Daryl, c’est une grande année pour le cyclisme sud-africain. Après la victoire de l’équipe MTN-Qhubeka sur Milan-San Remo, vous voilà en jaune…
Ces dernières années, d’autres sports dominaient en Afrique du Sud, si bien que nous ne recevions aucune aide de notre pays en matière de cyclisme. Le cyclisme devait se débrouiller par lui-même. Heureusement les choses ont commencé à changer. Et ces bons résultats donnent au cyclisme une chance de grandir, de montrer à quel niveau nous sommes capables d’arriver. Ce soutien nouveau nous a aidés à progresser et à mettre le vélo en avant dans le pays.

Vous avez fait vos débuts non loin d’ici, au VC La Pomme Marseille. Que vous reste-t-il de cette expérience française ?
A l’époque j’avais sauté sur cette opportunité qui s’était présentée à moi de venir courir en Europe alors que j’étais très jeune. Ce n’était pas facile pour moi. J’étais un gamin, je changeais de continent, j’avais le problème de la langue. Bref, tout cela était un handicap, mais cette expérience au VC La Pomme Marseille m’a permis d’apprendre beaucoup de choses, surtout vis-à-vis de moi. Après une saison à Marseille, j’ai préféré rentrer en Afrique du Sud. J’ai intégré l’équipe Barloworld en 2008, et j’ai progressé jusqu’à rejoindre le WorldTour.

Après un an chez RadioShack en 2010, vous avez été oublié par le peloton en 2011, contraint de rebondir chez MTN-Qhubeka avant de rejoindre NetApp puis Orica-GreenEdge en 2012. Vous devez beaucoup à cette formation ?
C’est sûr que l’équipe m’a vraiment donné une chance de retrouver le WorldTour et de pouvoir courir des courses de premier ordre. Je me suis amélioré chaque année durant ma carrière. Avec Orica-GreenEdge, j’ai progressé en tant que coureur. Le travail que je réalise dans cette équipe est plus important que ce qu’on attendait de moi quand on m’a engagé.

On dit que Stuart O’Grady vous a pris sous son aile…
Parmi les coureurs, oui, Stuart O’Grady a joué le rôle de mentor. Il a fait en sorte que je me sente vraiment chez moi dans cette équipe. Finalement c’est facile de s’améliorer quand on roule dans un groupe comme celui-ci. Et pour tout dire je n’avais jamais expérimenté cela ailleurs.

Vous devenez ce soir le premier coureur africain à porter le maillot jaune. Que ressentez-vous à cette pensée ?
C’est sûr que c’est une très grande joie pour moi. Mais aussi pour toute l’équipe puisque le maillot reste chez nous. Notre but, dans cette étape, était d’aller décrocher la victoire d’étape avec Matthew Goss. Le maillot jaune est venu en conséquence de la façon dont s’est produit le sprint, avec une petite cassure. Je n’aurais jamais cru que je porterais le maillot jaune, mais le contre-la-montre par équipes a changé la donne mardi. Simon Gerrans a pris le maillot, je me suis retrouvé dans la possibilité de le prendre. Je l’avais dans un coin de la tête, je savais que c’était possible.

Quelle répercussion va avoir votre maillot jaune en Afrique du Sud ?
Je ne pourrai vraiment répondre à cette question que lorsque je serai rentré chez moi. Quoi qu’il en soit c’est très important. Ça ne va pas changer ma vie mais sans doute celle du cyclisme sud-africain. Notre pays est en train de trouver sa place à l’échelon mondial.

Un autre coureur proche du continent africain est désormais attendu, Chris Froome. Vous avez couru deux ans avec lui chez Barloworld en 2008 et 2009. Quelle relation entretenez-vous ?
Nous nous connaissons bien. Il est venu vivre en Afrique du Sud et a participé à pas mal d’épreuves mais les courses sud-africaines sont très courtes et trop rapides pour un coureur comme lui. Elles ne lui convenaient pas. Il s’est davantage retrouvé sur les courses européennes. Lorsque nous étions ensemble chez Barloworld, Chris parlait déjà de son envie de gagner un jour un Grand Tour. Son professionnalisme est une source d’inspiration depuis longtemps. C’est formidable pour notre cyclisme. Ça montre que le cyclisme africain possède des talents capables de s’imposer sur des épreuves importantes.

Propos recueillis à Montpellier le 4 juillet 2013.