Benoît, d’où vous est venue l’idée d’organiser une cyclosportive à Tahiti, la Ronde Tahitienne, dont la 3ème édition aura lieu le dimanche 1er juin ?
Il n’y a jamais eu de cyclosportive en Polynésie, or c’est une activité cycliste en plein essor en France et dans le monde entier, et génératrice de nouveaux adeptes. A Tahiti, il y a pas mal de cyclistes assidus sur les routes le dimanche matin qui n’appartiennent pas à un club. Il était donc important pour ces adeptes du sport cycliste de leur offrir une épreuve dans laquelle ils se reconnaîtraient. La première Ronde Tahitienne a eu lieu en 2011 et a réuni 253 participants. Henri Sannier et Bernard Thévenet, parrains de l’épreuve cette année-là, n’en revenaient pas, et c’est Jimmy Casper qui l’a emporté !

Vous parlez de cyclistes tahitiens assidus, comment se porte précisément le cyclisme à Tahiti, où il n’existe qu’une route principale cerclant l’île ?
A Tahiti, on dénombre environ 250 licenciés cyclistes répartis dans dix clubs dont un spécialisé dans le VTT. Nous avons un très beau vélodrome d’où partira et où arrivera la Ronde Tahitienne. Ce vélodrome est aussi le lieu d’entraînement de l’école de cyclisme, très active depuis quelques années. L’activité route est effectivement difficile à maintenir du fait du peu d’infrastructures routières. Les entraînements se font quasi tout le temps sur la même route et les courses sur les mêmes circuits reviennent assez souvent. Cependant il y a un niveau d’ensemble très correct avec quelques belles individualités dont le chef de file n’est autre que Taruia Krainer, qui évolue au Vendée U.

Les circuits proposés sur la Ronde Tahitienne sont essentiellement côtiers, à quoi faut-il s’attendre ?
Effectivement, les circuits de la Ronde Tahitienne parcourent la côte est de Tahiti et longent l’océan sur tout le long. Il y a à cette période de l’année très souvent du vent, un vent qui vient du sud et qu’on appelle le mara’amu. Les coureurs effectuent donc l’aller avec vent de face et le retour est souvent très rapide vent arrière. Il y a le passage du très difficile col du Taha’ara à l’aller qui éparpille le peloton et le second passage est à seulement 7 kilomètres de l’arrivée avec des portions à 12 % où se fait très souvent la décision finale. Ce sont donc des petits groupes qui rallient l’arrivée.

La Ronde Tahitienne emprunte de fait l’axe principal de l’île sans en faire le tour, est-il facile de faire cohabiter usagers de la route et cyclistes sur les routes tahitiennes ?
La cohabitation automobilistes-cyclistes n’est jamais aisée et comme partout on aimerait qu’elle soit meilleure. Mais si on emprunte la côte est de l’île, c’est parce qu’elle est moins fréquentée, et ce jour-là nous avons un dispositif de sécurité impressionnant avec l’assistance des motards de la Gendarmerie nationale. Le tour de l’île nous obligerait à traverser la capitale, Papeete, ce qui est moins facile. Et la côte est de Tahiti est beaucoup plus escarpée et plus jolie. Nous sommes en permanence en bordure d’océan avec de très beaux passages comme le point de vue du Taha’ara, le trou du souffleur, le passage à proximité des trois cascades, et plusieurs ponts comme celui de la Mahaena ou de la Vaiha. De fait, nous roulons en permanence entre mer et montagne.

Quelles limites vous fixez-vous en termes de participation et comment se répartissent les participants entre Tahitiens, métropolitains, coureurs étrangers ?
La 1ère Ronde Tahitienne a rassemblé 253 participants, nous étions 290 l’an dernier et nous espérons cette année atteindre les 300 participants avec l’apport de quelques concurrents étrangers. Nous avons déjà la confirmation de la venue de cyclistes métropolitains et de Néo-Calédoniens, et nous devrions pouvoir compter sur des Néo-Zélandais et des Australiens. Nous avons également eu de bons contacts préliminaires avec des concurrents d’Hawaï et du Chili. La participation majoritaire sera bien sûr tahitienne mais tous les concurrents venant de l’extérieur seront les bienvenus et donneront une belle dynamique à notre épreuve ainsi qu’à la confrontation avec nos cyclistes locaux.

La particularité de la Ronde Tahitienne, c’est que chacun porte le maillot qui lui est offert à l’inscription et décliné en trois couleurs selon le circuit retenu…
Nous avons pour cette organisation un grand nombre de partenaires et avons décidé depuis l’an dernier de les mettre à l’honneur sur des maillots offerts ce jour-là. Nous avons trois circuits, donc tout naturellement nous avons décliné les maillots en trois couleurs symbolisant chacune un circuit. Le départ est très beau, puisque tout le peloton arbore ces maillots offerts. Puis tout le long de l’année un bon nombre de cyclistes s’entraîne avec les maillots de la Ronde, c’est bien sûr une grande fierté pour les sponsors… et aussi pour nous organisateurs. Enfin, chaque concurrent apprécie bien sûr de se voir offrir un maillot à l’inscription.

En outre, l’organisation a mis en place un package alliant tourisme et cyclisme, en quoi consiste-t-il ?
Nous souhaitons séduire, grâce à ce package, les cyclistes des pays voisins et de métropole. L’idée est qu’ils puissent profiter de leur passage à Tahiti pour voir quelques- uns de nos plus beaux endroits. Donc en plus des nuitées d’hôtel nous leur proposons de visiter trois lieux symboliques de Tahiti. L’intérieur de l’île qui nous rappelle que Tahiti était un volcan et que la nature a vraiment bien fait les choses avec notamment des cascades somptueuses. Nous ferons un tour de vélo à Moorea avec un pique-nique sur l’îlot du Lagoonarium, où chacun pourra nager avec des tortues ou des raies, ce qui est une expérience inoubliable. Puis nous irons en catamaran sur l’île de Tetiaroa, l’île de Marlon Brando, et nous verrons alors ce qu’est un atoll polynésien, et je peux vous dire que cette journée-là s’apparentera pour beaucoup à une journée au paradis.

En marge de ce programme paradisiaque, quelles autres prestations et animations seront proposées sur la cyclo ?
Nous avons cette année un parrain exceptionnel qui sera avec nous tout le long de la semaine en la personne d’Henri Sannier. Henri est le parrain de la Ronde Tahitienne depuis le début et voue une grande admiration à cette épreuve et à la Polynésie. Il est désormais bien connu d’un grand nombre de cyclistes tahitiens et c’est toujours un énorme plaisir que de le recevoir. Nous aurons sur le vélodrome un véritable petit village avec différents partenaires dont un qui va installer pour l’occasion des douches pour les concurrents. A l’arrivée, chaque coureur se verra offrir des fruits frais de notre fenua (pays). Nous travaillons également sur une demi-journée de commémoration de la Première Guerre mondiale avec Henri Sannier, qui animera ce moment d’histoire pour retracer ce qu’était le cyclisme dans les années 1900.

Pour la deuxième année, la Ronde Tahitienne porte ses efforts sur l’écocitoyenneté avec le label Eco Cyclo. Quel message souhaitez-vous faire passer ?
Tahiti est une île très petite avec forcément un écosystème fragile, il est donc important que chaque citoyen soit sensibilisé à l’effort que chacun doit faire pour protéger cet environnement. Lors de la Ronde Tahitienne, la patrouille Eco Cyclo a un énorme succès et est très respectée. Pour info, nous avons même travaillé avec le Ministère de l’environnement local pour suggérer des pistes pour la mise en place d’un Eco label Polynésien. Mais nous avons également souhaité conjuguer cet aspect à d’autres thèmes et ainsi nous aurons cette année des concurrents qui participeront sous l’étiquette « cyclo-santé » puisqu’en partenariat avec la maison du diabétique, nous aurons quinze cyclistes diabétiques qui feront la ronde loisir de manière à montrer tout l’intérêt de la pratique du sport pour la santé.

Si tant est qu’il faille d’autres mots que la seule évocation de Tahiti, que pouvez-vous ajouter pour encourager les cyclos de métropole à découvrir la Ronde Tahitienne ?
L’évocation même de Tahiti est une incitation au voyage et au rêve, alors la seule idée pour des passionnés de vélo de pouvoir allier le vélo à Tahiti en y passant un séjour fait de découvertes saura les convaincre, je l’espère, à faire ce long périple. Je rajouterai d’autres mots enchanteurs qui fleurent bon les vacances comme monoi, tiare, vahine, ukulele… Il ne reste plus qu’à fermer les yeux et les lecteurs seront j’en suis sûr emportés vers nos beaux paysages polynésiens. Et s’il fallait simplement les rassurer tout est fin prêt ici pour que leur séjour parmi nous soit le voyage de leur rêve.

Propos recueillis le 19 février 2014.