Cédrick, comment s’est passé le Roc d’Azur côté compétition ?

Comme l’année dernière, je me suis aligné sur le roc marathon, épreuve de 86 km classée UCI Marathon séries.  Un effort qui me correspond bien puisqu’il ressemble à celui rencontré en cyclo de 130/150 km. Grace à ma position à l’arrivée l’année dernière, j’ai pu accéder au sas élite sur la grille de départ. J’ai plutôt fait une bonne course avec le matériel et la préparation du moment, car j’ai malheureusement cassé le cadre du vélo de XC qu’on m’avait prêté une semaine avant l’épreuve. Du coup,  j’ai fait la course avec mon vtt perso, un all mountain avec 130 mm de débattement, tige de selle télescopique, disques de 180 mm, pneus de section 2.3,  et qui doit peser dans les 13 kg. Je finis 39èmel.

Avoir un vtt « en dernière minute », est-ce rédhibitoire pour faire une perf à ton niveau ?

C’est faire du vtt en dernière minute qui est délicat, et pensant que je n’aurai pas été dans le coup avec mon vélo, je n’ai pas fait de reconnaissance partielle du parcours. Le principal était déjà de partir bien placé sur la grille. Pour le reste, ça a été une surprise de voir que sur les 10 km très roulants du départ, j’arrivais à doubler. J’ai même roulé plus vite sur les montées cette année. 

Te verrais-tu revenir sur une saison complète de vtt, type enduro ou xc marathon ?

Faire une saison de marathon, oui j’aimerai, car c’est le format qui me correspond le mieux. Mais, courir en cyclo c’est plus facile pour moi. Techniquement en vtt,  j’ai beaucoup perdu. Il faut être fort dans ce domaine, sinon on passe son temps à remonter les places perdues.

Côté cyclos, quel bilan tires-tu de cette saison ? 

Je m’étais fixé d’être à 100% de mes possibilités sur l’étape du tour pour viser une place dans les 5, et aussi de remporter une victoire sur une Haute Route. Donc, l’objectif est atteint. Pour le reste des épreuves, ça a été difficile. Je m’entraine 2/3 fois par semaine en trail, juste pour le plaisir que cela m’apporte de courir en montagne, et cela a eu un impact sur les résultats à vélo. En course, je me suis souvent retrouvé à ne plus pouvoir suivre certains gars à la fin. J’avais failli laisser mon dossard pour l’étape du tour, car je ne me voyais pas m’y présenter dans ces conditions. Doubler les deux disciplines, c’est forcément perdre des watts à vélo.

Si tu devais faire une trilogie des bons et mauvais moments, quelle serait-elle ?

Un top 3 des bons moments de ma saison : en premier, l’enchainement de la Fausto Coppi avec la Haute Route Alpe d’Huez et l’étape du tour, le tout sur une semaine ! En deuxième, la Haute Route Dolomites où je passe ma semaine à défendre un maigre matelas de 50″ au classement général, et en troisième, la victoire du KOM challenge de l’étape du tour sur le cumul de temps des montées du col de Vars et de l’Izoard.

Les moments de galère : on va dire le froid subit sur la Gran Fondo Strade Bianche qui m’a obligé à abandonner, mais aussi une forme optimale jamais évidente à trouver cette saison et qui m’a un peu fait douter.

Que penses-tu du fait que ce soit des gars de devant qu’on retrouve dans les brigades éco-cyclos ?

Je trouve carrément utile d’avoir un représentant de ces brigades à l’avant, car même en tête, on constate de mauvaiscomportements. Du fait aussi que certains coureurs viennent occasionnellement sur des cyclos, gardant leurs mauvaises habitudes et courant comme s’ils étaient sur une épreuve FFC. J’entends par mauvaises habitudes, de jeter évidemment ses déchets par terre, mais aussi de rouler trop au milieu ou trop à gauche de la route comme en course. Il faut pouvoir être un peu partout, et peut être aussi les pourvoir d’un rôle de capitaines de route, capables de demander aux coureurs d’assurer sur certains secteurs dangereux, ou de faire cesser des ravitaillements sauvages. On pourrait les identifier avec un brassard, pourquoi pas, pour que clairement les coureurs puissent les distinguer et prendre en compte leurs remarques. 

Quelle est ton opinion sur le fait que des coureurs coupent les virages,  jouent leur vie… Et ne soient pas mis hors course par les organisateurs ?

C’est important de parler de la sécurité, je trouve que la situation se dégrade. Oui, on peut pointer du doigt certains coureurs qui à un moment donné vont prendre certains risques. J’en ai été témoin, et on pourrait envisager de sanctionner ces attitudes, encore faut-il que cela puisse être constaté.

J’ai l’impression que certains coureurs sont prêts à aller assez loin dans la prise de risque pour gagner une cyclo. Mais, à force, on commence un peu à les connaître. Donc, ça m’arrive maintenant d’aller dire aux coureurs que sur certaines descentes on « assure ». On a procédé ainsi quand il y avait des pros avec nous. Il n’était pas question de leur faire prendre des risques en descente, et nous ne voulions pas qu’ils aillent dire à leurs amis que les cyclos sont des kamikazes.

Mais, selon moi, ce qui se dégrade surtout, ce sont les conditions dans lesquelles les courses se déroulent. Ce que je vois souvent, ce sont les voitures que l’on croise. Pourtant, il y a de nombreux motards ouvreurs et je remarque que les automobilistes n’y prêtent que très peu attention. Il m’est arrivé d’être signaleur à moto, et j’avoue qu’il y a de nombreux automobilistes qui ne modifient en rien leur conduite, ils ne se serrent pas et ne ralentissent pas. Et pourtant, j’étais en tenue de policier avec les gyrophares actionnés ! Donc, j’imagine bien que les motards en chasuble jaune sont encore moins respectés ! Qu’un coureur se prenne une voiture dans un virage me choquerait tout autant qu’un automobiliste s’étant engagé dans ce même virage, malgré les injonctions des ouvreurs annonçant des coureurs. J’en veux aussi aux pouvoirs publics en France, nous n’avons jamais droit à des agents de police pour ouvrir la route. J’ai même vu des agents être présent au bord de la route pour nous faire des remontrances parce que nous ne roulions pas complètement à droite de la chaussée. Il y a un réel problème, alors quand on entend que l’objectif va être mis sur le dopage mécanique, je conseillerai plutôt de mettre le paquet, en premier lieu, sur la sécurité.

Quid de ceux qui jettent des papiers ?

Pour ceux qui jettent des papiers, bidons, gels… Je serai plus concis en optant pour la mise hors course pure et simple s’il est pris en flagrant délit (sur la base de témoignage de plusieurs coureurs). Je trouve ces agissements d’une stupidité ! Pour vous dire, j’ai même déjà vu un coureur jeter ses gels non avalés pour alléger ses poches en vue de l’arrivée !

Quel est ton avis sur les assistances « sauvages », disons les voitures qui suivent et ravitaillent leurs coureurs en dépit du règlement ?

On en constate sur chaque épreuve. Cette année, j’ai vu un coureur avec camping car suiveur, qui a failli nous faire tomber en voulant attraper un bidon sur du plat. J’ai eu droit régulièrement à la voiture qui double le groupe toutes les 5 minutes pour s’arrêter un peu plus haut afin de ravitailler un coureur, au scooter suiveur qui ravitaillait ses coureurs tous les 2 km, et qui, par la suite, faisait la navette pour leur donner les écarts. Je pense qu’à ce niveau là, on pourrait aussi envisager des mises hors course. Nous devons faire remonter ces problèmes aux organisateurs car cela devient récurrent.

Les championnats de France Masters, du Monde… Est-ce  toujours du cyclosport ?

Tout dépend du format de l’épreuve (le dénivelé, la longueur des montées, s’il s’agit d’un circuit) parce que, dans l’idée que je me fais du cyclosport, ce sont plutôt des parcours montagneux longue distance. Pour les championnats nationaux ou mondiaux, il serait bien, soit d’alterner les formats chaque année, soit de créer un national de cyclosport et laisser le championnat de France Master sur un format plus favorable aux coursiers.

Tu es devant et tu gagnes parfois des prix en nature. Faut-il limiter ceux-ci afin d’éviter que ceux qui veulent « vivre » du cyclosport soient tentés de venir ?

Quand on est devant, il y a assez peu de gain, à moins de vraiment gagner tous les dimanches. Ceux qui veulent en vivre se contentent du sponsoring, et donc, la simple victoire les contente, car elle leur permet de satisfaire leurs partenaires. Pour ce qui est des lots en matériel, je trouve plus équitable de les attribuer par tirage au sort. Sur la Corima Drôme Provençale, le concept est pas mal, car les lots sont tirés à l’avance et remis au retrait des dossards s’il est gagnant. 

Le fait que des pros soient sur des cyclos, tu trouves ça bien ou pas? Et qu’ils jouent la gagne ?

Je suis pour qu’ils soient classés, même lauréats. Dans ce dernier cas, à eux de voir si ce genre de victoire peut les rendre populaires aux yeux des participants. J’en doute !

Après, il arrive qu’ils influent sur la course, je pense, notamment, à Julien Bernard sur l’étape du tour, puisqu’il a beaucoup roulé en tête du peloton sur les différentes échappées. Ce n’est pas un reproche envers lui, mais s’il n’avait pas été là, l’épreuve aurait été vraiment différente. Sinon, cette année, j’ai pu rouler avec Davide Rebellin, Amael Moinard, Nicolo Bonifacio, Tim Wellens, Philippe Gilbert et Franck Schleck. Pour moi, ça a été un vrai plaisir que de pouvoir les côtoyer en course.

Pour reparler sport, quelles seront tes ambitions 2018 ?

Je pense me focaliser à nouveau sur l’étape du tour, car il ne faut pas se leurrer, quand on dispose de partenaires, c’est une épreuve quasi incontournable. Ensuite, j’aimerais remporter la Haute Route Alpes, car c’est certainement la plus relevée, et celle qui manque à mon palmarès !

Une nouvelle cyclo voit le jour chez toi, le Tour Nice Métropole, que penses-tu de ce concept particulier et comptes-tu y participer ?

C’est une cyclo qui avait été organisée il y a 2 ans, et qui avait disparu du calendrier.

Le concept du chrono sur les cols uniquement est un format à part, assez rare, même si l’on peut trouver certaines épreuves avec des arrêts du chrono. Mais, en général, les kilomètres en course sont supérieurs aux liaisons. Là, il s’agira d’effectuer des spéciales, à l’image d’un rallye. Cela a son charme, car ça permet entre chacune, de pouvoir s’arrêter aux ravitaillements, de profiter des paysages, et de rouler décontracté entre concurrents. Pour les chronos, il serait à mon avis préférable que le drafting soit interdit. C’est le genre de chose qui me plairait et qui pourrait me servir de préparation aux épreuves estivales.