Baroudeur infatigable, auteur d’une échappée solitaire victorieuse de 234 kilomètres sur le Tour de France 1991, Thierry Marie a relevé durant sa carrière des défis hors norme. La cinquantaine passée, le Normand continue d’avaler des kilomètres. Il participe depuis quelques années aux 24 Heures Vélo Shimano au Mans qui se tiendront cette année les 23 et 24 août 2015. Le principe en est simple et reprend les grandes lignes de la célèbre course automobile. Les engagés (en solo, en duo à quatre, à six ou à huit) tournent pendant 24 heures sur le circuit Bugatti. Si vous voulez imiter l’ancien Maillot Jaune du Tour de France et faire partie des quelque 2000 personnes attendues, il est encore temps de vous inscrire. Un tarif spécial accordant 9 % de remise est encore accordé jusqu’à demain. Les inscriptions se passent ici.

Thierry, comment et pourquoi avez-vous décidé de participer aux 24 Heures Vélo Shimano ?
J’ai des amis qui sont commerçants à Louviers dans l’Eure. Ils ont organisé une équipe pour les 24 Heures Vélo Shimano et m’ont sollicité lors de leur deuxième participation. J’ai trouvé ça bien. Au fil des années, c’est devenu un petit rituel. On s’entraîne pour que tout se passe bien. On apprécie l’ambiance. Nous avons une équipe mixte attitrée depuis des années, les Tigres du Bengale. Nous avons connu toutes les places d’honneur, sauf la première ! Ça nous contrarie un peu (il rit). D’année en année, les équipes sont de plus en plus fortes même si nous sommes toujours opérationnels.

Quel mode de fonctionnement avez-vous adopté ?
Nous sommes une équipe mixte avec la même formule depuis quelques années. Il y a quatre hommes (Florian, Laurent, Patrick et moi-même) et deux femmes (Christiane et Sylvie). J’y participe depuis trois ou quatre ans, je ne sais plus exactement.  Chaque année il se passe des choses et on en ressort avec plein d’anecdotes. Il y a toujours une ambiance différente. Ce qui reste, c’est la camaraderie. On se connaît, on a un bon groupe. La performance compte aussi beaucoup pour nous. Notre atout, c’est Patrice Barbé, s’il avait commencé le vélo à 15 ans il aurait été très bon, mais c’est sa femme qui l’a mis sur le vélo un peu sur le tard.

Qu’est-ce qui est le plus difficile ?
Les 24 Heures, c’est dur ! Toutes les quatre heures, on vient toquer à votre porte pour monter sur le vélo ! Il faut donc être conditionné. 24 heures, c’est long. Et quand on vient te réveiller à 4 heures du matin en disant « Thierry, c’est ton tour », on a beau être un ancien coureur cycliste professionnel, on a un peu de mal à se réveiller (il rit) ! Chaque année, on se dit par moments que c’est la dernière fois qu’on les fait. Mais avec la camaraderie, on oublie tout. Les compteurs sont remis à zéro.

Comment s’organisent les relais ?
Avec notre expérience, on s’est rendu compte qu’on ne pouvait pas rouler plus d’une heure à fond. C’est pareil pour les autres équipes. On est six. On monte toutes les cinq heures sur le vélo. Mais cela peut varier. Les deux filles de l’équipe font parfois moins d’une heure. Si certains se sentent costauds, ils font 1h10. Mais on sait à l’avance qu’a priori, on part pour cinq relais.

Ces stratégies peuvent-elles évoluer ?
Oui nous nous adaptons. Au départ, on met les plus forts. Puis tout dépend si on a de l’avance ou si l’on a du retard.

Comment se passe la transmission des relais ?
Ce sont les mêmes règlements que pour la course automobile. Il faut arriver au stand à la vitesse de 20 km/h maximum. Puis on donne son relais. La personne doit elle aussi rouler à 20 km/h pour des raisons de sécurité jusqu’à la sortie des stands.

Il y a six cyclistes, mais l’équipe qui se greffe autour est bien plus conséquente…
Oui bien sûr, nous avons des pointeurs qui surveillent les temps. C’est aussi du boulot pour eux puisqu’ils passent 24 heures sans dormir. Nous avons un médecin et une assistance mécanique. Nous avons tout le matériel qu’il nous faut. Avec les assistants à la piste à qui l’on signale les passages de relais, les mécanos, on est une douzaine par équipes. Sans compter celui qui fait la navette entre le stand et le camping-car où nous dormons entre chaque relais. Car bien sûr, nous n’avons pas de réveil (il rit). Ce sont les nerfs qui tiennent aussi. On n’est pas obligé de dormir, mais c’est effectivement mieux pour la récupération.

Votre passé de baroudeur sur de longues distances vous aide-t-il dans cet effort ?
J’ai un passé, mais j’ai quand même pas mal oublié… Par contre, je sais bien piloter le vélo, bien prendre les virages. Pour ça je suis à l’aise. C’est sûr que j’ai moins de puissance qu’avant, mais je me défends quand même. Je m’entraîne pour.

Quelle préparation suivez-vous ?
On ne fait pas d’entraînement spécifique. Je vais bientôt débuter la saison et l’épreuve n’a lieu que les 23 et 24 août. Il ne faut pas griller les cartouches et arriver assez frais. Pour ma part, j’organise chaque année un week-end au Mont-Saint-Michel avec des copains. On se fait 555 bornes en deux jours. Le reste du temps, on roule le week-end pour faire entre quatre et cinq heures de vélo sur la semaine. Pour préparer les 24 Heures, nous allons aussi à l’Etape du Tour. C’est à peu près un mois avant. Toute l’équipe s’y retrouve pour préparer l’événement. Je ferai aussi le Tour des Flandres. Pour moi, les 24 Heures, c’est plus difficile que toutes ces épreuves. C’est très physique. On tourne à fond pendant une heure, puis on se repose, puis on retourne une heure à fond, et ainsi de suite. C’est compliqué. L’Etape du Tour, on sait que c’est dur, qu’il y a des cols à monter, mais au bout de six heures de vélo, c’est terminé. Les 24 Heures sont beaucoup plus intensives. Il faut donner beaucoup pour son équipe.

La solidarité, la camaraderie comme vous l’appelez, est-elle l’ingrédient qui fait la particularité de ces 24 Heures ?
Émotionnellement, c’est beaucoup plus fort. Vous avez les encouragements de votre équipe et vous avez intérêt à être bon. Ils vous regardent. Quand on te passe le relais et que tu es 2ème, tu ne dois pas lâcher pour ne pas perdre de place. On n’a pas envie de décevoir.

Pour cela, quels sont les écueils à éviter ?
Comme un coureur cycliste professionnel : il faut éviter de trop manger, rester dans sa bulle, ne pas rester trop longtemps debout. C’est une journée où il ne faut pas se louper. Les jours précédents, il ne faut pas accumuler de la fatigue. Il faut se concentrer. On le sent dès le début que c’est du sérieux. C’est la raison pour laquelle je ne veux plus partir en premier, c’est beaucoup de pression. Quand on vit ces grands moments d’émotion, le deuxième relais est moins bon. Il faut savoir gérer ses efforts, c’est très important.

Votre équipe s’appelle les Tigres du Bengale. D’où vient ce nom ?
La fille de Sylvie, l’une des membres de l’équipe, fait partie d’une association pour la défense de cette espèce menacée de disparition. L’association est derrière nous. Nous récoltons des fonds pour elle.

Propos recueillis le 26 février 2015.