Jesus Herrada au sommetJesus Herrada au sommet | © Mont Ventoux Dénivelé Challenge

Nicolas Garcéra, tu as, tu avais 2 épreuves cyclistes sur le Ventoux, une course pro, une cyclo, comment as-tu, avez-vous anticipé, accompagné la situation ?

Nous avons anticipé les prises de décision pour la GF, car elle mobilise déjà 2800 inscrits venant de 35 pays différents, et il y a plus d’inertie dans la lourde logistique. Nous avions stoppé préventivement les inscriptions au début du mois de Mars, à partir du moment où nous avons eu des doutes quant aux rassemblements de masse, de manière à pas « prendre en otage » plus de passionnés, sans certitude. Nous avons étudié les possibilités de maintien, de report, d’annulation, tout au long des trois dernières semaines.

D’ores et déjà le Santini Ventoux est reportée au 6 Septembre, pourquoi cette date ? et quid de la Deniv Challenge ? 

Nous avons fait le choix d’un report, et la date retenue est le 06 septembre. Pourquoi ? D’une part car c’est la seule date qui permettait d’aller au Ventoux en Septembre/Octobre sans empiéter sur d’autres manifestations cyclistes ou automobiles déjà prévues dans le massif. Il y avait aussi le 13, mais nous ne souhaitions pas nous positionner le même jour que la Ventoux Sud, par respect pour les organisations locales. Enfin, le 06 Septembre était (avant d’autres reports qui s’y sont greffés à la suite comme la Marmotte) la « moins pire des dates » qu’il restait sans aller en face de la Drômoise ou les Bosses, deux grosses épreuves déjà légitimes dans leurs dates historiques, et qu’il faut respecter.

Pour la cyclo, sauf la date, rien ne change ? 

Exactement, tout est décalé uniquement. Le salon associé à l’épreuve est également maintenu. Tout ceci bien sûr sous réserve des décisions gouvernementales concernant le déconfinement.

En ce qui concerne la course pro, quelle est la situation ?

Le processus est un peu différent. D’une part ce n’est pas considéré comme un rassemblement de masse, avec plusieurs milliers de personnes (nous ne sommes pas une étape du Tour de France, nous sommes un jour de semaine en Juin). D’autre part, mobiliser quelques centaines de personnes (cyclistes, staffs et organisateurs) pourraient très bien rentrer dans les quotas acceptés dans un déconfinement, d’ici 2 mois à date de la course pro. C’est pourquoi nous attendons encore un peu. Le cyclisme professionnel pourrait avoir besoin d’épreuves comme la nôtre en vue d’une reprise progressive de la compétition et la perspective de grand Tour. 

Les organisateurs de la DC Mont VentouxLes organisateurs de la DC Mont Ventoux | © Mont Ventoux Dénivelé Challenge

Les courses pro sont annulées jusqu’au 1er juin, et l’UCI semble annoncer des « mises à jour » tous les 15 jours, penses-tu que la Deniv Challenge fasse partie de la prochaine séquence ? 

Nous sommes bien évidement en rapport bihebdomadaire avec les instances dirigeantes, avec les équipes, avec le ROCC ou l’AIOCC, pour, sans se précipiter, prendre les meilleures décisions possibles, avec les informations dont on dispose et qui varient au jour le jour. Nous suivrons les directives de l’UCI.

Imagines-tu la course pro le 20 Juin et la cyclo en Septembre ? 

Cette année déjà, avec les Jeux-Olympiques, la course pro et la cyclo n’étaient pas le même week-end. Nous n’aurions donc aucun problème avec le fait que les deux évènements ne soient liés. Nous espérons à nouveau rassembler les deux évènements lors d’un seul week-end en 2021, pour que les deux univers passionnés et pros puissent se rencontrer, se reconnecter.

Dans le cas de l’annulation de la Deniv Challenge en juin, souhaites-tu un report (si oui, quand?) ou une annulation est-elle envisagée ? 

Si on nous demande d’être une course de reprise en vue des grand Tours, alors nous devrons le faire, dans l’intérêt du cyclisme, quelle que soit la date, et si les conditions sanitaires le permettent à ce moment-là. Nous devrons avoir une prise de position de l’UCI sous quinzaine. Par contre : Il n’est par contre pas envisagé d’être autre chose qu’une course de reprise. Une reprogrammation « à la rentrée », dans un calendrier hyper chargé, en face d’épreuves en place et de nouvelles World Tour déplacées, est inconcevable. Les organisations en place de classe 1 ou 2 risqueraient de ne pas avoir assez d’équipes au départ (et nous non plus). Les coureurs ont besoin de courir, mais les équipes ne peuvent pas faire 3 ou 4 fronts chaque week-end, et la priorité est donnée aux monuments, aux World Tour.

Romain Bardet au microRomain Bardet au micro | © Mont Ventoux Dénivelé Challenge

Dans le dernier cas, comment réagissent les partenaires ? 

Notre financement se fait en grande partie grâce à notre sponsor titre, le CIC, qui nous suit dans nos décisions, et sera présent en 2021 quoiqu’il arrive en 2020. Nous sommes donc sereins sur cet aspect. Une autre partie de notre financement est fait grâce aux hospitalités, c’est-à-dire en mobilisant des fonds et des prestations fournies à de petites sociétés locales. Ce sont elles qui souffrent avant tout, et je pense qu’il sera difficile de maintenir leur soutien financier en 2020. Elles doivent préserver leur trésorerie. 

A propos, Santini, ton fournisseur de maillots, fabrique aujourd’hui des masques, comment te situes-tu dans cette chaîne louable de solidarité ? 

Santini avait déjà commencé notre production, lancée le 26 Février pour être exact. Elle a été suspendue pour la bonne cause, n’oublions pas que Santini est situé à Bergame, localité la plus touchée par le drame que vivent les Italiens. Avec la reprogrammation en Septembre, nous n’avons pas d’inquiétude à ce niveau-là. Pour l’aspect solidarité, nous avons fait un appel aux dons, et tous ceux qui ne souhaitent pas venir en Septembre ont la possibilité d’offrir le montant de leur inscription, que l’on va reverser aux secouristes de la Croix Blanche qui luttent contre le COVID19. Depuis l’annonce du report mercredi dernier, nous avons déjà collecté 1000€ de dons.

Que ce soit pour les courses pros ou les cyclos, il y a le camp de ceux qui annulent purement et professionnellement et ceux qui reportent coûte que coûte, comment te situes-tu là-dedans ? 

Nous ne sommes pas dans le « coûte que coûte ». Une annulation ou report sur 2021 aurait été plus simple à gérer, peut-être plus raisonnable. Mais avec nous, si on annule, c’est une trentaine de sociétés prestataires du milieu évènementiel qui n’ont plus de travail. Nous ne parlons pas que des inscriptions des participants, mais bien de donner du travail à tous ceux qui œuvrent pour ces manifestations, qui souffrent en ce moment, et qui pourraient disparaitre en 2021 (chronométreurs, fabriquant de plaques, dossards, speaker, sécurité, secours, restauration, chapiteaux etc…). Derrière le sport, derrière l’évènementiel, il y a aussi des salariés. Niveau tourisme également, chaque année, cet évènement rapporte plus de 3 millions d’euros à l’économie locale. Nous essayons de soutenir aussi l’économie locale avec ce report. C’est tout un écosystème qui est impacté avec cette épidémie, au-delà de la simple pratique du cyclisme.

Nous sommes arrivés à remobiliser pour Septembre les 200 personnes qui étaient prévues pour le 14 Juin, nos urgentistes, la maire nous suit, nos sponsors nous suivent…etc, c’était un défi. Je reste aussi solidaire de tous les organisateurs qui ne sont pas arrivés à trouver de possibilités de report, l’annulation n’était peut-être pas leur premier souhait. Aujourd’hui, le vélo est triste, mais ce n’est que du vélo. Il convient de prendre du recul et d’être solidaires face au drame sanitaire.