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Alain, quel premier bilan faîtes-vous du Tour de France 2018 ?
Je pense que le bilan de notre Tour est positif. On a gagné une belle étape, on a porté quelques jours le maillot de meilleur grimpeur, donc c’est pas mal. C’est vrai que Mollema n’a pas fait ce qu’on espérait, il a essayé d’aller chercher une étape et il a fait des places d’honneur. Mais nous avons été présents, on nous a vu. Stuyven a été près de gagner une étape, Julien Bernard a montré qu’il était solide, comme il l’avait déjà montré sur ses précédents Grands Tours, il a confirmé. C’est ce que j’appelle la solidité, il est en bonne santé, il n’est jamais malade.

Vous connaissez bien John Degenkolb. Diriez-vous que c’est son grand retour après deux ans difficiles ?
Oui, il a montré de belles choses. Déjà cette grande victoire, car gagner l’étape des pavés sur le Tour ce n’est pas rien, on a vu qu’il a battu des costauds. Van Avermaet et Lampaert ne sont pas des amateurs. Après je pense qu’il a encore un déficit dans le placement. Dans plusieurs sprints, s’il avait réussi à tenir la roue de Stuyven, il aurait fait encore mieux.

Qu’est-ce qui explique que l’on ait eu, cette année, une telle déperdition de sprinteurs ?
La difficulté du parcours et la chaleur certainement. C’était dur, très dur. On n’a pas eu beaucoup d’étapes pour souffler un peu, c’étaient des parcours difficiles.

On a aussi l’impression d’une très grande intensité dans la première semaine, où les équipes de sprinteurs mettent la pression très fort…
Oui, mais c’est normal. C’est vieux comme le monde. Mais sur la première étape de montagne, ils ont laissé l’échappée partir, et le gars qui était le plus fort devant est allé gagner.

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Pensez-vous que Bauke Mollema a touché ses limites et que viser un top 3 paraît au-dessus de ses possibilités ?
Sur ce que l’on a vu il y a deux ans où il était encore deuxième au général avant sa chute, on peut considérer qu’il peut viser une belle place au général. Après, comme beaucoup, il a été touché à l’étape de Roubaix. Il a pu continuer et il a géré ses étapes, avant d’essayer de se glisser dans des échappées pour essayer d’en remporter une. On voit que c’est très difficile car il faut dépenser beaucoup d’énergie pour aller à l’avant et ensuite il faut être le plus fort. Il y avait plein de bons coureurs, comme Yates, qui n’étaient plus dans le jeu du général et qui se retrouvaient dans les échappées.

Quel est votre recul sur la formule de huit coureurs par équipe ? On parlait plutôt de sécurité…
Peut-être un peu plus de sécurité, on voit que le peloton est moins gros. On a vu que passer de huit à sept en début de saison changeait un peu. Là, passer de neuf à huit, quand on voit Sky qui a le pouvoir d’avoir les meilleurs avec eux… Ce n’est pas nouveau, on dit que la Sky écrase le Tour mais elle gagne avec une ou deux minutes, l’an dernier Froome gagnait avec une minute et quelques sur Uran. Hinault écraisait le Tour, Merckx écrasait le Tour. Je pense que c’est une question de budget. Il est bien supérieur donc ils ont les meilleurs coureurs.

Maintenant, les rouleurs-grimpeurs dominent en roulant au train en montagne. Diriez-vous que nous sommes partis pour une longue domination de ce type de coureurs ?
Cela a toujours été comme ça. Indurain était un rouleur qui gérait dans les cols, Hinault était un bon rouleur qui était capable d’avoir un très bon rythme dans les cols, Anquetil c’était pareil. Les vainqueurs du Tour ce sont les gars qui font la différence dans les chronos et qui gèrent en montagne. Ca a toujours été comme ça.

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On avait présenté Bardet comme un contre-exemple. Cela veut dire que vous ne croyez pas à ce que ce type de coureur puisse gagner ?
On a vu que Bardet a fait un bon chrono le dernier jour, il s’est moins mis la pression. Il perd presque deux minutes, mais c’est normal, il peut récupérer du temps dans la montagne. Mais l’équipe Sky est forte, l’équipe d’Indurain était forte, celle d’Hinault aussi. Les gens qui attaquent des grandes séries c’est toujours le même principe.

Autour de qui votre équipe va tourner pour la Vuelta ?
Autour de Mollema, avec Felline, Nizzolo, on va avoir une bonne équipe.

Il y avait cette année la question de l’enchaînement Giro-Tour avec une semaine en plus de récupération. Pensez-vous que c’est possible de jouer la victoire sur les deux ?
Les cas Froome et Dumoulin montrent que cela ne pose pas de problèmes. Le problème qu’ils ont eu c’est qu’ils sont tombés sur un super Thomas, qui ne vient pas de nulle part. C’est un coureur que j’aurais toujours aimé diriger, je pense que c’est le surdoué de sa génération. Très peu de coureurs sont capables de remporter toutes les courses qu’il a gagné. J’ai entendu des gens surpris de voir Castroviejo monter les cols comme ça, mais c’est pareil il ne vient pas de nulle part. Ce gars là a été champion d’Europe du chrono donc il est capable de rouler longtemps à vive allure.

Alberto Contador n’a pas été remplacé dans votre effectif cette saison. On annonce Richie Porte chez vous, est-ce que ce sera un axe majeur du recrutement pour l’année prochaine de trouver un coureur de ce type ?
Oui, Richie Porte n’est pas un tout jeune non plus mais c’est une valeur sûre. Quand il ne tombe pas il est toujours présent. Je pense qu’il y a deux ans il a perdu le podium sur sa crevaison le deuxième jour. Richie Porte grimpe bien, va bien sur les chronos donc il doit faire un gros Tour de France un jour c’est sûr.