C’est dans la valise de Marcel Kittel (Etixx-Quick Step) que le maillot rose fera donc le transfert ce soir des Pays-Bas, où le Giro a pris ses quartiers cette semaine, jusqu’en Calabre, à la pointe méridionale de l’Italie, d’où il partira à l’assaut des routes transalpines la semaine prochaine – mardi, le temps que toute la caravane s’y rende. C’était presque devenu une certitude après le sprint dont nous avait gratifiés le sprinteur allemand hier soir dans les rues de Nimègue. En quelques coups de pédales puissamment dosés, Marcel Kittel avait laissé derrière lui tout le peloton du Tour d’Italie pour ravir la victoire d’étape et les 10 secondes de bonification qui allaient avec, pour revenir à une toute petite seconde du leader du classement général. Une seconde qu’il n’avait pas manqué grand-chose pour que les chronométreurs la lui accordent sur le terrain hier tant il avait fait la différence dans son rush.

Tandis que le peloton quittait Nimègue pour retrouver Arnhem, par une boucle de 190 kilomètres opposée à celle d’hier (la course avait relié les deux villes par l’ouest hier, elle le faisait par l’est aujourd’hui), il était presque écrit que le maillot rose allait changer de camp avant le transfert aérien. Tom Dumoulin (Giant-Alpecin) lui-même, premier concerné, savait ses heures comptées. Mais avec un certain fatalisme, il rappelait que son sort ne reposait ni entre ses mains ni entre celui de sa formation à laquelle appartenait encore, il y a quelques mois, Marcel Kittel. Avec respectivement 10, 6 et 4 secondes de bonus octroyé aux trois premiers coureurs à franchir la ligne d’arrivée d’Arnhem, et pas beaucoup de sprinteurs, pour ne pas dire aucun, en mesure de se faufiler devant Kittel, le Néerlandais lui-même ne voyait pas comment il pourrait gagner l’Italie autrement que dans son maillot Giant-Alpecin. Mais il y avait une course à faire au préalable et rien ne pouvait en garantir l’issue.

D’ailleurs, s’il n’y avait pas de sprinteur pour s’opposer à un doublé de Kittel, peut-être y avait-il un attaquant pour le faire. Membres de la première échappée du Giro hier, Giacomo Berlato (Nippo-Vini Fantini) et Maarten Tjallingii (Team LottoNL-Jumbo) avaient tellement apprécié leur bain de foule au cœur d’une Hollande tout de rose vêtue qu’ils en redemandaient. Sitôt quitté Nimègue, les deux hommes reprenaient un ticket pour l’échappée du jour, accompagnés cette fois par Julen Amezqueta (Wilier Triestina-Southeast) et Johann Van Zyl (Dimension Data). Comme hier, le peloton n’allait pas s’opposer à cette tentative très matinale, et le quatuor obtenait très vite suffisamment d’avance, 7’45 » au mieux, pour s’assurer de passer le plus clair de la journée en tête. Sous les vivas d’un public néerlandais qui aura décidément réservé un accueil mémorable au Giro, un an après avoir accueilli le Tour de France.

Un mauvais sort à nouveau jeté sur Jean-Christophe Péraud.

Cette nouvelle journée en tête, le vieux Maarten Tjallingii voulait surtout la mettre à profit pour s’emparer d’un maillot distinctif. Hier, le maillot bleu de meilleur grimpeur lui était passé sous le nez alors qu’Omar Fraile (Dimension Data) l’avait privé des seuls points mis en jeu. Il ne se ferait pas avoir deux fois. En vue de l’unique côte du jour, le Néerlandais de 38 ans prenait ses dispositions pour passer le premier, ce qui lui permettrait de prolonger sur le podium la belle complicité nouée avec son public depuis deux jours. Mais alors que la course entrait dans Arnhem pour deux boucles de 14 kilomètres, c’est la victoire d’étape qui semblait à la portée des quatre hommes de tête, toujours crédités de deux bonnes minutes d’avance. Le peloton devait considérablement hausser l’allure, ce qui entraînait une cassure qui le scindait en deux. Sans tromper la vigilance d’aucun favori, tous du premier paquet.

Pensant encore le coup jouable à 10 kilomètres de l’arrivée, Johann Van Zyl décidait d’insister seul pour défendre la petite minute dont disposait encore l’échappée. Le Sud-Africain, les avant-bras posés sur les cocottes à la recherche d’une position aérodynamique, allait tenir jusqu’à 2 kilomètres du but avant de s’incliner à bout de souffle. Et de laisser les sprinteurs se mesurer dans les derniers hectomètres. Cette fois Arnaud Démare (FDJ) se faisait discret, lui dont la formation FDJ, épatante hier, avait été décapitée par une chute dans le final. En revanche les Etixx-Quick Step étaient au rendez-vous, et Marcel Kittel tout en rouge (la couleur du leader du classement par points) n’avait plus qu’à répéter son sprint victorieux d’hier. N’en déplaise aux finisseurs italiens Elia Viviani (Team Sky) et Giacomo Nizzolo (Trek-Segafredo), 2ème et 3ème. Avec la même puissance qui en fait le sprinteur invulnérable du moment, l’Allemand s’en allait ainsi conquérir étape et maillot rose de leader.

Tom Dumoulin ne verra donc pas l’Italie en rose (du moins pas mardi), mais c’est un moindre mal comparé au mauvais sort jeté à Jean-Christophe Péraud (Ag2r La Mondiale). Le Toulousain de 38 ans, 2ème du Tour de France il y a deux ans, rêvait de disputer le Tour d’Italie au moins une fois avant de tirer sa révérence. Mais il n’atteindra pas la péninsule. Il a fallu que ses équipiers glissent devant lui dans un rond-point à une centaine de kilomètres de l’arrivée pour que la scoumoune s’abatte une nouvelle fois sur lui. Sévèrement touché au visage, Jicé devait être le tout premier coureur à se retirer du peloton du Tour d’Italie. Une sale journée pour la France dont l’autre outsider au classement général, Alexandre Geniez (FDJ), aura perdu 1’37 » dans la chute ayant impliqué lui aussi ses coéquipiers à quelques kilomètres de l’arrivée. Le Giro, déjà, a fait ses premières victimes.

Mardi, la course rose reprendra entre Catanzaro et Praia a Mare (200 km).

Classement 3ème étape :

1. Marcel Kittel (ALL, Etixx-Quick Step) les 190 km en 4h23’45 » (43,2 km/h)
2. Elia Viviani (ITA, Team Sky) m.t.
3. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) m.t.
4. André Greipel (ALL, Lotto-Soudal) m.t.
5. Alexander Porsev (RUS, Team Katusha) m.t.
6. Kristian Sbaragli (ITA, Dimension Data) m.t.
7. Moreno Hofland (PBS, Team LottoNL-Jumbo) m.t.
8. Arnaud Démare (FRA, FDJ) m.t.
9. Rick Zabel (ALL, BMC Racing Team) m.t.
10. Matej Mohoric (SLO, Lampre-Merida) m.t.

Classement général :

1. Marcel Kittel (ALL, Etixx-Quick Step) en 9h13’10 »
2. Tom Dumoulin (PBS, Giant-Alpecin) à 9 sec.
3. Andrey Amador (CRC, Movistar Team) à 15 sec.
4. Tobias Ludvigsson (SUE, Giant-Alpecin) à 17 sec.
5. Moreno Moser (ITA, Cannondale) à 21 sec.
6. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) à 22 sec.
7. Matthias Brändle (AUT, IAM Cycling) à 23 sec.
8. Roger Kluge (ALL, IAM Cycling) à 25 sec.
9. Chad Haga (USA, Giant-Alpecin) m.t.
10. Georg Preidler (AUT, Giant-Alpecin) à 26 sec.

Classement par points :

1. Marcel Kittel (ALL, Etixx-Quick Step) 106 pt
2. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 80 pt
3. Elia Viviani (ITA, Team Sky) 49 pt
4. Giacomo Berlato (ITA, Nippo-Vini Fantini) 44 pt
5. Giacomo Nizzolo (ITA, Trek-Segafredo) 43 pt
6. Arnaud Démare (FRA, FDJ) 43 pt
7. Sacha Modolo (ITA, Lampre-Merida) 29 pt
8. Moreno Hofland (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 28 pt
9. Kristian Sbaragli (ITA, Dimension Data) 28 pt
10. Alexander Porsev (RUS, Team Katusha) 26 pt

Classement de la montagne :

1. Maarten Tjallingii (PBS, Team LottoNL-Jumbo) 5 pt
2. Omar Fraile (ESP, Dimension Data) 3 pt
3. Julen Amerzqueta (ESP, Wilier Triestina-Southeast) 2 pt
4. Giacomo Berlato (ITA, Nippo-Vini Fantini) 2 pt

Classement des jeunes :

1. Tobias Ludvigsson (SUE, Giant-Alpecin) en 9h13’27 »
2. Bob Jungels (LUX, Etixx-Quick Step) à 5 sec.
3. Lukasz Wisniowski (POL, Etixx-Quick Step) à 12 sec.
4. Moreno Hofland (PBS, Team LottoNL-Jumbo) à 17 sec.
5. Stefan Küng (SUI, BMC Racing Team) à 22 sec.
6. Sean De Bie (BEL, Lotto-Soudal) à 23 sec.
7. Arnaud Démare (FRA, FDJ) à 26 sec.
8. Alberto Bettiol (ITA, Cannondale) à 33 sec.
9. Rick Zabel (ALL, BMC Racing Team) à 34 sec.
10. Liam Betazzo (ITA, Wilier Triestina-Southeast) à 39 sec.

Classement par équipes :

1. Giant-Alpecin (ALL) en 27h40’21 »
2. Team LottoNL-Jumbo (PBS) à 15 sec.
3. Etixx-Quick Step (BEL) à 20 sec.
4. IAM Cycling (SUI) à 36 sec.
5. Movistar Team (ESP) à 37 sec.
6. Astana (KAZ) à 44 sec.
7. Trek-Segafredo (USA) à 45 sec.
8. Cannondale (USA) à 47 sec.
9. BMC Racing Team (USA) à 58 sec.
10. Lotto-Soudal (BEL) à 1’09 »