José-Luis, l’équipe Movistar était venue pour gagner le Tour de France avec Nairo Quintana, elle n’y est pas parvenue. Ce constat affadit-il le bilan ?
Nous n’avons pas gagné le Tour mais le bilan reste positif. Nous mettons Nairo Quintana sur le podium, 3ème, pour la troisième fois en trois participations. Alejandro Valverde de son côté prend la 6ème place du classement général. Nous remportons une étape à Morzine avec Ion Izagirre. Et nous nous adjugeons en plus le classement par équipes. C’est un bilan positif que beaucoup d’équipes nous envient. Maintenant, c’est vrai que notre objectif avant tout était de gagner le Tour. Nous ne sommes pas parvenus à faire ce que nous souhaitions, mais il ne faut pas être déçus. Quand on pose les choses à plat, on se rend compte qu’on a fait un super Tour, tant sur le plan individuel que collectif.

Quand avez-vous compris que Nairo Quintana ne serait pas en mesure de vaincre Chris Froome ?
Nous l’avons intégré au lendemain de la seconde journée de repos, après l’étape de Finhaut-Emosson. Là, on a compris que Nairo n’était pas super. Il a tenté de suivre Chris Froome sur son démarrage avant de marquer le pas et d’être lâché par les autres candidats au podium. Dès lors on savait que ce serait compliqué. C’est pourquoi obtenir la 3ème place avec lui, dans ces conditions, reste en définitive un très bon résultat.

On a évoqué des soucis d’allergie, qu’en est-il ?
Nous n’en savons rien, pour tout dire. Nous avons prévu de faire passer à Nairo Quintana des examens médicaux après le Tour de France pour déterminer si quelque chose ne va pas. Peut-être qu’on découvrira alors la cause de son problème car sur ce Tour de France, à notre connaissance, il n’avait rien de spécial.

Comment Nairo Quintana, dont l’approche du Tour semblait optimale, a-t-il accepté cette situation ?
Intérieurement, c’est sûr que ça n’a pas été facile pour lui d’admettre qu’il était en situation d’infériorité. Nairo est un leader, son truc à lui c’est de gagner. Il était venu là pour ça, et repartir avec une 3ème place, ce n’est pas ce qui le contente. Maintenant, il faut qu’il prenne conscience qu’il ne peut pas arriver chaque année sur le Tour au même niveau. Et que pour un peu que de petites choses viennent enrayer la machine, tout devient plus compliqué. Au final, il est arrivé à prendre une place sur le podium, comme il l’a fait sur chacune des courses par étapes qu’il a disputées cette saison, c’est déjà une bonne chose.

Au-delà des problèmes rencontrés par Nairo Quintana, il a semblé complexe de mettre en défaut le Team Sky. N’y avait-il rien à faire face au rouleau compresseur ?
Dans les Alpes, nous avons essayé de provoquer des actions offensives avec Alejandro Valverde pour user les équipiers de Chris Froome et tenter de l’isoler. Mais Alejandro n’était pas assez fort pour mettre en danger le Maillot Jaune sur ses attaques. Et Nairo n’avait pas les moyens derrière de renchérir. Si tu n’as pas de super jambes, tu ne peux pas mettre en difficulté un coureur comme Chris Froome. Ça rendait d’autant plus compliqué une action de notre part.

Et s’il avait été dans la forme qu’il convoitait, quelle aurait été la stratégie idéale pour battre Chris Froome ?
Vous savez, avec des si… Les choses se sont passées ainsi, ça ne sert à rien d’en parler autrement. Il faut se pencher sur l’instant présent, et cette année nous n’étions pas en mesure de battre Chris Froome. Maintenant, s’il est encore trop tôt pour envisager la suite des événéments en 2017, c’est sûr qu’un mec comme Nairo Quintana songe déjà à une manière de s’y prendre. Il a fait trois fois le podium, 2ème en 2013, 2ème en 2015, 3ème en 2016, et il veut toujours gagner le Tour. Penser à une autre course dans ces conditions, ce n’est pas possible. Nairo a toujours en tête le Tour de France. Il fera le maximum pour revenir et tenter de le gagner.

Mais vous savez bien à quoi vous en tenir vis-à-vis d’une équipe comme Sky. Que faudra-t-il faire pour la mettre en péril ?
C’est une autre question. Battre Sky, c’est difficile. Ils ont de meilleurs coureurs, or nous n’avons pas les mêmes moyens financiers pour nous mettre à leur niveau. On essaie malgré tout de toujours aligner une très belle équipe autour de Nairo Quintana. Nous remportons le classement par équipes, ça prouve bien que le collectif n’était pas à remettre en question. Le groupe a toujours été là. Simplement, vis-à-vis de Froome, Nairo n’était pas au même niveau.

Dans trois semaines, ce sera déjà le Tour d’Espagne. Et une opportunité pour Nairo Quintana d’aller chercher une belle consolation ?
Pour nous, c’est obligatoire de mettre la meilleure équipe sur la Vuelta. Nairo Quintana, normalement, en sera. L’ambition, toujours, c’est de gagner le Tour d’Espagne. Maintenant, c’est toujours pareil. Ça peut marcher comme ça peut ne pas fonctionner du tout. Quoi qu’il en soit, nous ferons le maximum pour avoir une très bonne équipe au départ de la Vuelta et essayer de la gagner.

Propos recueillis à Chantilly le 24 juillet 2016.