Jean-Luc, 40 ans de vélo, ça se fête comment ?

Ce n’est pas exactement 40 ans de vélo car j’ai connu une coupure d’une quinzaine d’années, mais l’anniversaire de mes débuts qui semblent d’une autre époque…

Tu portais le casque (à boudins) dès tes premières compétitions ?

Le casque à boudins était obligatoire en cadet. Je ne l’ai pas toujours porté en séniors car personne ne le faisait jusqu’à ce qu’on nous impose le casque rigide.

Je ne pourrais plus rouler sans le porter.

Quelle est, selon toi, la principale évolution que tu as connue, côté technique ?

J’ai connu l’arrivée des pédales automatiques LOOK et l’évolution des matières textiles.

Plus récemment les disques, mais je n’ai pas assez de recul sur la fiabilité et l’utilisation généralisée dans les pelotons.Chavanon Marseille 2018Chavanon Marseille 2018 | © Emilies Heels

Tu as été un bon coureur de 1ère catégorie, qu’est-ce qui t’a manqué pour aller plus haut ?

Quelques Watts !

Qu’est ce qui t’a amené aux cyclosportives ? quelle image en avais-tu ?

Après une coupure de 15 ans j’ai repris le sport en me partageant entre ski de fond et ballades en vélo dans le Vercors. C’est là que j’ai retrouvé des copains qui venaient de créer le team Chamrousse Cyclosport. Ils m’ont invité à les rejoindre.

Je pensais faire une ou deux cyclos dans la région puis je me suis pris au jeu en découvrant une nouvelle pratique à travers le cyclosport qui était plus en rapport avec mon âge et mes envies.

A cette époque-là, les cyclos n’avaient presque que de grands parcours, maintenant c’est la politique du chiffre, avec des parcours à 75 kms, ton sentiment ? alors que le temps libre a évolué sacrément !

Pour moi seuls les grands parcours évoquent le cyclosport, mais je connais aussi les réalités économiques des organisateurs et la nécessité de s’adapter à la demande pour attirer du monde.

On peut juste s’interroger sur des différences parfois seulement de 20 km entre les différents circuits et regretter de voir des coureurs très entrainés s’aligner sur les petites distances.

Tu étais un des fondateurs du team Chamrousse, et tu es passé au team Vercors, pourquoi ?  Quelle est la différence d’approche entre les deux ?

Je suis arrivé dans les premières années du team Chamrousse qui regroupait une bande de copains, anciens compétiteurs qui avaient trouvé dans le cyclosport une forme plus conviviale de pratiquer le vélo.

Un mélange équilibré entre plaisir et compétition ou plutôt défi personnel.

Les années qui passent (trop vite) les ont vu quitter le groupe et je me suis retrouvé un peu esseulé dans un club où les nouveaux dirigeants ont donné une orientation plus « cyclotouriste » que sportive.

C’est tout naturellement que j’ai retrouvé mes montagnes d’origine avec le Team Vercors et quelques copains de longue date.

Comment juges-tu ta saison 2018 ?

Cette saison j’ai fait la part belle aux épreuves qui me tiennent à cœur dans des régions qui m’invitent à y séjourner quelque temps. J’ai la chance de partager tous ces déplacements avec mon Épouse et c’est l’occasion de profiter de belles visites.

Sportivement c’est plus compliqué depuis ma chute l’an passé avec des séquelles qui m’obligent à lever le pied régulièrement mais j’ai obtenu 18 tops 10 au scratch sur 21 épreuves disputées, à 54 ans je suis satisfait.Topvélo8Topvélo8 | © JL Chavanon

Tu démontres à chaque cyclo qu’on peut prendre de l’âge, et être performant, quel est ton secret ?

La passion et le « métier » qui compensent souvent le physique face aux plus jeunes.

Une semaine de vie type c’est combien d’heures de travail et combien de vélo ?

Je partage mon temps entre mon métier de technicien chez ORANGE de 5h30 à 13h30 en journée continue, ma vie de famille et le sport le reste du temps.

Le nombre d’heures de sport est variable selon la saison et la météo, mais aussi de la récupération de moins en moins facile surtout en enchaînant les cyclosportives.

Je ne comptabilise rien et n’utilise le compteur qu’en compétition pour connaitre la distance restante.

Selon toi, les championnats du monde Masters, est-ce encore du cyclosport ou une compétition pure et dure ?

Je participe à ces Championnats du monde Masters depuis 2012 avec un titre décroché en 2014 en Slovénie. L’occasion de découvrir l’Afrique du Sud, l’Italie, le Danemark, l’Australie…

L’UCI tente de donner une étiquette « Cyclosport » justifiée par une qualification lors d’une épreuve cyclosportive organisée à travers le monde et un parcours « en ligne » plutôt qu’un circuit.

Si on décerne un titre forcément ça devient une compétition même si pour beaucoup c’est un défi personnel de se qualifier et de représenter son pays face à toutes les autres nationalités.

Le niveau dans chaque catégorie est incroyable mais aujourd’hui je remarque la même évolution dans les cyclos. La participation de coureurs élites voire de quelques professionnels fait grimper le niveau, les premiers du classement abordent ces épreuves comme des compétitions.

Ces Championnats du Monde Masters sont une belle expérience émotionnelle en portant le maillot national à l’étranger et on sait très bien que Le Champion du Monde s’appelle Alejandro Valverde.

Pourtant, tu es plutôt adepte des cyclos type challenge LVO que l’Etape du Tour, c’est paradoxal, non ?

Je reste fidèle à certaines organisations à taille humaine bien plus conviviales que les grosses épreuves, pour les organisateurs avec qui on tisse des liens d’amitié au fur et à mesure des années et pour les belles régions qu’ils nous font découvrir.

Quand tu as obtenu le titre tu as toujours envie d’y retourner, cela ne change rien à ma pratique et certaines cyclosportives comme l’Étape du Tour ou la Corima par exemple s’apparentent à de vraies compétitions.

Tu portes quelquefois le maillot Éco-cyclo, étant devant, quel est ton avis sur le respect de l’environnement des cyclos ?

En un peu plus de 10 ans de cyclosport, j’ai vraiment vu une prise de conscience sur la nécessité de respecter l’environnement et en participant à la Patrouille Grenn-Cycling je peux aider à limiter l’impact d’une épreuve de masse.

La Patrouille est présente à tous les niveaux de la course pour rappeler les règles élémentaires qui sont très largement suivies aujourd’hui même s’il y a encore un gros travail de sensibilisation à faire sur les participants étrangers.

David De Vecchi est un exemple en montrant qu’on peut gagner les plus belles épreuves montagneuses en ramenant ses déchets dans ses poches. L’action Green-Cycling va bien plus loin en impliquant les organisateurs sur les autres impacts sur l’environnement inhérents à une manifestation sportive.

Je pense par exemple à solliciter ces derniers pour lutter contre les voitures suiveuses en faisant respecter le règlement.

Dans toutes ces années de cyclosportives, quel est le col, le coureur qui t’ont donné le plus de fil à retordre ?

J’adore les grands cols des Alpes, des Pyrénées, des Dolomites même s’ils deviennent de plus en plus pentus au fil du temps…

J’ai une sincère admiration pour David De Vecchi, capable de gagner au sommet de l’Izoard ou sur un parcours plat et toujours avec une grande modestie. Un Passionné.

Comment amener plus de filles sur les cyclosportives ? Le cyclosport peut-il, un jour, arriver à 30/40% de participation féminine, comme le marathon par exemple ?

Le Cyclosport est chronophage et la difficulté de concilier vie de famille, travail et sport est réelle. Je pense qu’on pourrait commencer par traiter les femmes toujours au même rang que les hommes dans la presse spécialisée et sur les podiums, ce n’est pas souvent le cas.

Ça serait déjà un bon début pour les motiver.Chavanon VentouxVentoux | © JL Chavanon

Mobilier urbain, contraintes administratives, sécurité, consumérisme des coureurs, etc….comment vois-tu le cyclosport dans 10 ans ?

J’espère que toutes les « petites » épreuves n’auront pas disparu au profit des seuls grands évènements. Ce serait bien d’avoir encore le choix dans 10 ans et de pouvoir limiter la hausse des prix des inscriptions.

Il faut que les médias spécialisés continuent à promouvoir toutes les épreuves pour que les organisateurs se sentent soutenus face aux lourdeurs administratives et au manque de bénévoles.

La sécurité est l’affaire de tous et en premier des participants.

As-tu déjà ton programme de cyclos pour 2019 ?

Pour l’instant j’attends la neige avec impatience et en 2019 je resterai fidèle au Trophée Label D’Or et aux épreuves que j’affectionne.