William, tu as remporté le Challenge Cyclo DT Swiss l’an dernier. Comment t’es-tu entraîné cet hiver alors que tu es moniteur de ski et habitant la Toussuire ?
Habituellement, j’observais une longue coupure et maintenais un coup de pédale hivernal sur home-trainer uniquement. Ma reprise sur la route s’effectuait début mars. Maintenant, je coupe trois à quatre semaines en octobre, puis j’essaie de rouler régulièrement de novembre jusque mi-décembre selon la météo. La saison de ski débute alors et je roule sur home-trainer le soir ou le matin en semaine et une grosse sortie sur route le samedi. Ensuite, le mois de janvier est plus calme en station et depuis deux ans je m’offre le luxe de partir rouler dans le sud. Un stage de dix jours, puis une semaine ski/home-trainer, puis un autre stage de six jours. J’accumule ainsi les kilomètres avec une base solide avant la grosse période sur les skis.

En quoi consiste-t-elle ?
Ce sont cinq semaines avec des séances spécifiques sur home-trainer en semaine et une sortie le samedi. C’est la période la plus éprouvante de la saison pour moi. Maintenir un entraînement après une journée non-stop sur les pistes est difficile physiquement et mentalement. Puis arrive le mois de mars. Je travaille jusqu’à 14h puis je fonce sur mon vélo dans la vallée de la Maurienne. Les températures douces cette année m’ont permis de remonter régulièrement jusqu’à La Toussuire. Je passe déjà beaucoup de temps sur la neige par mon travail donc dès que je peux me libérer je pars rouler. Pour moi les stages en altitude avec les sports de glisse c’est mon quotidien.

Par quoi passe ton entraînement d’hiver ?
En complément, je travaille mon gainage abdo en salle parfois et à la maison. Sur les périodes d’activités intenses, j’ai du mal à maintenir le cap. Mais là encore, le ski me permet de peaufiner ma préparation physique.

Tu sors d’une saison très réussie. Est-ce que c’est l’occasion de ne rien changer ou aimes-tu innover chaque intersaison ?
Pour ma préparation, je pense avoir trouvé le rythme optimal par rapport à mes contraintes professionnelles et géographiques. Pour le contenu, je continue de m’appuyer sur le programme de mon coach Pierre Bourlot. Je lui ai juste donné les grandes lignes de mes objectifs et ma vision. C’est là que j’aime changer de cap et partir vers de nouveaux challenges. Donc ma saison et ma préparation seront différentes.

As-tu tendance à prendre du poids pendant l’hiver ?
C’est devenu le point le plus contraignant pour moi. Ayant été longtemps en surpoids avant mon retour sur un vélo, mon corps semble s’en souvenir. Dès que je diminue mon activité sportive, la prise de poids est immédiate et conséquente. Sans excès démesuré et avec une alimentation saine, fin octobre j’affichais 7kg de plus. Là encore, je m’appuie sur les conseils de mon nutritionniste Pierrick Fontaine.

Comment gères-tu le retour en forme?
Je ne m’affole pas et le retour en forme se fait très progressivement. Durant l’hiver, mes activités nécessitent une alimentation suffisante. Essayer de s’affûter ici serait une erreur que j’aurais pu commettre d’ailleurs. Aujourd’hui, j’ai donc encore 3 kg en trop qui devraient s’évaporer dès que la route s’élèvera ! Mon poids de forme est de 73 kg pour 180 cm. Ce qui pourrait sembler trop pour espérer suivre les petits grimpeurs, mais Pierrick a estimé qu’en dessous il y aurait un risque de méforme. Ma corpulence est ainsi faite et à ce poids ma masse grasse est de 6%. Sur ce point, je pense que certains coureurs commettent des erreurs pour maigrir à tout prix.

Pour cette saison, quels seront tes partenaires ?
De nombreuses entreprises locales m’aident à financer les frais de ma saison. Je souhaite dédicacer chaque course que j’effectuerai à un sponsor via les réseaux sociaux. Je suis particulièrement satisfait des rôles d’ambassadeur qui m’ont été confiés à travers mon aventure sportive. J’avais à cœur de porter les couleurs de mon territoire. Je deviens ambassadeur de La Maurienne « plus grand domaine cyclable du monde ». Avec la conviction qu’elle devient une destination incontournable pour des séjours cyclogrimpeurs. La fidélité de ma station de La Toussuire est également reconduite.

Qu’en est-il de tes partenaires techniques ?
Je deviens ambassadeur Mavic. Le privilège de profiter de produits prestigieux que j’apprécie à sa juste valeur. Pour mes montures, je roulerai sur deux bijoux Merckx. Je regrette le manque de réactivité et d’intérêt de certaines marques de cycles pour le cyclosport. Mais ce contrat avec les vélos Merckx était une belle surprise. De premiers échanges très pros, une belle disponibilité. Le premier modèle San Remo me donne une forte impression. Ce sera à confirmer en course dimanche en attendant le EM525 fin mars. Je ne regrette pas d’avoir franchi cette frontière ! Renault avec qui j’avais un partenariat a également souhaité me mettre un véhicule à disposition. Tout ceci apporte une motivation non négligeable.

Dans quelle mesure ?
En plus de l’aide financière, ce réseau que j’ai tissé, apporte le sens que j’espérais à mon parcours. Associer mes efforts physiques à des entités est enrichissant. Il y a un réel intérêt pour le cyclosport et certaines marques percutent. Les partenaires qui m’entourent ont été séduits par mon projet et vont me permettre d’enchaîner un programme magnifique. Mon but est aussi de communiquer efficacement et avec conviction sur ces rôles.

Par quelles cyclos passera ton programme ?
Je ferai une trentaine de cyclos avec des objectifs forts sur certaines. Je débute par la Corima-Drôme Provençale, puis certainement la Morvandelle, la Granfondo Gassin Golfe de Saint-Tropez et la Cyclo Corse. Je dois valider mon programme la semaine prochaine avec mon entraîneur. Je pense à la Time Megève Mont Blanc, le challenge Vercors. Je réfléchis à une belle course à l’internationale à New York. Mes objectifs principaux seront la Marmotte, l’Etape du Tour, Les Hautes Routes Dolomites et Mont Ventoux, le Tour de l’Ain, les Championnats de France et les Championnats du Monde Masters à Albi.

Aborderas-tu ces Championnats du Monde dans un esprit de revanche ?
Revanchard non, car les ennuis mécaniques sont indépendants de la bagarre. J’ai été très déçu en Australie, mais je l’ai vite digéré. Ce ne devait pas être pour moi ce jour. Je suis déjà qualifié pour Albi grâce à ma seconde place sur l’Amy’s près de Melbourne. Ce sera un objectif fort, mais ce n’est pas celui qui me fait avancer aujourd’hui. Sportivement, d’autres échéances me font rêver d’ici là. Je connais le parcours, j’ai terminé 2ème de l’Albigeoise 2016. Il manque une difficulté majeure à mon goût. J’adapterai ma préparation en août pour m’y présenter au mieux, mais la concurrence va être dense dans ma catégorie sur ce genre de profil. Les Mondiaux 2018 à Varèse en Italie semblent être davantage taillés pour moi !

Selon toi, quels éléments faudrait-il changer sur les cyclosportives ?
C’est vraiment sur les cyclosportives que j’ai retrouvé le goût de la performance. À mon âge c’est le support idéal pour m’exprimer. En quelques années, j’ai sillonné des épreuves d’envergure parfois opposées. J’ai rarement été déçu en y trouvant des plaisirs différents. Je suggérerais la mise en place d’une commission entre les organisateurs, les fédérations et les coureurs. Le but serait de créer un dialogue dans un souci d’amélioration des règles. Par exemple, interdire l’inscription de coureurs ayant été sanctionnés pour dopage durant leur carrière. Je suis de nature indulgente et je n’y portais pas attention, mais mon avis sur le sujet a évolué. Même si elles ont changé, ces épreuves revendiquent un « esprit « et la présence de ce genre d’individu y est contraire. J’aimerais également instaurer des contrôles plus réguliers. D’ailleurs, bon nombre de coureurs seraient favorables à une majoration des inscriptions pour le financer. Non pas que je pense que ces pratiques soient conséquentes, mais cela crédibiliserait nos efforts et atténuerait les suspicions. Je dois cependant signaler que j’ai été agréablement surpris de l’évolution de ces courses. D’ailleurs l’engouement des participants est une preuve de réussite.

De manière plus générale, que ferais-tu pour le vélo ?
J’ai redécouvert le vélo il y a peu. Depuis les années 90, je ne m’y suis plus intéressé si ce n’est par les courses médiatiques. Je ne connais donc plus suffisamment le milieu du haut niveau pour suggérer une mesure. De plus, je n’ai pas une culture cycliste très pointue. Je connais bien mieux le cursus du ski avec un fils en activité chez les jeunes. Par contre, j’ai pu constater une évolution importante en côtoyant les pros d’Ag2r La Mondiale qui viennent s’entraîner à La Toussuire. Leur discours et leur approche me font penser qu’un travail de fond s’est installé. J’ai pu également assister à la présentation du centre Chambéry Cyclisme Formation. Un bel exemple de réussite avec la mise en place d’une structure qui faisait défaut à mon époque.