansoleil-DCM) et Miguel Minguez (Euskaltel-Euskadi). Ce n’est pas une escapade qui ira au bout, malgré l’avantage toujours conséquent que lui délivre le peloton. Cette fois encore, le gros de la troupe accordera jusqu’à neuf minutes d’avance aux quatre hommes de tête, mais il les reprendra successivement (Bérard et Minguez d’abord, Amador et Marczynski ensuite) avant le col final, dont le pied est situé à 15 kilomètres de l’arrivée.

Là, les quatre échappés du jour sont déjà classés dans les faits anecdotiques de la journée. Après 215 kilomètres plutôt rigoureux, avec une succession de montées et de descentes, la course s’engage dans la montée finale, le Colle Molella. Ce sont 9,9 kilomètres d’ascension à 5,9 %, avec un passage à 12 %, qui commencent. Au sommet, il n’y aura pas de descente mais un replat vallonné de 4,4 kilomètres jusqu’au lac devant lequel se dresse le portique d’arrivée. Comme les jours derniers quand les choses se corsent, les Astana et les Liquigas-Cannondale se postent en tête du peloton et impriment un train soutenu. C’est suffisant pour dissuader quiconque d’attaquer, insuffisant en revanche pour distancer qui que ce soit parmi les favoris. Les candidats à la victoire finale se neutralisent dans l’espoir d’une nouvelle arrivée au sprint !

Domenico Pozzovivo refait une importante partie de son retard sur les favoris.

Dans la montée au train du Colle Molella, un seul homme va oser défier le consensus des grands favoris. 2,5 kilomètres avant le sommet, à un peu moins de 7 kilomètres de l’arrivée, Domenico Pozzovivo (Colnago-CSF Bardiani) se dresse sur ses pédales. Dans un style de pur grimpeur qu’il est, le sudiste Italien creuse rapidement l’écart sur un peloton qui ne bronche pas et duquel seul Beñat Intxausti (Movistar Team) se démarquera pour se lancer à sa poursuite. Domenico Pozzovivo a déjà fait le plus dur. Il franchit le sommet avec plusieurs dizaines de secondes d’avance et doit encore tenir sur le replat. L’Italien, qui en est à son sixième Giro, y a régulièrement été cité parmi les outsiders mais a souvent joué de malchance (il n’a plus été en mesure de boucler l’épreuve depuis sa 9ème place finale en 2008), connaît l’enjeu de ce final. Le tout frais vainqueur du Tour du Trentin s’en va chercher son premier succès d’étape dans le Tour d’Italie.

Au-delà de ses énormes qualités athlétiques qui en font sans conteste l’un des meilleurs grimpeurs du peloton, Domenico Pozzovivo est un coureur très attachant. Un garçon de 29 ans brillant dans bien des domaines, diplômé en économie d’entreprise voici deux ans et pianiste virtuose qui ne manque pas une occasion de s’installer derrière un piano lorsqu’un hôtel dispose d’un instrument qu’il maîtrise autant que l’art du pédalage en montagne. Seul ombre au tableau de Pozzovivo, ses lacunes contre la montre, qui lui avaient valu de céder 1’42 » jusqu’alors. Son succès d’étape, obtenu avec 27 secondes d’avance sur le peloton, assorti aux 20 secondes de bonification offertes au vainqueur, lui permet de refaire une partie de son retard. Le voilà désormais 13ème à 55 secondes. A égalité ou presque avec les autres candidats au maillot rose.

Le maillot rose, justement, les favoris ne semblent pas pressés de le conquérir. Comme s’il véhiculait un mal mystérieux, après s’être déchaîné sur Taylor Phinney (BMC Racing Team), avoir scié les jambes de Ramunas Navardauskas (Garmin-Barracuda) et rapidement quitté les épaules d’Adriano Malori (Lampre-ISD), il pèse lourd cette fois sur Ryder Hesjedal. Parmi les meilleurs en bosse hier, le Canadien est en souffrance aujourd’hui. Il s’accrochera néanmoins dans le Colle Molella pour préserver la première place du classement général. Mais Joaquim Rodriguez (Team Katusha) s’en est grandement rapproché. 3ème de l’étape et donc bénéficiaire de 8 secondes de bonification, l’Espagnol remonte d’une place au classement général, 2ème, et n’est déjà plus qu’à 9 secondes du premier rang.

Demain lundi, retour au calme entre San Giorgio nel Sannio et Frosinone (166 km), dont l’approche sera compliquée par une petite côte.

Classement 8ème étape :

1. Domenico Pozzovivo (ITA, Colnago-CSF Bardiani) les 229 km en 6h06’05 » (37,5 km/h)
2. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) à 23 sec.
3. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 27 sec.
4. Thomas De Gendt (BEL, Vacansoleil-DCM) m.t.
5. Dario Cataldo (ITA, Omega Pharma-Quick Step) m.t.
6. Damiano Caruso (ITA, Liquigas-Cannondale) m.t.
7. Gianluca Brambilla (ITA, Colnago-CSF Bardiani) m.t.
8. Bartosz Huzarski (POL, Team NetApp) m.t.
9. José Rujano (VEN, Androni Giocattoli) m.t.
10. John Gadret (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.

Classement général :

1. Ryder Hesjedal (CAN, Garmin-Barracuda) en 32h23’25 »
2. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) à 9 sec.
3. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) à 15 sec.
4. Roman Kreuziger (TCH, Astana) à 35 sec.
5. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) m.t.
6. Ivan Basso (ITA, Liquigas-Cannondale) à 40 sec.
7. Damiano Caruso (ITA, Liquigas-Cannondale) à 45 sec.
8. Dario Cataldo (ITA, Omega Pharma-Quick Step) à 46 sec.
9. Frank Schleck (LUX, RadioShack-Nissan) à 48 sec.
10. Eros Capecchi (ITA, Liquigas-Cannondale) à 52 sec.

Classement par points :

1. Matthew Goss (AUS, Orica-GreenEdge) 65 pt
2. Mark Cavendish (GBR, Team Sky) 55 pt
3. Miguel-Angel Rubiano (COL, Androni Giocattoli) 36 pt
4. Domenico Pozzovivo (ITA, Colnago-CSF Bardiani) 35 pt
5. Joaquim Rodriguez (ESP, Team Katusha) 30 pt
6. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) 29 pt
7. Geraint Thomas (GBR, Team Sky) 26 pt
8. Taylor Phinney (USA, BMC Racing Team) 25 pt
-. Geoffrey Soupe (FRA, FDJ-BigMat) 25 pt
10. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) 24 pt

Classement de la montagne :

1. Miguel-Angel Rubiano (COL, Androni Giocattoli) 24 pt
2. Michal Golas (POL, Omega Pharma-Quick Step) 16 pt
3. Paolo Tiralongo (ITA, Astana) 9 pt
-. Domenico Pozzovivo (ITA, Colnago-CSF Bardiani) 9 pt
5. Cesare Benedetti (ITA, Team NetApp) 7 pt
6. Alfredo Balloni (ITA, Farnese Vini-Selle Italia) 6 pt
7. Fumiyuki Beppu (Orica-GreenEdge) 5 pt
-. Beñat Intxausti (ESP, Movistar Team) 5 pt
-. Michele Scarponi (ITA, Lampre-ISD) 5 pt
10. Frank Schleck (LUX, RadioShack-Nissan) 3 pt

Classement des jeunes :

1. Damiano Caruso (ITA, Liquigas-Cannondale) en 32h24’10 »
2. Rigoberto Uran (COL, Team Sky) à 8 sec.
3. Sergio-Luis Henao (COL, Team Sky) à 25 sec.
4. Peter Stetina (USA, Garmin-Barracuda) à 38 sec.
5. Tom-Jelte Slagter (PBS, Rabobank) à 1’41 »
6. Gianluca Brambilla (ITA, Colnago-CSF Bardiani) à 1’56 »
7. Diego Ulissi (ITA, Lampre-ISD) à 2’38 »
8. Jon Izaguirre (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 4’58 »
9. Tanel Kangert (EST, Astana) à 8’15 »
10. Nelson Oliveira (POR, RadioShack-Nissan) à 9’17 »

Classement par équipes :

1. Liquigas-Cannondale (ITA) en 95h56’59 »
2. Astana (KAZ) à 27 sec.
3. Garmin-Barracuda (USA) à 45 sec.
4. Lampre-ISD (ITA) à 1’25 »
5. Movistar Team (ESP) à 1’30 »
6. BMC Racing Team (USA) à 2’01 »
7. RadioShack-Nissan (LUX) à 2’02 »
8. Omega Pharma-Quick Step (BEL) à 2’55 »
9. Vacansoleil-DCM (PBS) à 4’05 »
10. Rabobank (PBS) à 4’18 »