Dans le contexte habituel de réduction de l’empreinte carbone, il est évident que le vélo en général semble le moyen de locomotion propre par excellence. Mais qu’en est-il de son pendant sportif, le cyclisme ?

Revenons tout d’abord sur le vélo comme moyen de locomotion : si le vélo musculaire se pose déjà comme un objet permettant de se déplacer d’un point A à un point B sans émettre de CO2, le sujet est d’actualité concernant les vélos électriques dont le recyclage des batteries ainsi que la façon de les produire (extraction de terres rares notamment) ne sont pas anodins en termes de pollution.

 

« Rouler à vélo c’est propre »

Pour autant, est-ce qu’un vélo musculaire reste transparent ? A première vue oui, puisque le cycliste se rendant à son travail ne pollue pas, à l’inverse de son voisin au feu tricolore dans sa voiture particulière.

Oui, mais :

–          que fait-on du vélo lui-même une fois qu’il est rendu complètement obsolète par l’accumulation des années et/ou des kilomètres ?

–          que fait-on des pièces d’usure en métal, comme les pédaliers, plateaux et chaines ? Une anecdote récemment entendue à ce sujet reste parlante : en se rendant dans un magasin de vélo dont le parc de location tourne à plein régime quasiment toute l’année, un « grand bidon » a attiré l’attention. Ce vrai espace de stockage accueillait des dizaines de chaines qui avaient atteint leur quota d’usure. A la question posée au vélociste « que deviennent ces chaines ? » la réponse ne s’est pas faite attendre : « à la poubelle quand le bidon est complètement plein ». Pourtant il est dommage que ces kilos de métal – devenant des milliers de tonnes à l’échelle de la planète – ne trouvent pas une meilleure issue que dans la même poubelle contenant des pelures de bananes et des emballages de yaourts.

–          que fait-on des cadres carbone qui ont envahi le marché jusqu’à s’inviter sur les vélos aux tarifs démocratiques ?

 

Giro01Le Giro fait la promotion de l’écologie | © LaPresse

Et le sport dans tout ça ?

Il est bien possible l’image d’un professionnel, jetant dans un ravin les « 2,7 g » de l’emballage du gel qu’il a pris avant un col, vous fasse bondir alors qu’on attend de lui qu’il nous fasse rêver par ses performances mais aussi par son comportement. D’amoureux de la nature serait-on tenté d’écrire. Oui, car cet emballage-là, à coup sûr ne sera pas récupéré car il est impossible d’imaginer que les services de nettoyage puissent tout voir.

On se demande encore pourquoi ces comportements anti écologiques ne soient pas sanctionnés en 2019 ni même mentionnés à la télévision, à de rares exceptions près. D’autant que des zones vertes prêtes à recueillir ces « encombrants » sont placés de façon régulière sur le parcours. Messieurs les Directeurs Sportifs : et si cela faisait partie de votre briefing pour 2020 ?

On se demande aussi pourquoi les fabricants de textile ne montrent pas eux aussi systématiquement l’exemple en proposant pour tous les maillots (destinés aux pros comme aux amateurs d’ailleurs) une poche spéciale déchets. Certes, cela existe déjà chez plusieurs marques mais l’évolution reste encore timide et malheureusement les fabricants préfèrent généralement mettre en avant la petite poche zippée pour les clés.

Mais ça bouge quand même du côté des pros ! Sur le dernier Giro par exemple, a été mise en place une stratégie « Ride green » (« roulez vert » en français) avec notamment des récompenses pour les municipalités recyclant le plus de déchets. 2 chiffres pour donner le tournis : sur les 3 semaines ont été récupérés plus de 10 tonnes de déchets organiques et 53 tonnes de papiers. En comptant les autres catégories, le total s’élève à 75 tonnes dont 92% ont pu être recyclées. En prenant un peu de recul, il est possible de se demander pourquoi tant de déchets ont pu être recyclés alors que l’on peut imaginer que spectateurs, coureurs et suiveurs pourraient être autonomes plutôt que devoir imaginer des stratégies permettant d’être efficaces après la course. De plus, les chiffres sont donnés ici pour le Giro mais ceux du Tour doivent être encore un cran au-dessus.

Sur une étape du Tour de France, jusqu’à 2500 bidons sont balancés sur le bord des routes (heureusement souvent récupérés en guise de souvenir) mais les collectivités de l’Alpe d’Huez ont déjà mentionné 50 tonnes de déchets ramassés suite au passage du Tour alors qu’une tournée périodique le reste de l’année n’enregistre que 4 tonnes.

La pollution engendrée l’est aussi par le suivi de la course : sur le Tour, les 160 véhicules de la caravane ne sont pas anodins. Le discours ici n’est pas de diminuer leur nombre car c’est l’une des sources de spectacle mais à côté, les voitures suiveuses sont très nombreuses et parcourent chacune bien plus que les 3300 km de la course officielle. Ce message a déjà été entendu par ASO qui a annoncé 45 véhicules électriques sur les 120 de son organisation avec le but de passer l’ensemble du parc en électrique ou hybride d’ici 2 ans. Reste le problème du recyclage des batteries comme évoqué plus haut, mais ceci est un autre débat qui mérite plus que cette tribune pour se développer. Tout comme le marché de l’automobile tente de s’orienter vers plus de vertus écologiques, le parc automobile des équipes va inévitablement suivre son évolution puisque les véhicules utilisés sont toujours récents.

 

Si le cyclisme n’est pas un sport aussi écolo qu’il n’en a l’air, à l’image de la société en général, les mentalités évoluent. De toutes façons, il y a urgence à agir de tous les côtés pour éviter de voir comme ces jours derniers le glacier du Mont Blanc côté italien s’écrouler. Alors en jouant sur tous les aspects évoqués ici, espérons que l’impact de notre sport préféré sera minimisé au cours des prochaines courses.

 

Par Olivier Dulaurent