Jean-Luc Gatellier est grand reporter à L’Equipe. Il a couvert une vingtaine de Tours de France et sa plume n’a d’égale que sa discrétion. Discret certes, mais rien ne lui échappe. Pas même le Prix Jacques Goddet 2011 qui récompense chaque année le meilleur article sur le Tour de France.

Cadel Evans n’est plus dans l’actualité comme coureur cycliste mais bien d’autres ont pris sa place et Jean-Luc Gatellier retrace la saison 2016 par chapitres, à commencer par celui du moteur dans le cadre de la jeune Belge dont on taira et oubliera le nom, sans être dupes qu’elle paie pour d’autres qui sont passés près ou pas, selon que les contrôles étaient réels ou supposés. Après le cyclo-cross, et même bien avant la fin de saison des labours, vient la saison route sur tous ces nouveaux continents que l’UCI entend évangéliser au cyclisme : l’Australie, l’Argentine, le Moyen-Orient, c’est parti pour une saison pleine de rebondissements, très bien relatés par l’auteur.

Les chapitres forts sont évidemment liés aux monuments, à commencer par celui consacré aux classiques, dont Arnaud Démare (qui écrit la préface) a superbement pris la place de Laurent Jalabert comme vainqueur français de la Primavera. Controversé, certes, mais la double page de liaison consacrée au champion picard nous remémore ses débuts, sa famille cycliste, ses attentes, et nous rappelle quelques chiffres au passage comme la puissance dégagée sur les 30 dernières secondes sur la Via Roma. Pour éviter une trop longue litanie de faits cyclistes liés aux événements au fil du calendrier, Jean-Luc Gatellier a la bonne idée de parsemer de tels chapitres dans le calendrier. Citons entre autres Nicolas Portal qui a vécu l’éclosion de Chris Froome tout en prenant lui aussi son envol comme directeur sportif qui gagne. Ou encore Coutances, le Tour de France, Albert Londres et les « forçats de la route » quand Contador est près de jeter l’éponge lui aussi.

Plus inattendu dans ces tranches de vie du vélo, on trouve Blaise Chauvière, toujours la banane, qui vit son rêve éveillé et qui donne du bonheur aux gens, car lui a le bonheur d’en être. Tour de France oblige, on évoque dans ces doubles pages le travail de Romain Bardet pour arriver là où il est, sur la 2ème marche du podium du Tour, à sa quatrième expérience, à suivre… Dernière séquence en double et transit vers la fin de saison, l’épisode AUT de Bradley Wiggins sur les années 2011/2012. A quand un livre d’or de l’année où l’on évoquera plus ce chapitre triche, qu’il soit chimique ou technologique.

L’année 2016 est ainsi revisitée et chacun se replongera avec plaisir dans ses souvenirs. Le premier monument victorieux de Peter Sagan au Tour des Flandres, ce qu’aucun porteur du maillot irisé n’était plus parvenu à faire depuis dix ans. Pas de cinquième pour Tom Boonen à Roubaix, mais une quatrième Flèche Wallonne dans le mille pour Alejandro Valverde à Huy, avant de s’infuser trois Grands Tours, dont le Giro – une première – avec podium au passage. Le Tour de France a naturellement la part belle, la confirmation de Romain Bardet, le gâchis de Thibaut Pinot, trop tôt en forme sans doute, et le troisième succès, programmé, de Chris Froome. Côté Vuelta, c’est « Kingtana » qui déboule dix-neuf ans après Lucho Herrera, et initie une fin de saison toute colombienne avec Fernando Gaviria à Tours, Esteban Chaves sur la classique des feuilles mortes, après ses réussites sur le Giro et la Vuelta. On attend confirmation sur le Tour de France pour Chaves, et encore plus pour Nairo Quintana à qui il manque ce seul Grand Tour. Mais pas n’importe lequel.

Les Français sont naturellement à l’honneur sur les Jeux où Julian Alaphilippe est passé tout près d’une médaille, erreur de jeunesse, mais le champion olympique Greg Van Avermaet est bien placé pour savoir qu’il faut apprendre à gagner, en perdant quelquefois, et en se posant les bonnes questions pour y apporter les réponses adéquates. Le talent est là, confer la Californie ou son premier Tour de France. Voire les Championnats d’Europe avec l’argent pour confirmer.

Vert de rage forcément, Julian Alaphilippe, deux fois 2ème derrière l’intouchable Peter Sagan, encore en vert à Paris sur le Tour, premier champion d’Europe de l’Histoire à Plumelec, et 2ème titre de champion du monde au Qatar cette fois. Au bout d’une journée de dupes où les Français « aux comportements de footballeurs » ont dégoûté à tout jamais Bernard Bourreau de ce métier qu’il a si bien mené.

Cette année du cyclisme est le cadeau idéal pour ceux, celles qui aiment le vélo. De beaux textes, de belles illustrations, et un bouquin qu’on a plaisir à lire chapitres après chapitres. 130 pages plus toutes les archives, et vous serez incollables, prêts à attaquer 2017 sans attendre. Un livre qu’il faut avoir dans sa bibliothèque, comme le bon vin, il vieillira bien.

« Livre d’or du cyclisme 2016 » (Editions Solar) par Jean-Luc Gatellier. 136 pages. 29,99 €. – www.solar.fr