Il est là le premier grand rendez-vous du 101ème du Tour de France ! De retour sur le continent la veille avec une étape courte entre Le Touquet et Villeneuve-d’Ascq, le peloton abordera cette 5ème étape avec une appréhension légitime. Les Flandriens ont le sourire, les grimpeurs beaucoup moins. Il faudra digérer pas moins de 15,4 kilomètres de pavés, répartis sur neuf secteurs dans les 70 derniers kilomètres. On peut d’ores et déjà écrire que les visages seront fermés en ce mercredi 9 juillet. Il ne sera pourtant pas forcément facile pour les coureurs de se concentrer au départ de Ypres où le public devrait être présent en masse. Fleuron de l’architecture flamande, la ville a été en partie détruite lors de la Première Guerre Mondiale. On commémorera d’ailleurs le centième anniversaire de la bataille des Flandres qui a fait plus de 250 000 morts.

C’est une toute autre bataille qui attendra le peloton ce jour-là sur ces 156 bornes. Ce ne sont pas les 85 premiers kilomètres qui devraient changer la face du Tour. La première moitié du tracé visite la Belgique et permet de revenir dans le Nord, après un premier passage la veille. Elle sera propice à une échappée matinale qui, dans le pire des cas, abordera en tête les premiers secteurs pavés, dans le meilleur, qui se disputera la victoire d’étape, compte tenu des aléas que peut présenter une telle étape. Les hommes de classiques se sentiront chez eux avec un passage à proximité de Wevelgem et du mythique vélodrome de Roubaix.Mais la course véritable débutera lors du premier secteur pavé, à Gruson, petit village où la grande bourgeoisie lilloise a pris ses quartiers.

Les coureurs arriveront en provenance de Chéreng avant de tourner à gauche pour découvrir ces premiers pavés. Emprunté, comme tous les autres secteurs, dans le sens inverse de celui de Paris-Roubaix, ce premier tronçon n’est qu’une mise en bouche de 1100 mètres, tout en ligne droite. Qu’on se le dise, ce ne sera pas le secteur le plus compliqué de la journée, bien au contraire. Le pavé est en bon état et sur chaque côté, les bandes sont relativement propres, mais présentent toutefois un risque de crevaison. Une fois sortis, les coureurs n’iront pas chercher le secteur du Carrefour de l’Arbre situé à quelques mètres de là. Pour se remettre de ses émotions, le peloton aura une grosse dizaine de kilomètres de répit qui le fera passer dans la plaine de Bouvines pour commémorer les 800 ans de la bataille remportée par Philippe Auguste.

Le deuxième secteur pavé reliant Ennevelin à Pont-Thibaut sera bien plus mauvais que le premier. Celui-ci sera court (1400 mètres), très étroit, mais le pavé est bien plus mauvais. Qui plus est, il était sale lors de notre reconnaissance en raison des travaux agricoles puisqu’il est emprunté par les tracteurs qui récoltent les chicons (comprenez les endives) et les pommes de terre. S’en suivra quasi immédiatement le terrible secteur de Mons-en-Pévèle, régulièrement classé cinq étoiles sur l’Enfer du Nord. Mais celui-ci ne sera pas emprunté en intégralité. Après 1000 mètres en faux plat descendant, les pros ne tourneront pas à gauche pour chercher la suite du secteur, mais continueront tout droit.

Au sortir de ce troisième secteur, le peloton sera déjà bien écrémé et pourtant, ceux qui n’ont pas l’habitude de fréquenter ces chemins cabossés du Nord, n’en seront pas au bout de leurs peines. Les deux secteurs qui suivront (Bersée et Orchies à Beuvry-la-Forêt, dit secteur Marc Madiot) ne présentent pas de grande particularité. On notera cependant que le premier, annoncé à 1400 mètres, nous a paru un peu plus long. Les choses se décanteront encore un peu plus avec le sixième tronçon pavé reliant Sars et Rosières à Tilloy-lez-Marchiennes. Il faudra être bien placé à l’entame dès 2400 mètres de pavés, et un ennui mécanique dans le secteur précédent pourrait provoquer la perte définitive du coureur concerné. D’autant que, dans la foulée, suivra le secteur de Brillon à Warlaing (1400 mètres).

À ce moment de la course, il restera une vingtaine de kilomètres, mais encore deux secteurs pavés, et pas des moindres. D’abord celui de Wandignies-Hammage à Hornaing. Sa difficulté viendra de sa distance (3700 mètres !), mais pourrait aussi venir du vent qui venait de face le jour de notre reco. Situé à sept kilomètres de l’arrivée, le secteur de Hélesmes à Wallers, dit Pont Gibus, sera le neuvième et dernier tronçon pavé de la journée. Ouf ! Pour le clin d’oeil, notons qu’il y aura un passage à niveau sur chacun de ces secteurs. Depuis 2006, trains et Paris-Roubaix ne font pas nécessairement bon ménage. Mais on peut penser qu’ASO a retenu la leçon et qu’aucun coureur ne trouvera sur son chemin une barrière fermée, contrairement à Vladimir Gusev, Leif Hoste et Peter Van Petegem il y a sept ans.

La dernière question sera de savoir quelle sera la situation de course au terme de ce neuvième secteur pavé. Difficile de prédire qui pourra encore prétendre au succès d’étape ce jour-là. On pariera volontiers sur un classicman-sprinteur du type de Thor Hushovd, vainqueur à Arenberg en 2010, de Tom Boonen s’il participe à la Grande Boucle, ou de Peter Sagan, même si le Slovaque n’avait pas brillé sur sa seule participation à Paris-Roubaix chez les pros (86ème). L’autre interrogation viendra de la météo. Un Paris-Roubaix sec n’est jamais le même qu’un Paris-Roubaix humide et il faudra également prendre en compte la direction du vent. Les coureurs devraient abandonner le 39 dents pour un 53/46 et probablement 15 à l’arrière. Une certitude néanmoins : vous ne vous ennuierez pas devant votre écran ou sur le bord de la route le 9 juillet prochain !