Emmanuel, l’équipe Bretagne-Séché Environnement a pris une nouvelle dimension depuis sa participation au Tour de France. Qu’est-ce qui a changé ?
Le 5 juillet 2014, nous sommes devenus une équipe cycliste professionnelle au sens où l’entend le grand public. Ça a été un réel booster. Nous avons mis du temps à y parvenir mais ça valait le coup d’attendre. Nous n’étions peut-être pas mûrs au préalable. Nous avons su animer l’épreuve à notre manière en réalisant 1600 kilomètres d’échappée. Nous avons bouclé le Tour à neuf et sommes rentrés avec le maillot jaune de la sympathie. Brice Feillu a quant à lui su pallier l’absence de notre leader Eduardo Sepulveda en entrant dans le Top 25, 16ème à Paris. Désormais, avoir fait le Tour de France nous donne une autre dimension mais aussi un nouveau statut et de nouvelles responsabilités. A nous de prolonger cette belle dynamique en faisant encore mieux en 2015.

D’ores et déjà Bretagne-Séché Environnement sera au départ de la prochaine édition du Tour de France. Comment allez-vous procéder à la sélection de vos coureurs ?
Nous allons procéder exactement comme les organisateurs l’ont fait : en annonçant leur sélection le plus tôt aux coureurs. Aux environs de Paris-Nice, nous devrions déjà être en mesure de communiquer au maximum quatre noms. Nous échelonnerons ensuite notre sélection jusqu’au Tour de France pour garder peut-être une réserve jusqu’au Championnat de France. Sauf si les neuf font l’unanimité. Mais je sais que l’an passé le timing n’a pas forcément été respecté. Nous avions besoin de voir le comportement en montagne, dans les stages, la faculté de récupération, l’encaissement de charges de travail…

L’effectif 2015 de Bretagne-Séché Environnement étant plus dense que celui de 2014, cela risque de compliquer encore la donne au moment de trancher ?
C’est vrai que l’année dernière le choix avait été plus facile à faire, mais je suis tenté de dire que ça fait partie du jeu. A partir du moment où on fait une sélection, il y a obligatoirement des déçus. Il y a en général très peu de différence entre le neuvième coureur sélectionné et le premier non-sélectionné… Après, c’est un choix sportif que je veux collégial. Je veux que tous les directeurs sportifs et l’entraîneur y participent pour faire le moins d’erreurs possible.

Qui est assuré de faire partie du groupe qui disputera le Tour ?
Personne à ce jour. Ce qui est sûr et certain, c’est qu’il f audra aller chercher sa sélection. Aucun garçon n’arrive chez nous en terrain conquis. Personne ne peut dire qu’il ne marchera pas en début de saison mais qu’il fera le Tour de France. Le briefing général du mois de décembre a plus qu’été clair : nous souhaitons avoir un bon fonctionnement dès le début de saison pour gagner sa sélection dès le départ. Ceux qui auront bien démarré seront peut-être laissés un peu au repos de manière à bien préparer le Tour de France.

Il n’y a pas que le Tour de France, quid du reste de la saison ?
Effectivement, le Tour est une grande chose dans l’année car l’événement numéro un au monde pour toutes les équipes, mais nous n’occultons pas le reste du calendrier qui passera pour nous par d’autres rendez-vous majeurs : Paris-Nice, le Tour de Catalogne, le Tour de Turquie, le Tour de Bretagne, le GP Ouest-France et bien entendu toutes les organisations de notre chère Bretagne.

Mais pas de Critérium du Dauphiné. Est-ce handicant dans la préparation du Tour de France ?
Non, c’est un choix de l’équipe. A ce moment-là, nous serons en stage pour peaufiner les derniers petits réglages pour arriver en grande forme au Tour de France. Les organisateurs avaient des choix à faire, et pour nous c’était compliqué de faire à la fois Paris-Nice et le Critérium du Dauphiné. Nous leur avons signifié que nous préférerions être en priorité sur Paris-Nice, et ASO a respecté notre desiderata. Maintenant, si ça avait été l’inverse, nous nous serions adaptés. Nous ferons Paris-Nice, c’était notre souhait, car cela nous oblige à avoir un bon groupe dès le début de saison et d’avoir une réelle motivation pour cette course. Ce sera le premier grand rendez-vous. Ça fera obligatoirement bien démarrer la saison.

Quelles y seront vos ambitions ?
Nous avons la chance d’avoir un garçon comme Eduardo Sepulveda, qui vient de finir 4ème du Tour de San Luis et qui affectionne Paris-Nice. Notre objectif, c’est un Top 10. Lui voit plus haut. Maintenant, c’est le plus haut niveau mondial. Ça ressemble au Tour de France sur une semaine. A Eduardo d’assurer et à ses équipiers de le placer au mieux au pied des cols et là où il devra s’exprimer.

L’équipe Bretagne-Séché Environnement reste à ce jour incertaine quant à l’après 2015. Où en êtes-vous à ce sujet ?
Tout le monde est en fin de contrat. Mais nous préparons bien évidemment déjà 2016. J’étais en réunion mardi pour avoir de l’information de la part de mes partenaires. Aujourd’hui, tout le monde est rassurant, nous n’avons pas de grands soucis à se faire bien que je ne sois pas totalement rassuré pour la simple et bonne raison que les signatures ne sont pas encore là. Mais nous avons un pool de partenaires fidèles avec Bretagne et Séché Environnement, et un nouveau venu qui s’appelle Fortuneo, sur lequel beaucoup spéculent déjà pour l’avenir de l’équipe.

L’établissement bancaire dont on retrouve déjà les couleurs sur le maillot pourrait-il s’engager davantage ?
C’est inscrit sur notre maillot, maintenant il faut leur donner envie d’avoir envie de rester dans le cyclisme. Aujourd’hui ils y entrent sur la pointe des pieds, même si Fortuneo est très proche sur le plan financier de nos deux gros partenaires. Son investissement est à équivalence de Bretagne et Séché Environnement. A nous de leur donner de la matière, d’avoir un bon comportement d’équipe, une très bonne visibilité, une très bonne représentativité. Je crois qu’on sait de plus en plus et de mieux en mieux le faire. Les signatures, maintenant, se feront dans la première moitié de saison.

Votre discours est très positif, voire même offensif. Vous n’hésitez pas à voir au-delà de 2016…
Nous avons de l’ambition et s’approcher du plus haut niveau en 2017 en fait partie. Je ne sais pas si ça se réalisera mais aujourd’hui il faut se mettre un programme. Dans toutes les entreprises, il y a une stratégie d’avenir. Je vois à n+3 avec une progression cohérente, structurée, et petit à petit l’équipe devient de plus en plus belle et de plus en plus attrayante pour les médias, pour les partenaires, pour le public. Nous rencontrons de plus en plus d’intérêt. A nous de persévérer dans cette lignée.

Propos recueillis à Rennes le 28 janvier 2015.