Jérémy Cabot CLMJérémy Cabot CLM | © Bénédicte Front

Pour commencer, peux-tu te présenter pour nos lecteurs ? 

J’ai 27 ans et j’habite depuis toujours dans la région de Troyes. Je fais du vélo depuis l’âge de 14 ans. Je suis plutôt un rouleur même si j’aime bien les courses vallonnées et difficiles. J’ai également obtenu mon diplôme d’ingénieur de l’Ecole Centrale de Lyon, spécialisé en simulation numérique.

Quand as-tu appris que tu ne serais pas conservé par la formation Roubaix Lille-Métropole ? 

Je l’ai appris début novembre, comme la plupart de mes coéquipiers j’imagine. J’espérais être conservé par l’équipe, mais je m’étais tout de même préparé au meilleur comme au pire.

Après deux saisons dans cette structure, quel est le meilleur moment que tu as vécu ? 

La fin de ma saison 2018 est une période qui me plait. J’ai terminé 6ème sur le contre-la-montre du Tour Poitou Charentes fin août, ça a été un soulagement. J’ai enfin pu montrer mes qualités de rouleur sur un chrono relevé et difficile. Je dirai que mon meilleur souvenir est ma 8ème place au Grand-Prix de Wallonie. Ça a été une superbe journée, j’avais de bonnes sensations. Puis voir que j’étais capable de jouer à la pédale avec des coureurs très forts (Stuyven, Barguil, Claes…), ça m’a fait énormément plaisir.

« Si je ramène le budget correspondant à ce que je coûte à une équipe, alors il n’y a plus de problème pour me prendre »

Campagne Jérémy CabotCampagne Jérémy Cabot | © Jérémy Cabot

Actuellement sans équipe pour 2019, comment as-tu eu l’idée de lancer une campagne de financement participatif ? 

Je me suis inspiré de ce qu’a fait Romain Le Roux l’hiver dernier. Il était sans contrat suite à l’arrêt de l’équipe cycliste de l’Armée de Terre et la cagnotte en ligne qu’il avait lancé lui a permis d’obtenir un contrat avec Fortuneo-Samsic. En fait, quand j’ai appris que je n’étais pas conservé dans l’effectif de Roubaix Lille Métropole pour 2019, j’ai appelé toutes les autres équipes afin d’obtenir une place. On m’a répondu que mon profil était intéressant, que je méritais une place chez les pros mais qu’ils étaient tous complets. Comme les budgets ne sont pas extensibles, ils ne pouvaient pas prendre un coureur supplémentaire. Je me suis alors dit que j’allais moi aussi rechercher des fonds pour financer ma place. C’est simple, si je ramène le budget qui correspond à ce que je coûte à une équipe, alors il n’y a plus de problème pour me prendre.

Dès les premiers jours, de nombreuses personnes te soutiennent, ce qui est de bon augure. En contrepartie du don, que peuvent-elles gagner ? 

En effet je suis agréablement surpris du soutien reçu dès le lancement de la campagne. En échange de leur aide, les gens peuvent obtenir un bidon, une casquette, un maillot dédicacé, un entrainement en ma compagnie, un accès VIP sur l’une de mes courses. Des maillots d’autres coureurs sont également à gagner, un de Bryan Coquard (Vital Concept) et de Julien Bernard (Trek Segafredo), une combinaison bleu/blanc/rouge d’Anthony Roux (Groupama FDJ), un maillot de champion du monde de Morgan Kneisky, et bien d’autres… Il y en a pour tout le monde et tous les gouts !

« Ca prend du temps, mais j’ai bon espoir d’y arriver »

Jérémy Cabot Tro Bro LéonJérémy Cabot Tro Bro Léon | © Camille Nicole

Fais-tu d’autres démarches que cette campagne participative ? par exemple avec des entreprises locales ? 

Oui bien sûr, je bénéficie déjà du soutien d’une entreprise locale, en termes de sponsoring. Je continue mes démarches afin de trouver d’autres partenaires. Cela demande du temps, il faut souvent dialoguer afin d’expliquer ma démarche, et insister sur les contreparties dont les entreprises peuvent bénéficier. Elles prennent souvent peur quand elles voient la somme que je dois réunir. Elles imaginent que je vais leur réclamer 30 000 euros, sans rien avoir en retour. Alors que c’est totalement l’inverse, je recherche principalement des petits soutiens à la hauteur de leurs moyens, et qu’ils bénéficient en retour d’une visibilité sur les réseaux sociaux, d’une invitation VIP sur mes courses…

Es-tu en contact avec une ou plusieurs équipes en particulier aujourd’hui ?  

Oui j’ai l’assurance d’avoir un contrat pour 2019 à condition que je parvienne à réunir la somme nécessaire. C’est pourquoi j’ai encore plus besoin du soutien de tout le monde.

Si malheureusement ça ne fonctionne pas, tu repars dans les rangs amateurs en 2019 ? 

Je suis convaincu qu’on va y arriver, alors je ne pense pas trop au reste. Mais effectivement, si cela ne fonctionne pas je repars en amateurs en 2019, avec pour objectif de montrer que j’ai ma place chez les pros.  

« Je ne vais pas baisser les bras face à cette difficulté » 

Un diplôme d’ingénieur en poche, tu pourrais vouloir travailler. Pourquoi est-ce si important pour toi de ne pas t’arrêter là-dessus ? 

Tout simplement parce que j’aime trop le vélo. Depuis tout petit je veux être pro, et maintenant que j’y suis, je ne veux pas abandonner. J’ai rencontré beaucoup de difficultés pour allier études et sport de haut-niveau, surtout pendant ma prépa et ma formation à Centrale Lyon. J’ai arrêté deux fois le vélo, et je n’ai jamais baissé les bras. J’y ai toujours cru et j’ai bossé deux fois plus pour rattraper le temps perdu. Alors une nouvelle fois, je ne vais pas baisser les bras face à cette difficulté. Je pense avoir vraiment le niveau pour rester dans le milieu professionnel, je ne souhaite pas que ma carrière s’arrête sur des problèmes financiers. Je travaillerais bien en tant qu’ingénieur après ma carrière, mais ce n’est pas encore pour tout de suite.

Par Maëlle Grossetête