Tout était une question temps. La quatrième étape de la Haute Route rendait visite à un des mythes alpestres : le col du Galibier. Depuis Valloire, chaque concurrent s’élançait sous un beau soleil à l’assaut des pentes du géant de 2642 mètres. Il y a quelques années, sur cette même ascension, mes frères se démenaient et me donnaient envie de faire du vélo. Et la nostalgie a déjà fait son effet. Hier, dans la descente, l’émotion m’avait envahie et avait noyé mes yeux. Aujourd’hui, mon regard se tourne vers le sommet de cette ascension fabuleuse. Certes, la montée de 17,6 kilomètres est chronométrée mais l’enjeu, le mien, est ailleurs. Ce col, c’est un rêve d’enfant.

Sans échauffement, sans cardio et sans capteur de puissance, ce chrono allait avant tout être une gestion des sensations et des sentiments. La montre ne m’intéresse pas mais ce col, oui. Cette route à flanc de montagne est tout simplement majestueuse. Le beau temps nous laisse découvrir les lacets laissés derrière nous dans lesquels j’aime à dire que je vois « ma vie défiler ». Ces moments de solitude sont des instants rares, que l’on savoure dans ce décor somptueux. Interrompus parfois par des concurrents rattrapées ou revenus sur moi, je profite du Galibier à mon rythme. Qu’importe le résultat. Douzième sur trente du classement féminin, je suis néanmoins à ma place mais je préfère me souvenir de cette photo entre filles, devant la pancarte, dans cette lumière si spéciale. Nous commençons à nous connaître et à nous reconnaitre, et j’espère partager un dîner avec elles avant la fin de cette Haute-Route.

J’aurais aimé utiliser un plateau de 34 dents au lieu de mon 36 dents, mais, malheureusement, impossible de changer. Tant pis. Des images plein à la tête, j’accueille le temps de récupération supplémentaire avec joie. La fatigue est bien là, le massage est attendu avec impatience, la sieste aussi. Je vais aussi savourer les spécialités régionales comme le Beaufort. Evidemment, ce n’est pas recommandé pour la diététique d’un coureur mais cela fait tellemnt de bien au mental. Et puis, il faut noter que je me suis bien affûtée depuis le départ alors je ne vais pas bouder mon plaisir ! Et du plaisir, je pense qu’il en reste encore beaucoup à prendre sur cette Haute Route des Alpes.