Quand toutes les classiques s’évertuent à durcir leur parcours, l’Amstel Gold Race navigue à contre-courant en allégeant considérablement son final. Et s’il fallait y trouver la cause de cette édition cadenassée où un peloton presque massif s’est présenté au pied de la dernière escalade du Cauberg ? Ce n’est pas une nouveauté, le parcours dans sa forme actuelle étant de mise pour la troisième année consécutive, mais la boucle finale, nettement moins dure que la précédente, n’a jamais donné lieu à un final si peu captivant. La configuration d’avant 2013 résumait souvent l’Amstel Gold Race à une course de côte dans le Cauberg et les organisateurs pensaient redynamiser leur épreuve en redessinant leur boucle finale. Le pari que se sont lancé les Limbourgeois est manifestement raté.

Peut-être même regretteront-ils d’avoir déplacé à plus de 30 kilomètres de l’arrivée les terribles montées du Kruisberg, de l’Eyserbosweg, du Fromberg et du Keutenberg ce soir. Sur la précédente mouture du parcours, la tentative de David Tanner (IAM Cycling) dans le Kruisberg aurait pu s’avérer décisive. L’Australien y place une accélération qui réveille brusquement le peloton. Lui et Diego Rosa et Vincenzo Nibali (Astana), Damiano Caruso (BMC Racing Team), Simon Clarke (Orica-GreenEdge), Wilco Kelderman (Team LottoNL-Jumbo) et Tony Martin (Etixx-Quick Step), reprennent progressivement les membres de l’échappée matinale constituée de Laurens De Vreese (Astana), Linus Gerdemann (Cult Energy), Jan Polanc (Lampre-Merida), Timo Roosen (Team LottoNL-Jumbo), Mike Terpstra (Team Roompot) et Johann Van Zyl (MTN-Qhubeka).

Le peloton, qui jusqu’alors se contentait de mener une course de placement avant les difficultés pour ralentir l’allure quand la route se cabrait, ne peut plus se contenter de jouer l’attentisme. Les coureurs de tête peuvent représenter un réel danger si l’entente est bonne. Malheureusement, les fuyards perdront progressivement des forces. Ce ne sont pas les passages à 22 % du Keutenberg mais des erreurs de trajectoire sur les routes du Limbourg qui éliminent Wilco Kelderman, puis Diego Rosa et Damiano Caruso du groupe de tête. L’avance des quatre hommes restants est faible quand ils se présentent pour l’avant-dernière fois au pied du Cauberg. Simon Clarke a beau faire de la résistance, l’Australien est repris dans le Bemelerberg à 4 kilomètres de l’arrivée par un peloton très conséquent.

Matthews résiste à Gilbert dans le Cauberg mais s’écrase face à Kwiatkowski au sprint

Cette course cadenassée n’est pas pour déplaire à Philippe Gilbert (BMC Racing Team), habitué à se montrer le plus fort sur le Cauberg depuis cinq ans. Avec trois victoires sur l’Amstel et un titre de champion du monde à Valkenburg, le Wallon est comme chez lui dans le Limbourg. Son équipe se rallie à sa cause. Greg Van Avermaet qui a suivi une accélération de Jakob Fuglsang (Astana) dans le Bemelerberg ne prend pas un relais pour protéger les intérêts de son leader. Une fois arrivé au pied de ces 800 mètres à 12 %, le vainqueur de la Flèche Brabançonne, Ben Hermans, entre en action pour faire exploser le peloton, comme l’avait fait Samuel Sanchez dans des circonstances similaires l’an dernier.

Personne ne doute un instant que le Belge sert de rampe de lancement à Philippe Gilbert, habitué à décanter l’Amstel dès qu’il arrive sur ce mont qu’il connaît par cœur. La traditionnelle accélération du Remoucastrien ne se fait pas longtemps attendre. Au plus fort de la pente, l’ancien champion du monde accélère brusquement. Mais là où il avait l’habitude de sortir de sa roue tous ses adversaires, un homme parvient cette fois à s’accrocher : l’épatant Michael Matthews (Orica-GreenEdge) dont le profil n’est toujours pas réellement cerné. Gilbert a beau insister sur le sommet de la bosse, il ne parvient pas à décrocher l’Australien à la rupture. Lorsqu’il arrive au sommet et alors qu’il reste 1800 mètres à couvrir, le Belge coupe son effort et précipite la reformation d’un groupe de dix-huit éléments qui se dispute finalement la victoire.

Dans d’autres circonstances, Michael Matthews n’aurait fait qu’une bouchée de tous ses adversaires sur ce sprint en comité réduit. Mais après 260 kilomètres éprouvants, et alors qu’il vient de fournir un gros effort, l’ancien champion du monde Espoirs manque de jus dans les 200 derniers mètres. Michal Kwiatkowski (Etixx-Quick Step) qui a su peser ses efforts dans le Cauberg se fait un plaisir de régler tout ce petit monde au sprint. Révélé sur cette arrivée en 2013 avec une 4ème place à la clé, le champion du monde s’offre plus qu’une première victoire, ceint du maillot arc-en-ciel. C’est surtout son premier succès sur une classique WorldTour, lui qui a tourné autour l’an dernier en entrant dans le Top 5 des trois Ardennaises (dont deux podiums sur la Flèche et à Liège), sans jamais occuper la première marche du podium.

Classement :

1. Michal Kwiatkowski (POL, Etixx-Quick Step) en 6h31’49 »
2. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) m.t.
3. Michael Matthews (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
4. Rui Costa (POR, Lampre-Merida) m.t.
5. Greg Van Avermaet (BEL, BMC Racing Team) m.t.
6. Tony Gallopin (FRA, Lotto-Soudal) m.t.
7. Julian Alaphilippe (FRA, Etixx-Quick Step) m.t.
8. Enrico Gasparotto (ITA, Wanty-Groupe Gobert) m.t.
9. Maciej Paterski (POL, CCC Sprandi Polkowice) m.t.
10. Philippe Gilbert (BEL, BMC Racing Team) m.t.