A cette occasion, nous avons rencontré l’un de leurs mécaniciens, un hollandais de 22 ans qui travaillait pour un magasin de vélo puis est entré directement dans ce monde de la mécanique vélo chez les filles sans passer par aucune équipe masculine.

CCC-Liv04CCC-Liv04 | © Vélo 101

– Nous connaissons davantage l’équipe CCC masculine. Echangez-vous des conseils avec eux ?

Le Team féminin est complètement différent et réellement séparé. Forcément nous pouvons nous croiser sur les mêmes lieux durant la saison en fonction des agendas et des courses mais ce n’est pas quelque chose qui est recherché.

– Nous savons que Liv est très impliqué dans le cyclisme. Avez-vous des contacts avec le staff ?

J’ai effectivement des contacts réguliers avec le Performance Manager.

– Une partie du futur du cyclisme en général est le cyclisme féminin et son peloton professionnel. Comment estimez-vous les retours qui sont faits par les coureuses ?

Je dirais que c’est réellement très pro aujourd’hui. Elles savent très bien ce qui va et ne va pas avec le vélo, savent l’exprimer très clairement. Elles peuvent me donner un excellent feedback, ainsi qu’à Sram qui utilise ces informations pour leurs produits.

– Avec les cyclistes que vous avez croisées dans votre équipe, qui est celle qui est la plus méticuleuse et la plus intéressée par le matériel ?

Sans le moindre doute il s’agit de Marianne Vos. Pour vous donner un exemple, quand je suis arrivé dans l’équipe, nous avions un nouveau groupe Shimano et Marianne était déjà complètement au courant de la façon dont le groupe marchait, elle m’a même expliqué certaines choses sur le fonctionnement.

CCC-Liv03Marianne Vos l’emporte sur le Tour d’Ardèche | © CCC-Liv

– Les cyclistes pros, hommes ou femmes, communiquent de plus en plus à l’aide des réseaux sociaux. Et ils utilisent aussi des moyens comme WhatsApp pour communiquer avec leurs mécanos alors qu’avant il existait un contact systématiquement direct, par la force des choses. Quelle est votre préférence ?

Personnellement, je préfère largement le contact direct. Cela évite les malentendus que l’on peut avoir lorsqu’il y a un échange écrit. Je peux moi-même demander des précisions.

– Bien que vous soyez très jeune, quelle est pour vous la principale innovation technique : les groupes qui prennent régulièrement des pignons en plus, le DI2 ou l’électrique en général, le passage des câbles dans les tubes, les disques ou une autre innovation, la multiplication des pignons ?

Le changement de vitesses électrique, à coup sûr.

– Diriez-vous que cela a changé votre travail ?

Non, je ne dirais pas ça. C’est seulement différent : quand vous savez comment ça marche, cela se passe bien mais effectivement au départ il y a une certaine adaptation par rapport à ce nouveau matériel.

– Alberto Contador et Fabian Cancellara ont eu du mal à passer au changement de vitesse électrique et sont plutôt restés sur le mécanique. Comme ça se passez chez les filles de votre équipe, dans le cas éventuel où ce système ne leur convient pas ?

Tout le monde l’utilise chez nous, il n’y a personne qui envisage autre chose.

CCC-Liv02 © CCC-Liv

 

– Dans une étape normale sur une course par étapes, restez-vous dans une voiture à l’arrière de la course ou bien faites-vous autre chose ?

Je reste effectivement dans une voiture à l’arrière.

– Selon-vous quel est le côté le plus stressant de votre métier, les chutes ou passer les contrôles sur les Contre La Montre par exemple ?

Je dirais que ce sont les grosses chutes. Quand j’ai bien fait mon travail, je suis confiant dans le matériel donc a priori rien de fâcheux ne peut arriver. Mais dès qu’une course arrive, les paramètres sont totalement différents et il n’est alors plus possible de tout maitriser.

– Monoplateau et disques : quel serait, selon vous le calendrier de l’adoption complète de ces 2 éléments ?

Pour les disques, nous sommes déjà en plein dedans. En ce moment, les groupes comme les cadres sont développés dans ce sens. Dans les 2-3 ans, cela devrait envahir complètement le peloton pro.

En ce qui concerne le monoplateau, il y a une apparition du système comme avec Sram effectivement. Mais clairement, il y a des avantages et des inconvénients. Sram travaille beaucoup le sujet donc je suis confiant.

– Nous avons vu pas mal de vos concurrents, par exemple Rotor qui propose déjà du 13 vitesses ou encore FSA qui arrive. Considérez-vous qu’il s’agit là d’une partie de votre travail que de surveiller ce que font les autres marques que celles qui sont vos partenaires ?

Je pense que oui, c’est important d’être au courant. Effectivement nous avons des partenaires et sponsors mais regarder ce qui se fait ailleurs fait partie intégrante du travail de mécanicien.

– Toujours dans votre travail, vous devez être adaptable comme par exemple quand un nouveau cadre doit vous équiper. Cet aspect est pour vous quelque d’excitant ou au contraire une source de stress ?

Tout ce qui est nouveau est excitant pour moi. Donc, personnellement j’aime lorsqu’un nouveau matériel arrive dans l’équipe.

– Comment gérez-vous le fait que certaines coureuses ne font pas forcément la maintenance de leur propre vélo d’entrainement ou le tiennent sale ? Quelle est votre réaction face à cela ?

Cela dépend de plein de choses, la météo, les conditions de roulage, le temps dont elles disposent sachant qu’elles doivent s’occuper elles-mêmes du vélo de rechange qu’elles ont chez elles. Je ne peux pas vraiment conclure, c’est du cas par cas.

– Y a-t-il un point que vous détestez dans votre travail ?

Non, rien de notable même si je dirais que laver de façon parfaite les vélos et les voitures n’est pas ce qui me plait le plus. De même que réparer des vélos suite à des chutes jusqu’au milieu de la nuit, c’est parfois un peu dur et pas moyen dans ces cas-là de dire « ça, je le ferai demain ».

– Comment vous voyez-vous dans 10 ans ?

Pour être honnête, je n’en ai aucune idée. Peut-être dans un team masculin ou féminin, mais je dois préciser que j’aime l’ambiance du peloton féminin qui est comme une grande famille.

– Imaginez-vous une évolution de la limite du poids à 6,8 kg ?

Je pense que oui, effectivement. Mais d’un côté pour certaines marques il est aujourd’hui très facile et sans risques de faire un vélo plus léger mais pour d’autres marques c’est plus compliqué. Cette limite a donc de quoi permettre de mettre tout le monde sur le même plan, notamment sur le plan de la sécurité.

– Vous avez principalement des coureuses européennes, et surtout hollandaises mais par rapport à des coureuses de pays cyclistes « neufs » comme les Etats-Unis, quel est la façon de penser ?

Il est vrai que sur les 2ers mois de vie commune il y a quelques ajustements à faire pour se comprendre, tout simplement. Par exemple, quelle est telle ou telle blague et dans quelles conditions elle est faite. Mais ensuite tout se passe bien.