81 millions d’euros. C’est ce qu’a permis de récolter la 26ème édition du Téléthon ce week-end grâce notamment aux nombreuses manifestations organisées partout en France. Pour refléter ce bel élan de générosité pour aider la lutte contre la myopathie, focus sur l’une d’entre elles : les 24 heures de Cavaillon. Ou quoi de plus normal que des valides qui pédalent pour aider à vaincre la maladie. A Cavaillon, au sud du Vaucluse, pas loin du Luberon, le vélodrome de 443 mètres en ciment a été ouvert et remis (presque) à neuf par les services techniques de la mairie pour les besoins de la bonne cause. Luc Royer, l’instigateur, président de Chilkoot, « la compagnie des pionniers », avait défini son aventure partagée comme une première destinée à des pionniers, des jusqu’au bout d’eux-mêmes qui devraient affronter deux tours d’horloge, seuls ou en groupes.

Quatre catégories de vélos sont admises : les vélos couchés (mais pas avant 15h00, une fois les boucles terminées !), les tandems, les fixies et les vélos classiques de route, par équipes de six ou moins. Chacun paie 15 euros et une partie de l’argent va au Téléthon. Les installations sont celles du Rugby Club de Cavaillon : la pelouse sert à installer les tentes, voire camper genre igloo, la tribune protège du mistral et les vestiaires font office de coin-cuisine, de coin repos, avec des bancs de massages transformés en lits. Un lieu de vie où il fait bon se réchauffer car, côtés pelouse, piste, tribune voire fourgons-dortoir, on est à 0° et c’est parti pour durer au moins jusqu’à 10 heures du matin, moment où le soleil a décidé de se pointer et où le mistral a choisi de baisser de plusieurs tons.

Le système est simple : tourner, accumuler les tours et, dans chaque catégorie, l’équipe vainqueur sera désignée au nombre de kilomètres parcourus. Les vélos classiques sont les plus nombreux, 65 coureurs au total vont enchaîner les tours avec des vélos et des tenues qui représentent toutes les disciplines du vélo. Un beau mélange des genres, un choc culturel, mais une seule et vraie passion, le vélo. Se dépasser, aller au bout de soi-même et s’entraider pour aller au bout de la nuit d’abord, puis du défi qu’on s’est choisi car en solo comme par équipes c’est un engagement vis-à-vis de soi et/ou vis-à-vis des collègues. Si un lâche, ce sont les autres qui vont devoir en faire plus que prévu, cruel dilemme. L’entraide plus l’esprit d’équipe font la différence.

Tout commence samedi 8 décembre vers 10h30, ou plutôt doit commencer, car à cette heure-là, la piste est verglacée. Pas question de faire le tour lancé pour déterminer l’ordre des départs. Sur 24 heures, on aura bien le temps (!) de déterminer qui va le plus vite mais surtout le plus longtemps. L’ambiance côté météo est posée : à peine 5° l’après-midi, du mistral qui souffle déjà à 30/40 km/h, mais qu’on espère finalement ! Pourquoi ? L’équation est simple : qui dit mistral dit pas d’humidité, donc pas d’angoisse à se retrouver par terre sans avoir vu le verglas. De l’autre côté, le mistral, surtout quand il va à cette vitesse, c’est froid, et les passages de relais la nuit se font en l’absence de spectateurs, si ce n’est la musique des Clashs, entre autres, voire de temps en temps du directeur de course qui encourage tous ces braves.

15h00, c’est parti pour deux fois douze heures. Chacun a fait sa stratégie. Des relais courts, une heure ou moins, des relais longs, deux heures. Mais comment envisager la nuit qui va congeler les organismes et mettre à mal les moyennes horaires ? On gère comme on peut, on rajoute une couche, genre le coupe-mistral, bien utile, les couvre-chaussures… Le néoprène est à la mode, les gants chauds aussi, et les bandanas, tant qu’on y est !

Dès la première heure, on sait. La barre a été mise très haut par l’homme des 24 heures, Jean-Pascal Roux. Celui qui a déjà réalisé onze montées du Ventoux par Bedoin avant de passer la barre des 834 kilomètres (il en a fait 839) sur la boucle de 13 kilomètres de Caderousse en deux tours d’horloge réalise 39,880 kilomètres dans sa première heure et sur son Scott Plasma. 90 tours, personne ne songe à prendre sa roue et profiter de l’aspiration, histoire de ne pas exploser. C’est la stratégie que vont pourtant prendre la plupart des coureurs. Rouler groupés dans la mesure du possible, assurer des relais, surtout la nuit, histoire de rester concentrés et de mieux voir défiler les tours en attendant l’hypothétique soleil qui, finalement, va poindre et, comme par magie, réchauffer les cœurs, les corps, et ramener les spectateurs sur le bord de la piste. C’est fou comme un rayon peut réchauffer l’atmosphère, en hiver, sur un vélodrome ouvert à tous les vents !

Les spectateurs, les supporters, les équipes entre elles ont été toutes solidaires, la communauté du vélo a fait parler la solidarité. La même cause anime tous les protagonistes, la même difficulté à affronter, le vélo en commun dénominateur, ça rapproche et ça fait qu’on a les croissants chauds à 8 heures du mat, le pain frais avec du Nutella pour les gourmands, la soupe chaude. Manque plus que le barbecue et on s’y croirait ! Le tour d’honneur a rassemblé tous les participants cyclistes, les vélos urbains, les solos, les équipes, les jeunes, les moins jeunes, les valides, les non-voyants, en tandems, etc. Le podium aussi et le trophée, quoi de plus normal, on s’est fait plaisir et c’est sûr que la nuit suivante a été plus douce que ce samedi soir d’élection des miss.

On espère qu’il y aura une deuxième expérience de ce type, un peu plus de coureurs et d’équipes (même si la piste limite le nombre). Le Vaucluse, ce n’est pas que son Géant. Cavaillon, ce n’est pas que la production de melons. Des initiatives vélo pour le Téléthon, il y en a plein, et même pas assez encore. Bravo à tous les protagonistes de cette édition pionnière, ça fera pas mal de bons souvenirs pour toutes et tous. A l’année prochaine, pour la date c’est facile, pour le lieu aussi, ne manque plus que vous ! Au fait, le record établi par les Scott-Bédoin 101 est à 815 kilomètres. On espère qu’il sera battu, surtout si chaque kilomètre rapporte 10 euros au Téléthon.