Jean-Luc, tu as fait ton retour sur une cyclosportive à l’Etape Sanfloraine après une chute qui t’a écarté des pelotons ces derniers temps. Que s’était-il passé ?
Je suis tombé à l’Ardéchoise dans une chute collective. C’est toujours un peu bête que cela arrive mais c’est surtout les conséquences qui ont été assez lourdes. Je me suis fracturé le poignet et abîmé un tendon de l’épaule opposée, ce qui m’a obligé à quarante-cinq jours d’immobilisation. Et mon épaule me gêne encore à l’heure actuelle.

T’es-tu arrêté complètement de rouler ou as-tu fait d’autres sports et essayer tant bien que mal de renfourcher ton vélo ?
J’ai essayé de roulotter avec le plâtre mais sans insister et surtout sans pouvoir faire de réelles sorties. J’ai plus pris mon mal en patience que tenté de revenir trop vite.

Nous sommes à un peu moins de quinze jours des Championnats du Monde Granfondo UCI à Albi, pour lesquels tu t’es qualifié avec l’objectif de retrouver ton titre gagné en 2014. Où en es-tu de ta préparation ?
J’essaye de combler ce manque en recourant tous les week-ends depuis que je le peux, le 30 juillet. Mais l’annulation des Championnats de France la semaine passée ne m’a pas favorisé. Après j’ai tout de même effectué un bon foncier cet hiver donc la base est là. Il ne me reste plus qu’à reprendre le « rythme course ». Mais je relativise, le Championnat ne reste qu’une course. Je ferai tout mon possible d’autant plus que j’ai beaucoup de famille et d’amis qui vont venir me voir ce jour-là.

Ce week-end tu as obtenu une belle 10ème place (1er en catégorie D) sur l’Etape Sanfloraine, qui est donc ta seconde course depuis ta reprise. Comment juges-tu ta performance ?
Le niveau était très dense sur la Sanfloraine, mais le fait d’être parti sur un bon rythme, pas trop élevé, m’a permis de bien me chauffer. J’avais de bonnes sensations, à ma grande surprise. Après cette longue coupure je pensais vraiment avoir du mal à me retrouver devant. Après, le podium est composé d’excellents coureurs régulièrement en Elites donc pour moi à 53 ans, ne pas les suivre est assez normal. Je suis satisfait car je pense que sans cette mésaventure je n’aurais guère fait mieux.

Comme régulièrement depuis quelques temps, tu cours sous les couleurs de la patrouille Eco Cyclo. On sent qu’en cyclosportive il y a de plus en plus de respect de la nature avec moins de déchets sur les routes après la course. Comment êtes-vous perçu au sein du peloton ?
Les gens se sentent de plus en plus concernés par le fait de jeter les déchets et le respect des paysages traversés. On voit de moins en moins de gens qui jettent leurs emballages volontairement au sol. Personnellement et malheureusement sur la Sanfloraine, j’ai dû intervenir auprès d’un coureur qui est plus habitué à courir en FFC et qui a jeté son emballage. Je l’ai informé de notre action et il s’est excusé de son geste. En revanche la fin du grand et du moyen parcours sont identiques et je n’ai pas vu d’emballages au sol. Ce qui prouve que l’action de Green Cycling a fait évoluer les mœurs. En l’espace de 10 ans, j’ai vraiment vu une évolution du comportement et plus de respect de la nature. C’est vraiment une action à continuer et à instaurer dès le plus jeune âge.

Alors pourquoi ne pas pousser ce mouvement en FFC et dans les écoles de cyclisme ?
C’est sûr que nous aimerions voir les pros remettre leurs déchets dans la poche. Tout passe par ce que nous voyons au plus haut niveau. Sensibiliser les jeunes est aussi une action à mener, que ce soit sur les courses ou dans leurs écoles de cyclisme. Tout comme on leur apprend le tri sélectif, on peut leur apprendre à ne pas jeter ses emballages par terre.

On voit sur certaines épreuves des zones de collectes de déchets. Que penses-tu de celles-ci ?
Je pense que si on part avec dans sa poche des barres ou des gels pleins, il est très facile de finir la course avec ceux-ci vides dans ces mêmes poches. Ces zones sont bien pour jeter des bidons ou éventuellement se débarrasser de ses emballages ou des gobelets pris à la volée sur les ravitaillements. En revanche, tendre des bouteilles aux coureurs est propice à retrouver celles-ci hors zones de collectes. Le coureur a tendance à la mettre dans sa poche et s’arroser ou boire et ensuite la jeter bien plus loin que là où les organisateurs ont prévu une zone de collecte. Je pense que dans le cyclosport il faut rester en autonomie ou sinon s’arrêter aux ravitaillements officiels de l’épreuve.

Tu sous-entends que la pratique du cyclosport s’effectue de manière autonome. Mais nous voyons souvent des coureurs qui ont une logistique avec eux. Des suiveurs qui leur tendent des bidons et parfois même une voiture ou moto avec une paire de roues. Que penses-tu de cela ?
Pour moi en cyclosport nous devons respecter le règlement qui stipule que le coureur est autonome en ravitaillement et en cas de souci mécanique. Seules les zones proposées par l’organisation peuvent être utilisées par le coureur. Personnellement je prends toujours plus de ravitaillements que ce que je n’en consomme et j’ai toujours un kit de réparation en cas de crevaison. De plus avec les nouveaux pneumatiques, on crève rarement et si jamais cela arrive, c’est un fait de course. On répare et on repart au plus vite, c’est le jeu ! Ceux qui veulent une assistance complète avec une voiture suiveuse ou autre n’ont qu’à changer de fédération de cyclisme et s’aligner sur des épreuves où le règlement l’autorise.

Ton appel sur le ravitaillement nous fait rebondir sur un article où Stéphane Cognet rappelait qu’à une époque tous les coureurs d’un groupe, même du groupe de tête, se mettaient d’accord pour s’arrêter au ravitaillement et faire le plein. Cela s’est perdu, même le fait de demander un « bon de sortie » juste pour prendre des barres et remplir un bidon est souvent vu comme une façon de pendre du champ en vue de s’échapper. Que penses-tu de cette tournure et regrettes-tu cette époque ?
Oui, c’est révolu malheureusement ! Je me souviens même que parfois dans les groupes de tête on proposait des arrêts pipi ! Après on revient à l’autonomie, si personne n’est ravitaillé en cours de route, tout le monde voudra effectuer un arrêt ! Mais le cyclosport a tendance, peut-être trop, à aller vers la compétition pure.

Et crois-tu qu’un retour en arrière sur ces comportements soit réalisable ?
Je ne sais pas si un retour en arrière est possible. Surtout que beaucoup de points se sont améliorés mais oui être autonome reste la base. Ensuite si dans un groupe des coureurs proposent de s’arrêter, je ne serai pas le dernier à dire oui, bien au contraire. Mais devant le niveau a très nettement augmenté et a de ce fait amené des purs compétiteurs avec leurs cultures. Cela se professionnalisme de plus en plus, c’est dur je pense de lutter contre cela !

Par où passera ta fin de saison après les Mondiaux ?
Comme nous l’avions évoqué au tout début de cet entretien, mon épaule me fait encore souffrir et donc je vais serrer les dents pour les Mondiaux puis ensuite je retourne faire une batterie d’examens. En fonction de ceux-ci, si j’ai le feu vert, je prolonge jusqu’aux Bosses de Provence qui sont le final du Trophée Label d’Or que je fais chaque année, plus quelques belles épreuves pendant le mois de septembre pour finir ma saison.

Propos recueillis par Stéphane Cognet.